(26 mai 2019 à 18h45)

—> paroles de fin du jour, après étude des sonorités mémorisées en marchant, des jours précédents ; retrouver les journées correspondantes…
—> découvertes sonores, se contenter de peu !

—> 2. « petit chemin » : aparté, introduction à l’étude des sonagrammes

Loin d’être déçu de la machine enregistreuse, j’en découvre des possibilités insoupçonnées qu’elle me permit de voir (et de réentendre avec plus d’attention), comme ce qu’on appelle des sonagrammes, des sortes de scanners imagés des sons ainsi mémorisés, comme une fresque que l’on mettrait au mur, l’écriture de la parole de chacun, des sons émis de toutes parts, qui s’imprègnent comme des traces plus ou moins élégantes, marquantes, étonnantes ! Une gymnastique des sonorités qui s’entremêlent, comme dans cette forêt où j’y enregistrai souvent (plus que ma voix). Mon étonnement de voir cet entrelacement de fréquences qui se juxtaposent d’une manière élégante, comme savent le faire les oiseaux, plus que nous. Et cette remarque que je m’empresse de faire, quand j’y compare ma propre parole et de toutes les fréquences qu’elle représente, comparer à celles de l’oiseau, la première chose qui vient à mon entendement, à la vue de ces sonagrammes, c’est la nuance étonnante que je vis, constata ; autant mes (propres) sons sont brouillons (ceux émis par ma voix), d’harmoniques fades, autant le chant des oiseaux, d’autant plus que quand ils gazouillent chacun de leur côté et qu’on les additionne comme le fait cet enregistrement qui n’en distingue aucun, il nous permet de voir cet entrelacement où la voix de chacun des oiseaux ne recoupe pas celle des autres espèces (chanteurs). Chacun émet sa propre voix dans un registre qui lui est propre et qui ne masque pas, qui ne masque pas la voix des autres ! De ce fait, ils distinguent leurs mélodies, pour que la reconnaissance de celle-ci se fasse sans encombre, alors que la mienne, si je discutais avec un autre de mon espèce, elle opérerait comme un recouvrement et il me faudrait une oreille très fine que je n’ai plus dorénavant, pour distinguer les sonorités de celui que j’entends (le comprendre au-delà d’une éventuelle qualité de sa voix) ; autant la simplicité du chant des oiseaux (souvent très dépouillé), ces harmoniques extrêmement subtils qui ont l’art de ne pas s’entremêler, alors que quand mon son à moi, qu’il soit émis par un gros benêt, un maigrichon ou une autorité quelconque, qui voudrait m’asseoir, ce son-là est invariablement fade et sans saveur à côté de celui du moindre oiseau. Quand vous faites cette addition (audition, ou inspection) du moindre piaillement que l’on dit (avec dédain souvent), vous remarquez, en effet, la subtilité d’une symbiose évidente, dans cette forêt. Les oiseaux, entre eux, même s’ils peuvent avoir des attitudes inélégantes quand le rapace chope le petit moineau ; son cri, au rapace, est souvent aigre (tranchant) caractéristique (sans confusion possible). Le petit oiseau lui, son chant est plus mélodieux, il n’a rien à attraper, sinon quelques moucherons, quelques insectes du coin ; il ne combat pas ses voisins de la manière du Faucon pèlerin, il combat à travers son chant justement, et ce combat est de se distinguer des autres, pour appeler (séduire), au printemps, la future compagne ou pour discuter de l’air du temps, aussi, pourquoi pas ? Il n’y aurait que nous qui pourrions nous permettre ce genre de mélodies, dans quelques livres ou quelques chansons ou quelques ouvrages de n’importe quoi ? Ils savent, ils ont appris à distinguer leurs chants, les uns des autres, à tel point que quand le même oiseau vit (vivant) dans la forêt et que vous le mettiez dans une ville, il aura l’art, de savoir adapter son chant à la tonalité de son chant (sa mélodie, dans des notes) en dehors du bruit ambiant de cette même ville, de façon à ce que celui-ci ne soit pas couvert par le bruit des autres que lui, tout comme il le fit dans la forêt, et que chacun le fait de façon à ce qu’il ne recouvre pas le chant des autres ; pour s’entendre, chacun utilise son petit canal, son petit registre à lui. Nous, nous émettons des brouhahas globalisants, nous ne sommes pas un spécialiste du chant, n’oublions pas que ce sont eux, les oiseaux, qui nous apprirent ce qu’était le chant ; nous avons construit des bâtiments faits (tout) exprès, pour émettre quelques mélodies, quelques musiques (au-dedans), ce que nous copiâmes dans la nature. Le rythme, le grillon peut-être nous l’a donné ou quelques insectes, tapant (grattant) de-ci de-là, mais essentiellement les oiseaux certainement… (cela) nous fit comprendre justement, ce qu’à quoi pouvait servir cette musique, transmettre une information (émotionnelle) pour survivre, pour se reproduire, appeler une compagne future, un cri d’alerte, une alarme, un cri de pluie ! Certains oiseaux chantent la pluie (comme le Pinson des arbres [Fringilla coelebs]) ! Eh oui, leur chant n’est pas le même à ce moment-là, ils disent « il pleut ! » Ils s’en émerveillent, ils en sursautent parfois, s’en chagrine, il y a mille façons de chanter la pluie ! Ne croyez pas que nos ancêtres inventèrent tout, ils ne firent que copier, comme nous le faisons toujours, nous ne faisons que copier ce que la nature nous montre, elle nous dit « inspire-toi de moi, dans l’évolution que je veux de toi ! »*, c’est un petit message sobre, élégant, comme le chant d’un oiseau, quand il est élégant lui aussi, vous émet une sonorité essentielle, essentielle pour lui, suffisante pour lui, il n’a pas besoin forcément d’une emphase extraordinaire, même lui copie la vie autour de lui ; bien des oiseaux imitent le chant (les sons) de ce qu’ils entendent, pour leur contentement, pour masquer une idée, pour attraper une proie (l’induire en erreur), ils savent eux aussi être méchants, mais c’est pour survivre aussi ! Comme nous, nous le faisons. Mais quand une espèce s’avère trop nombreuse et que ses copies incessantes, son ego, le submerge (amène son ego à le submerger), comme le nôtre, nous en venons à faire d’énormes bêtises ; et la première, est de se percevoir comme l’ultime évolution terrestre, alors que nous en sommes que la somme, une des sommes ! Elles s’accompagnent, à côté d’autres espèces qui nous forment et cohabitent avec nous, vivent en nous et nous composent (par conséquent)** ; en fait, nous n’inventons pas grand-chose, l’expression qui nous vient n’est que celle que la nature nous donne, ce qu’elle nous inspire, la forme, le trait, la couleur, la sonorité, la nuance, le toucher, toutes ces choses ont été des milliers de fois expérimenter avant nous, et nous est transmise de mémoire en mémoire, d’être en être, quel qu’il fût, humain ou non, nous sommes tous reliés à l’unisson, par un codage fondamental (la genèse ultime de toute vie) rigoureusement identique, des milliards de fois recopiées avec autant de variation qu’il y a d’espèces et d’être sur cette planète.

