(parole en marchant – 21 juill. 2018 à 20h19)
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Donner la leçon ! Être un donneur de leçons ! Moraliser, moralisateur ! Parler comme un professeur, cela rime avec dictateur, et beaucoup de mots qui terminent en « teur » ; je ne suis pas sûr, ici, d’avoir de la hauteur ; et pourtant, de mon dit, j’en suis l’auteur… parfois, j’en doute ! On pourrait me traiter de menteur et je vais varier, petite nuance, j’apporte ici quelques valeurs indéterminées, de mon cerveau qui se gangrène, c’est mon malheur ! Pas que du mien à beaucoup il arrive la même chose, à toute heure !
Voyons voir l’ancêtre, l’ancêtre abattu, que reste-t-il sur ta souche qu’hier on nettoya de quelques babouches, ont-ils remis leurs oripeaux ? Non ! On te laissa tranquille cette fois, on n’est pas venu te vénérer, sauf moi ici quelque peu, mais je ne suis pas dans cette mansuétude, je ne vénère point, je m’indigne de ton coupage mercantile, de ton découpage qui fut mercantile, sans intérêt (autre que monétaire). Je te laisse, ami, moi qui t’ai vu de tout ton long il y a déjà longtemps, il y a au moins trente ans ; tes frères, tes enfants sont là, dans le calme. Même les moucherons autour de moi se comportent à l’unisson, ils se posent sur ce qu’il reste de ton tronc, cette souche toute rabougrie maintenant, qui s’en va peu à peu au fil des ans ; on dit que de tes racines, tu informes à travers la terre, de ton savoir, ceux qui t’entourent, ce qu’il faut faire et ne pas faire, et de savantes médecines que tu ingurgitas, apportées par quelques mycéliums ; par ton histoire, toi qui vécus il y a très longtemps déjà, au temps des rois, peut-être un est-il passé auprès de toi, alors que tu avais quelques siècles déjà… vint te voir, te révérer, s’incliner ? Probablement pas, avez-vous vu un roi s’incliner devant plus haut que soit ? Il s’en offusquerait, ah ! là non, le roi, ici, c’était toi et non lui, remettons les choses… les choses à leur place. Je reviendrai te voir d’autres fois, surveiller ta souche, pour que l’on ne l’encombre pas inutilement et je vois que le jeune arbre, après de toi fait couler sa branche au-dessus de toi dans une courbe élégante, n’y voyait aucun mythe, c’est un fait, elle est là je la vois, et j’y ai pris une image, une photographie de cela pour vous le prouver, le montrer, cette courbure élégante que l’on a auprès de toi ; l’élégance, ils ne l’ont pas eue eux, quand ils te coupèrent, ces maladroits… Salut ! vieux frères (aux chênes voisins), en haut je vois vos branches s’entrecroiser, me faire ici une entrée, par où je dois rentrer, justement. Adieu donc cette fois, mes amis, cet endroit est encore tranquille, combien de temps, dans combien de temps encore… Cet endroit semble préserver, là où tout autour la forêt est sans cesse découpée. De mon vivant je ne voudrais pas vivre cet instant où l’on vous découpera, c’est certain, ils le feront, ils ne vous laisseront pas, ils sont bêtes, que voulez-vous ! Mes amis qui ne me parlent pas, avec qui j’invente toutes sortes d’histoires, quand je passe auprès de vous. Ah ! vous ne vous offusquez pas, quoiqu’une fois, l’un voulût prendre l’apéro chez moi, je lui dis « non ! tu encombrerais le logis » (tu n’y pourrais même pas rentrer) et le temps que tu arrives, de gland en gland, je serais déjà mort ; non, restez donc ici vous êtes tranquilles pour l’instant ; je reviendrai vous voir, je vous le jure, à mes derniers instants, avant de trépasser, si je le puis je le ferai, vous dire au revoir à vous et à l’ancêtre, de sa souche démunie et que je respecte… Adieu donc ! (aux emmerdeurs) surveillez-les, faites tomber une branche sur le bûcheron, assommez-le, ayez une faiblesse passagère au moment de leurs passages, ah non, vous êtes bien sages, ici comme ailleurs, a-t-on déjà vu