(texte manuscrit – 18 févr. 2020 vers 11h)

—> 3. « singes savants », considérations philosophiques : de la famille, etc.

De poser cette question à une vieille personne, « Vous n’avez pas de familles ou d’amis ? »
Quelle réponse aurez-vous ?
Elle répondit par ceci :
« Vous savez, une famille naît quand chacun pense nuit et jour à l’autre et sans souci réciproquement. Je naquis dans l’oubli de cette attention, chacun était plus affairé à survivre plus qu’à se soucier de l’autre. L’autre ne devenant qu’un déni, une gêne, une désapprobation de renoncements… Alors, oui, dans ces conditions on ne peut avoir de famille. Les proches n’étant que proches, sans lien autre que le sang, sans affects probants, deviennent plus un souci de cohabitation, qu’autre chose. Cela ne peut former une famille, mais seulement un lieu de survie momentanée. Curieusement, quelques parentés éloignées furent plus près d’une famille, ou, disons-le autrement, me montrait une cohabitation familiale unie par un affect religieux de cohésion, parfois lourd, mais solide. Cette vision m’a à la fois séduite et repoussée. Séduit par l’attention faite aux autres, repoussée par l’enfermement que cela suscitait, j’étais trop habitué à ce déni familial et l’adaptation homéostatique de mon être s’y était habituée. Il y trouvait une expression de liberté, avec en contrepartie une grande solitude, une introversion ; mais un recul, face aux affres du monde, salutaire pour ne pas se faire happer par toutes sortes de mouvements fédérateurs politiques, spirituels ou autres, pouvant se substituer à une famille. Une famille, elle vous manque si vous avez plus ou moins consciemment le désir de celle-ci, afin de permettre à un affect un épanchement, et de le résoudre à travers quelques élans d’affection ou de tendresse. Autre être est soumis à ce besoin, il le régule, notre génétique est construite avec cette organisation stabilisatrice de l’être. Mais aussi, cette même génétique permet à un être de s’adapter ; s’ils n’arrivent pas à résorber ce besoin de famille. Il cherchera à trouver un substitut l’équilibrant, et la solitude peut subvenir à cela. On devient ermite pour survivre, seulement survivre. Est-ce bien ou mal, je ne sais ? Et même là n’est pas la question, c’est un fait. Une situation que vivent certains êtres, il ne m’appartient pas de juger cela. La norme serait de penser qu’il n’existe qu’un mode d’existence. Ce serait dénié à la vie sa grande plasticité d’adaptation, c’est ainsi que s’est forgé tout le vivant depuis la nuit des temps. Les plans de fabrique de tous les êtres ont au creux d’eux-mêmes ces informations régulatrices leur permettant de s’adapter. Si cela n’existait pas, depuis longtemps le vivant aurait disparu de ce milieu terrestre. Enfin, je dirais que la meilleure des familles serait dans un idéal confus, celle qui ne vous juge pas, mais celle qui vous adopte comme vous êtes, avec vos qualités et vos défauts sans se poser de plus amples questions. Là, ce serait un idéal ! Mais cette situation existe-t-elle ? Elle me semble de l’ordre de l’exceptionnel ! Vous savez, l’affect n’a pas de sexe, il est universel, s’il est satisfait (peu importe comment) il régule, tranquillise, stabilise, c’est sa fonction ! Les arguties philosophiques que l’on greffe dessus sont souvent superflues. Ne donnez pas aux hommes des affects plus subtils que ceux du ver de terre, ils sont du même ordre et s’expriment dans la différence de chacun, ce principe agit de même, le ver de terre et l’homme ont des ancêtres communs, ne l’oubliez pas ! Même si l’affect du ver de terre semble rudimentaire, il obéit aux mêmes phénomènes d’homéostasie, c’est une fonction essentielle du vivant. Tout cela représente un constat, des faits, une observation, que chacun peut réaliser, nul besoin d’avoir étudié dans de grandes écoles ou des universités, seulement du “bon sens” né d’une observation dégagée de toute idéologie, dans la mesure de votre capacité à appréhender votre environnement, sans préjuger. »