Alors, oui, la petite machine enregistreuse ne m’a permis que de confirmer ce que je pressentais déjà et de me le montrer dans ces images de sonorité d’une forêt, du piaillement dit-on de ces oiseaux quelconques, que l’on ignore le plus souvent et qui en agace certains ; ah, fantaisie fameuse que l’on s’octroie, ce déplaisir du chant d’un oiseau. Alors, ces petits dessins, les sonagrammes, la voix de chacun de ces oiseaux, je les y ai mis dans cet ouvrage, pour que l’on voie ce que représente cette expression qui n’est pas de nous ; le charme qu’elle représente à mes yeux, vaut toutes les extases, tous les orgasmes du monde (des zommes), toutes les culbutes, toutes les jouissances que vous pourriez avoir, permettez-moi, excusez-moi, elles ne valent pas grand-chose à côté de ce que je vois et découvre, un émerveillement ! (un émerveillement, certes, anodin pour beaucoup). Mais largement suffisante pour mon contentement, comme ce le fut quand je vis une lumière entre certains arbres, sa variation (étonnante), ou un paysage, une petite note (d’une musique inconnue), le sourire (innocent) d’un enfant… La courbure d’un arbre, la forme d’un nuage, un essoufflement du vent, tout cela, vaut toutes vos jouissances, je n’ai pas besoin d’autre chose pour exister ; voilà ce que me dit (m’inspire) le petit son (de ces chants d’oiseaux) que j’enregistrai, qui s’avérera pour moi, excusez-moi, emblématique, merveilleux, extraordinaire ! Et suffisant largement à mon contentement, à mon contentement…

(stridulation du Grillon)

* Cela ne veut pas dire pour autant que la nature serait irréprochable ou qu’elle ne se trompe jamais ; non, elle se trompe tout le temps et ne cesse de rectifier la tentative qu’elle accomplit, d’un être à un autre être, sans cesse… À force, évidemment, ce qu’il en reste de toutes ces erreurs, c’est une expérience ; et le résultat, la somme de toutes ces erreurs ont permis, à force d’avoir tant persisté, le chant, une envolée, la cigale, le cou de la girafe ou la défense de l’éléphant, les nageoires du requin, les pattes de la fourmi, les fabrications de nos armes, ou la peinture d’un soleil levant, tout cela résulte de tant d’erreurs accomplies auparavant ! Le résultat nécessitera toujours un remaniement, une adaptation permanente dans une nature en perpétuel mouvement.

** Les procaryotes faisant fonctionner notre structure multicellulaire (renvoi aux textes abordant le sujet).