des arbres maudire le monde ? Ils l’accompagnent plutôt et votre monde n’a pas d’âge, alors que moi, pauvre hère ici, j’en ai bien un moi d’âge, et mon temps se rallonge, je ne laisserai pas trop d’années encore s’immiscer au creux de moi, je laisserai ce qui me compose, au sol, à la nature, au vent, à un certain temps, à un moment, quand je ferai une pause qui sera la bonne, ah ! j’applaudis déjà cet instant ; il faut savoir partir avec élégance, avec panache. (aux arbres) Vous, on vous abat dans ce lieu où je me débats, moi, encore, un peu, pas longtemps sûrement ; parfois le temps est capricieux et vous amène de ces vents, l’ancêtre en vit longtemps de ces tempêtes et tu as vu auprès de toi, quelques Hêtres s’affaisser sous le coup d’une rafale, comme oppressés ; la foudre, je le sais, s’est abattue sur toi, toi qui culminais en haut de la forêt, (quelques-unes de) tes branches, on les abattit par quelques éclairs, des nuées franches, le temps les a englouties… Ah ! certains disent, « parler ainsi est d’une bêtise, d’une cucutrie sans nom, c’est mielleux et sans intérêt ». Tu ne parles pas des hommes, tu ne les aimes pas, alors ils te renvoient leur vindicte… au milieu de la face !… Et quand je passe, que vois-je au bord du chemin, une nuée de Mélampyres et quelques Centaurées pour les border… belles petites Centaurées en fleurs. Ah ! Vous êtes bien belles cette année, toutes ces fleurs… quelques Eupatoires, des Sauges des bois, la ronce immédiate qui s’entrecroise entre vous, les restes de Digitales, au milieu de l’été, les Fougères déjà se fanes et le calme vient en cette fin de journée, juste avant la nuit. J’aime cet endroit, je dis, j’aime… les seuls endroits où je souhaiterais vivre tout le temps, loin des autres formes qui me ressemblent… Ah ! une petite Potentille, non, ce sont des Aigremoines, une petite fleur jaune en croix, non, oui, quatre pétales, ce sont (pas) des rosacées ?… Ah, ici, des petites Gentianes… les Genêts ne sont plus en fleurs, ils soulignent quelques traits, les graminées sont déjà sèches et s’égrènent au fil du vent, le Millepertuis parsème (aussi), s’égrène, au bout de leurs fleurs, le long du chemin ; des Scarabées s’amoncellent sur des détritus et les décomposent savamment ; la Limace s’ingénie auprès d’une rosée du soir débutante… Et je marche tranquillement, sans que l’on me gêne, gentiment… C’est amusant, la Digitale dans ses longues tiges finissantes, fines, n’arrive plus à se tenir droite, elle fait des courbes, et en haut les derniers bouquets de fleurs maigrichonnes s’évertuent à s’ouvrir encore, pour les derniers insectes, qu’ils butinent alors. Où es-tu gentil Papillon blanc que je voyais alors ? Alors que je vois un petit Papillon marron clair s’aventurer sur les Centaurées… Au loin, oh ! à quelques mètres, après le fossé, une Euphorbe, dirait-on, une plante… non, dont j’ai oublié le nom, je ne m’en souviens plus, je m’en souviens l’avoir déjà vu pas loin, qu’était-ce donc ; tes fruits sont rouges, entourés d’une gentille collerette verte, qui es-tu donc toi dont j’ai oublié le nom ? C’est marrant, je parle pour moi, dans la tranquillité du soir, je recherche disons-le savamment, un équilibre homéostatique pour tranquilliser mon esprit bouillonnant, alors que je passe devant une assemblée d’Eupatoires… en fleurs… je me dis qu’il est bien calme ce moment, pas un oiseau, les couvées sont finissantes, quelques cris de Corbeaux au loin, des corneilles, le Moucheron vaguement embêtant, la chaleur n’y est pas ni l’humidité trop oppressante comme dans les tropiques ; aaah ! non, j’ai bien mis mon écouteur le silence existe vraiment, car savez-vous, j’ai un écouteur pour amplifier les sonorités environnantes, car je n’entends plus guère, puisque je vous parle… Ah ! un Cèpe dévoré par des limaces… Allez ! À plus tard…