(d’après récit primitif électronisé du 15 sept. 2012 à 2h27)

—> la narration primitive de 2012 s’avèrera plus tard erronée, le scribe n’avait pas compris au début, İpanadrega n’est ni un nom ni une personne !
—> version finale, İpanadrega devient « İl » à partir de 2018

roman tourments naufrage
envies et espérance
d’un autre lui…

İl était un enfant irréaliste, né de la conception de son maître, improbable et sans émotion. Du jour au lendemain, il devint un de ces monstres d’envie que le monde redoute et son créateur n’eut de reste qu’un désir : le voir détruire le château de sable de ses démons. İl ne détenait, pour son aisance, qu’une pauvre esquive, à peine cette force des muscles qui vous font casser de ces vitrines où les masques tombent, comme ces têtes en forme d’entonnoir, massacrées frénétiquement à la foire. C’était un idolâtre, un vent futile sans émoi, une figure de style, une arabesque sans bons sentiments, une vague aubaine… Jadis, dans les contrées du bout du monde, il se racontait qu’un étrange être eut ravagé les terres australes à coups de bottes et de chagrins. Les poseurs affirmaient à propos de ses méfaits « ce sont de viles digressions faites de gestes impromptus », précieux mots inattendus qui ne vous donnent pas le moral… C’est que d’inconnues engeances les gardent en mémoire, à travers des romans alarmants, écrits tout le long des grands hivers ! Des sortes de paroles rocailleuses, faites de rien, faites de peu, de très petits souvenirs ; des soucis surtout, enfin c’est ce qu’on en dit, cela n’est pas très clair, et malgré tout, anime le vaste monde et l’ennuie assez. Vous pouvez en rire, ici… et là… (il montre cela sur une mappemonde et s’en va.) İl a vu tout cela et n’en tire aucune fierté, car c’est un enfant au cœur rejeté qui voudrait vivre, ne serait-ce qu’un été, la mine réjouie des innocences claires où brillent des fontaines de « flots bleus », c’est son imaginaire un peu désuet. Il se voit dire « c’est merveilleux » ; et vous écoutez tout son tralala de mots mielleux ou futiles, il adore ça… Qu’il paraisse bête ? Non, niais certainement, un peu. C’est qu’il aime ces mots sirupeux au romantisme bidon qui vous donne de ces « allures ! » Évidemment, lui, n’ose point le panache, il se croit sot et s’illusionne donc, dans de savants apprentissages, corrigeant ainsi sa prose pour la réciter à nouveau sans une tache ; insatisfait de lui, il refait sans relâche. Aussi, il a gardé un rêve ou deux au fond de son placard, une horrible et sombre cachette, qu’il protège fiévreusement, la main sur la gâchette. Faites bien attention à ce que vous dites, si par mégarde, vous persistiez auprès de lui.

Regrets. D’ailleurs, il regrette les anciennes vacheries des semaines passées, à s’agacer de jour en jour, en de vains propos, sur la limande étroite de ces entrefaites ; c’est qu’il a les idées plates, un autre de ses méfaits, des plus déplorables, des plus indécollables, sa joie ! İl a composé des rêves de son regret. La tristesse l’inonde dès que se pavanent tout autour ces cœurs de l’ennui, alors qu’il voudrait tant chanter, exprimer une envolée lyrique, s’élever d’une manière un peu magique et faire chavirer le frêle esquif… Il est né d’une rumeur d’estomac, celle de son géniteur, et du tourment, celui qui s’immisce dans ces hauts du crâne que le cerveau dessert, quand, au fond de la nuit, vient d’apparaître le début d’une insomnie ; une humeur de plus à son chapelet aventureux, une autre goutte de pluie, un ciel humide et un mal qui ronge, comme la fuite douce et continue d’un univers dépenaillé, sans cendres ni reflets ; puis une musique s’insinue, un souffle prenant et discret à la fois, une misère dans le noir, jusqu’au matin enfin, ivre de fatigue… Des ondes métaphysiques l’inondent. Avec au visage, le rouge et des pommettes luisantes, il rêve d’une femme comme d’une figure de l’amour et s’agace à des désirs qui s’évadent de lui bien vite, hélas ! Navré… Il a réussi à alpaguer, malgré tout, une émotion ou deux, son remède à l’ennui systématique. C’est en cela que vous le trouverez très enchanté aujourd’hui, comme certains jours, il a passé une nuit sans colique… Certes, İl n’a pas connu le regard de l’ingénue, cet idéal magique, ni son souffle, ni son sein, ni ses reins, ni la besogne des envies et de l’instinct. Sa verge sent le moisi et ne s’engorge que de pertes d’une eau sale. Ce n’était pas qu’il fût vierge, mais cette raideur ici, ne l’inspire plus et les mouvements de chairs, ces remuements frénétiques, le répugnent… Les embrassades aussi l’incommodent, le mélange des haleines, la sueur érotique des matins froids, n’étale plus le même rêve narcotique qu’à ses vingt ans ; en fait, il trouve que sa vie, c’est de la merde !

