(texte électronisé du 2013-02-06 02h50)

—> 1. « İl », prolegomena, studium :
—> récit primitif original

choses
savantes
et
choses
navrantes

Curieux de tout, il a fait de savantes études du dedans de son crâne et y a trouvé de terribles incertitudes où crèvent les tenants de votre ingratitude. Puis lassé de cet intérieur cervical, la mine réjouie, avec des élans soudain et bref, reprenant des jeux d’enfance et puis d’autres, comme un intermède, il décidera certainement un jour, de parcourir les lointains horizons.

*

Savez-vous, il brûle au dedans et aucun ne s’en doute, il fait semblant avec un air de rien du tout, somme toute, mais quelle misère ce feu en creux, il l’inonde, le broie, le consume, il résiste encore et combien de temps cet encore là va durer ? Les murs de son antre ne cessent de lui murmurer des arranges pas fameuse. Mais qu’ont-ils vu de si prenant pour assaillir autant ses rêves, ils ont une mémoire bruyante et ne sont pas sages avec lui, c’en est à vouloir partir. Parfois il a honte de ces humeurs et le sang coulant dans ses veines, lui, ne cesse de rougir, c’est sa raison d’être.

Pourquoi donc le rouge est la couleur du drame ?
Qu’il faille des chairs éclatées pour y répondre,
alors on en fait tout un mélodrame,
cet illustré devient très décevant.

Il a prié en mécréant, il a gueulé de toutes ses dents et à peine pleuré, juste une sueur pourpre s’est installée, un tir mal barré qu’il a enfilé par mégarde un jour de grand froid, les hivers lui sont de plus en plus pénible, il y perd à chaque fois plus qu’une dent.

Hier ce fut une oreille, une jambe blessée, un rein, aujourd’hui le bras cassé, demain la tête lésée, on finit toujours dans un drôle d’embarras.

Il le sait, ses humeurs ne sont pas drôles et le ciel noir des grands soirs étoilés ne lui en porte pas rigueur, celui-là même, qu’il inonde de mille propos dithyrambiques, inlassablement récités jusqu’à ce qu’une haleine fétide l’arrête soudain, avec la bouche pâteuse des bla-bla innombrables qu’il faut laver.

Il s’invente au moment du sommeil des histoires inévitables qui empêche de dormir, c’est toujours pareil, c’en est à vomir, laissées-lui au moins un somme et quelle fatigue énorme faut-il asseoir, pour une heure d’un bon repos ?
Faut-il qu’il s’assomme ?
Il a renoncé aux drogues des médecines que l’on ingurgite sans réfléchir.

Il songeait à ce soigneur un jour écouté, qui parlait de ces médicaments nés des sécrétions naturelles du corps et de l’âme…
On ne veut pas d’un être autonome, cela, ne se fait pas, c’est d’une indécence civile, il faut que vive la manne médicamenteuse et industrieuse, le soin « pilule » nourriture de nos angoisses et de nos tourments, voilà la nouvelle richesse de cette époque !

C’est l’insomnie qui lui fait écrire toute une nuit et penser « qu’y puis-je ? C’est au-delà de l’ennui »…
C’est au-delà de toute vie saine et paisible. Il a choisi des chemins tortueux, improbables et sans carte ni trace de quoi que ce soit. Tout est à découvrir, le moindre propos, la moindre envie, la moindre extase.

C’est drôle comme les tourments vous inspirent ? En comparaison, le bonheur devient fade et sans saveur, stérile et insolent, il ne sécrète aucune imagination dans les têtes, quand tout va bien. Même cette phrase ne va pas bien. Tenez ! là rien que d’en parler tout devient d’un dérisoire innocent, futile, stupide…

Vite ma drogue ! Ma dose de malheur, ma décrépitude, la pâleur dolente et superbe de mon rein qui m’en bouche un coin avec cette soudaine et terrible colique néphrétique, souviens-toi ma douleur, ce fut à se tordre dans des sueurs éclatantes, rhaaa…

Drolatique inspiration.

