(parole en marchant - 3 juill. 2017 à 18h53)
En fait, les mots n’ont pas beaucoup d’importances, c’est vrai, comme leur composition, leurs agencements n’imposent pas forcément une rigueur prédominante ; l’essentiel c’est ce qui se cache derrière eux, à travers leur interface, cet intermédiaire, ils traduisent des expressions, des impressions, des faits, des actes, ce qu’on a voulu expliquer ou mettre ; c’est cela le plus appréciable, au-delà même de ce qu’ils sont ; quand on dit qu’ils s’organisent, c’est que quelque part une entité inconnue les dispose pour permettre un dialogue, une compréhension, un échange ou donner une information, peu importe laquelle ; voilà ce qu’ils dissimulent, une volonté de nommer une réalité observée, ils ne sont qu’un faire-valoir, des entremetteurs mouvants ; ils changent au fil des siècles et se métamorphosent tout le temps en s’abreuvant de nouvelles grammaires et des variations orthographièrent à travers de récents grands sentiments, de choses toutes neuves que la vie nous apporte, que l’on invente ou dépérisse ; ils sont élaborés pour agrémenter le maintien d’un récit sous un aspect littéraire en quelque sorte, seulement ; n’allouons pas aux mots plus d’importance qu’ils n’ont, ce qui se cache derrière eux peut se révéler primordial, et c’est à travers leur imperfection de leur signification et de la dextérité de l’auteur appelé à les employer pour exprimer une quelconque idée ; l’essentiel réside dans ce que l’on voulut dire, ne retenez juste que cela ! Ils s’avèrent évidemment indispensables pour distinguer les impressions qu’ils reflètent, les sensations qu’ils nous amènent sans plus, ne voyez pas plus loin ; méfiez-vous et faites attention à ne pas trop vous laisser séduire par ce qu’ils symbolisent ; dans une phonétique parfois flatteuse, vous trouverez en eux certes une musique, mais ne cherchez pas plus avant, ils ne représentent que ce qu’ils sont ; ils ne constituent pas ce qu’ils décrivent, ils en montrent une image bien sommaire, bien rudimentaire ; ils jouent le rôle d’œillades fugitives ressenties à propos d’une perception que l’on essaye de traduire, avec l’aide d’une multitude de termes synonymes pour s’approcher d’une réalité que l’on a ainsi expérimentée, ce n’est guère plus ; ils ne représentent pas cette réalité-là, ils ne l’ont qu’effleuré dans leurs approximations, la maladresse de leur utilisateur ou l’expertise de celui-ci, selon qu’il soit doué ou non pour relater des faits, voilà tout, ne lorgnez pas d’impossibles solutions ; les meilleurs représentants d’une langue deviennent alors ceux qui nous font éprouver toutes ces sensations, celles que l’on répète à travers des théâtres ou de multiples littératures, écrites, ou vues comme le cinéma ; les mots ne sont que ce qu’ils sont, un instrument, ils demeurent bien imparfaits ; je ne trouve plus rien à évoquer !
(texte ajouté le 13 déc. 2017 à 19h28)
Qui se cachait donc derrière ces mots, ils s’assemblaient, s’assemblaient, si curieusement de manière autonome, c’était bizarre ? On soupçonnait aussi un robote ordonnateur infiltré pour se connecter à la mémoire centrale (vous savez bien, celle-ci notifie toutes les idées des hommes), s’octroyait-il le privilège de réunir les termes correspondants à la souvenance d’İpanadrega, toutes les bribes laissées dans sa bibliothèque de données ? Une chose paraissait certaine, le ou les protagonistes de cet agencement littéraire en possédaient un double des clés pour s’introduire sans répit dans les registres protégés des connaissances communes. On suspectait, oui, plus précisément le robote alloué au savant fou et à ses étudiants et particulièrement à l’époque où İpanadrega suivait ses cours assidûment. Les recherches des inspecteurs aboutirent bien à cette machine électronisée ; curieusement, on l’avait désaffecté et mis à la retraite, mais apparemment il sévissait encore et probablement quelqu’un usait de ses services ; ou peut-être, s’activait-il seul par souci de rassembler cette mémoire éparpillée, puisque l’auteur l’avait délaissée naguère à la surprise de tous ? Évidemment, comme la tâche n’était pas terminée, cela semblait compréhensible qu’une entité quelconque s’en charge. Les esprits simplistes disaient négligemment : « les mots s’organisent d’eux-mêmes », et puis d’autres rajoutent pour alimenter une vindicte populaire des légendes « déjà toutes prêtes ! », ces dérives-là restent communes de nos jours. Mais au bout du compte, on rejeta bien la faute sur ce robote ordonnateur à la réputation de travailler de manière très méticuleuse et il se trouvait visiblement affecté que l’on ne finisse pas un pareil ouvrage, ce n’était pourtant qu’une souvenance d’homme. Oui c’est ça ! Ce récit-là devait être assemblé, peu importait qui le terminera, voilà pourquoi !