(version originale)
1 (parole en marchant – 2 mars 2016 à 16h57)
Je vais vous dire pourquoi nous avons fui, il y a très longtemps, très longtemps, peu être plus de deux mille ans.
2 (parole en marchant – 2 mars 2016 à 18h18) (source perdue remixée)
Oh de jour en jour, quelques visiteurs arrivent à passer et ils nous apportent à chaque fois des désillusions, trop souvent, mais nous leur disons,
« mais enfin, si vous désirez perdurer, si vos civilisations meurent sans cesse, c’est probablement qu’elles ne savent plus s’adapter au changement », aux modifications qu’elles ont elles-mêmes régulièrement provoquées, et que la nature se remplaçant, s’accommode toujours des nouvelles conditions ainsi créées et gérèrent des équilibres différents ; que les hommes ne souhaitent pas s’acclimater à celles-ci, imposés par le milieu, car à tous les points de vue, les lois terrestres dominent et nous dictent des conduites, à vouloir s’y soustraire, c’est la mort inexorable, c’est ce qui va vous arriver ici ; nous aussi, jadis, nous désirions nous passer de la nature et de ses fondements ; nous avons failli périr plusieurs fois, mais par chance nous avons compris à temps que c’était inutile et si nous voulions survivre, nous devions nous adapter en nous conformant aux règles… Pas d’obédience à un dieu dans tout cela, la croyance ne nous apportait rien, aucun réconfort de plus, il aboutirait à quoi de supérieur, rien de mieux…
Au début, nous étions devenus des êtres très bestiaux, obnubilés par une seule chose : survivre et se nourrir ! Les étrangers étaient des indigents, soit, ils faisaient comme nous, à accaparer les maigres subsistances du lieu, on leur en laissait malgré tout, nous n’étions pas des sauvages infâmes qui s’entre-tuaient, nous devions survivre et les affrontements ne résolvaient aucunement la situation, au moins nous avions compris cela !
3 (parole en marchant – 2 mars 2016 à 17h09)
Nous sommes arrivés en ce lieu, nous savons, nous ne l’avons pas dit au départ, nous vous l’avons caché, mais nous connaissons bien nos origines, elles séjournent dans un fond de notre mémoire et cela nous suffit ; nous ne parlons que très peu de nous, mais comme vous, accaparé aussi de vos questions, je vais vous le révéler enfin… Nous sommes venus ici, car nous fuyons les peuples barbares qui nous assaillaient et pour leur échapper, nous ne trouvions aucune issue idéale, soit essayer de passer à travers leurs lignes dans des terres praticables, ou tenter de franchir le grand désert ; ces tribus agressives savaient très bien que si nous le traversions nous allions probablement y périr, c’est ce qu’il croyait et nous avons opté pour le choix inverse de ce qu’ils souhaitaient, nous avons décidé de franchir ce désert et par une formidable chance nous avons survécu ; nous avons pu subsister et nous sommes arrivés en ce lieu invraisemblable et sans appellation parce qu’il ne fut jamais désigné par quiconque, c’est parfait ainsi ! Aucun de nous jamais ne l’a fait, il n’a pas besoin de l’être, c’est son mystère et il doit rester innommé… Là où nous sommes, peu de gens y parviennent indemnes ; c’est toujours essoufflé, accaparés par les chaleurs du désert, que certains arrivent quand même ; alors au fil des ans nous vous avions ignoré au départ, autant obnubilé à survivre pour ne pas mourir ; peu à peu nous nous sommes adaptés au lieu, nous avons pu y établir un campement un peu plus heureux et avons construit ce village improbable où vous êtes venu, le rendant légèrement plus accueillant ; nous restons curieux du monde des hommes l’étant nous-mêmes aussi, nous avons voulu comprendre ce qu’étaient devenus nos semblables ailleurs, alors, nous les accaparions de questionnements innombrables ; au fur et à mesure, nous notions cela dans nos mémoires, et ceux qui nous visitent, repartent dévaliser, c’est vrai, vidé de toutes leurs souvenances, car nous essayons toujours de comprendre, de comprendre ce que nous sommes… Et nous désirons perpétuellement nous adapter, nous souhaitons perdurer, nous reproduire, subsister, nous accommodant de ce monde ; ce qui nous intéresse, c’est l’acclimatation à ce milieu austère et très dur où nous sommes, et cela nous suffit ; nous persistons ainsi, et cela nous émerveille de jour en jour, pouvoir se conformer à un lieu hostile et survivre, nous vivons de peu… Nos besoins ne demeurent pas considérables, essentiellement de se contenter de ce qu’on a, c’est-à-dire très peu, et c’est notre seule richesse, elle s’avère ultime et suffisante, fondamentale à notre existence, et cela est largement satisfaisant ; et sur les dieux, à chaque fois, on nous apporte des croyances ; certains personnages aux religiosités accrues sont venus, ils ont voulu nous accaparer, essouffler d’abord… ayant traversé l’immensité déserte, ils sont arrivés en désirant nous convertir, ne saisissant pas que nous ne pratiquions aucun culte ici ; nous n’avons qu’une foi, celle des contraintes bien comprises de la nature, nous respectons ses règles, nous n’avons pas le choix d’ailleurs, si nous n’acceptons pas nous mourrons, irrémédiablement nous disparaîtrons, et ne pourrons plus engendrer… Vos venues nous apportent un sang nouveau, nos femmes accaparent les hommes bien mis, pour pouvoir enfanter à partir de vous, régénérer notre lignée, voilà ce que nous en gardons, voilà, voilà…