Mais oui, c’est risible, il ironise, la description tien de la farce, la souffrance méprisable est une garce et j’en passe des myriades de sobriquets piteux à son encontre.
Nous sommes notre propre malheur, nous en faisons à toute heure une manière de vivre, quand je vois avec quel acharnement nous nous entêtons dans des guerres de toutes natures où la stupidité s’extasie avec la connerie, ce sont les maîtres mots…

Je pose mes notes comme de précieux écrits
que l’on trouvera un jour comme ça pour rien
riront ceux-là les découvrant d’un geste hautain
diront, il écrivait cet homme-là pour les chiens
les jetterons mes mots en pâture à la meute
avec dédain auront joui repu de l’émeute

Quand İpanadrega s’essaye à la vie des hommes, très vite, il s’engorge dans des phantasmes d’être fou, s’active en une savante étude imaginative qu’il écorne à peine née et râle sur la rampe de ses idées, d’infernaux propos mal barrés…

Chers amis de l’ombre, bonjour !
Que faites-vous dans ces coins rassis, aux angles ambigus et noirs ?
Plus d’une fois, je vous ai vu, furtif, l’œil aux aguets, prêt à bondir sur votre proie, dénuée de tout embarras.
C’est que vous êtes sales et sans arrêt pénibles et toujours pareils, l’haleine au dedans, versatile et puante telles les rognures des poubelles bavantes, celle-là même que l’on vide chaque matin dans ces camions à ordures de la grande ville.

Vous avez la dent navrante, écornée et chancelante des êtres mal entretenus, vous bavez trop, c’est dégoûtant, vous êtes répugnants, l’odeur est fétide dans vos remuements gras et double, c’est vraiment navrant.
Je sais votre espièglerie et le registre de vos manies à me guetter souvent quand je repose ou que je dorme, vos ombres suspectes sont là et me narguent, je vous méprise quand je suis dans le plus simple appareil.
C’est vrai que je deviens ce « sans sommeil » la nuit occupé à un réveil hypothétique d’un cauchemar systématique, celui d’une vie très merdique et mienne, j’en deviens bucolique, le rêve champêtre m’enivre jusqu’à la colique, on finit toujours par y goûter un jour, à cette terre toujours par terre.

La nuit est devenue son royaume où il s’occupe à l’évitement de son somme, infernale écriture qui l’assomme…
Déjà l’aube ? se dit-il.
Il faudrait tuer le jour, le masquer au soleil, mais qui en voudrait de ces jours ennuités, le monde ne serait plus pareil.

La nuit est devenue mon royaume, je m’occupe à l’évitement de mon somme, infernale écriture… déjà l’aube, il faudrait tuer le jour, le masquer au soleil, mais qui en voudrait de ces jours ennuités, le monde ne serait plus pareil.

Alors, il s’invente une histoire de vaurien, vide les coffres pour de la misère et gueule à l’astre du jour sa nouvelle manière.

Au soleil, certains sombres amis sont venus me voir et se sont assis après de mes ombres multiples, pour leur faire diversion, c’est mon outrage, aucun détour possible, le jour me protège me dis-je ? Mais quand l’astre est haut, c’est les hommes qui à la place m’oppressent et veulent me faire rendre gorge, j’ai abusé de leur fric qui m’était tendu comme une tentation. Ils ont des manières, oh ma mère ! teintées d’une justice de la force et de l’enferment assez systématique, le ton n’est plus pareil maintenant, et pourtant, et pourtant, j’ai comme une vague idée… l’idée de mettre une raclée à tout cela, pour en finir une bonne fois pour toutes.
Vos saloperies c’est tout ce qui m’ennuie et je vous les laisse jusqu’au bout de la nuit, éternellement !

Voulant ainsi bouleverser les grandes légendes d’autrefois, il n’a pas tué la sorcière et le dragon. Dans une infinie mansuétude, la vie lui donna un indéniable talent d’orateur savamment ingénié en lui, au fil des ans, cousu par petits bouts dans sa cervelle énervée et pour qu’à la fin il puisse dire, « je n’étais pas si mauvais. »

Oui maintenant, il s’engorge de trop de mets des plus incertains, la mine déconfite, il braille de l’intestin. Il fait trop de repas, certes, mais ce n’est que pour ne plus penser, ne point écrire le roman de sa vie, éviter la folie, éviter de terribles dits ! On l’a vu qui maraude par ici ou là, crachant toute sa verve et avec talent dénier, engloutir toute une dinde, avec des marrons chauds jusqu’au dernier rot, oublier sa liturgie, la messe est dite !

*

C’est alors qu’il a fait de sévères études du dehors de son crâne et y a trouvé les effrayantes rumeurs d’une peste future qui refroidira toutes nos âmes, c’est une légende terrible en train de naître et c’est d’un œil darne qu’il implore sa raison de bien réfléchir à ce qu’il faudrait bien faire en ce bas monde pour être ne serait-ce qu’un jour, qu’un instant, un soleil, dans les tourments qui le damne, y lire une histoire ou d’y voir clair un moment, devenir lucide à cet instant et reposer un peu ensuite…

Il décida enfin de parcourir les lointains horizons.