Tranquillisez-le. Oh ! Ne vous moquez pas de lui, n’apportez aucune médisance, aucun défi. Eh ! sinon qu’arriverait-il ; une humeur inappropriée, un geste qu’un instinct très offensif lui ferait regretter ? Alors, au lieu de le quereller, donnez à ses abattements, de doux chants ; montrez-lui de belles images à ses yeux enfin réjouis, qu’ainsi il musarde de son regard esseulé sur la chaude nuit d’été, un verre à la main, la mine alanguie, le front enrubanné des idées du jour, à la recherche d’un extraordinaire moment où il pourrait faire de l’amour, son ultime destin ! D’ailleurs, pourquoi faudrait-il constamment écrire des récits de haine et de violence, alors que se prélassent de frénétiques oripeaux au creux de vos vilains mots ? Il détiendra toujours une tirade d’avance… Voyez-le, il soliloque avec ce verre devenu une vasque aux mille propos, et ce n’est pas un dé à coudre qu’il tient là, il ne reprise rien, mais peut-être un idéal tout trouvé, l’ivresse d’un soir doucement allongé, avec des impressions, la paix au creux des reins… À cet instant, un vent frêle a instillé comme une sorte de température épatante, le sourire d’une muse qui veut faire mumuse avec lui… (laissons-les). İl ne tuera point, n’en faites pas un assassin. Il s’ingénie à imiter les gestes d’une femme, y retrouver toute la grâce, la volupté ; et les sentiments qui vont avec. Ne criez pas son nom, il serait trop long à prononcer, son énoncement ne fait que commencer, ni de l’avertir, cela le ferait partir, inonderait les commodités de la rue ; vous escaladeriez avec hantise, la peur au fond des yeux, les fenêtres des rudes immeubles à la texture froide que perpétuent les cités d’aujourd’hui, ce serait bien d’inutiles tracas pour vos extrémités surprises. Laissez donc le mouvement libre à ses membres anodins, pour une fois qu’il parade, si cela l’amuse ; ne vous en offusquez pas, ce serait idiot, pas bien malin, ce n’est qu’un songe, un être imaginaire, un passant, que vous croisez. Oui, les mots en ajoutent et se rallongent, les faux-fuyants et les mensonges accentuent la rançon de sa gloire encore inconnue. Il flirte avec une femme au cœur méprisable, on a mis la beauté à sa table et il tente un régal, la serviette autour du cou. Chut ! n’ébruitez pas tout… Aujourd’hui, il a vu l’aurore surgir des images oniriques d’un vieux film muet, et cela l’a réjoui. C’est alors, estimant s’être instruit de l’ancien bien plus qu’il n’en faut, il éprouva un désir de doux homme, à moins que ce ne soit qu’un doux somme ? Mais qu’importe, laissez-le expérimenter ce rêve abandonné au mois de juillet sur la plage arrière d’une auto négligemment garée et que par la vitre cassée, il s’en est échappé pour s’évader dans les bras d’un sommeil mal barré… (quel drôle d’embarrassement ?)

Metaphora. « Ta métaphore est ta physique ! » Lui hurle, un idolâtre, un sophiste de plus à son chapelet d’aubaines creuses et incertaines. Cette fois, cela le saoule. On veut profiter de lui, il provoque la risée de tous, son tourment. Des gens ont lâché des fadaises que l’on ébruite trop à son goût. Sa voix déchire les âmes les plus douteuses, on a brisé sa mélancolie, il enrage ! Vous parliez des peines et des désastres, lui n’abordait que le cœur de son envie et le rêve qui allait avec. Il n’a pas osé monter sur le pont de ce navire en perdition, pour être ce brave capitaine sauveur de vies, qui avec affliction, pour la frime, porte galons et veste d’apparat. C’est un modeste ! « J’ai su toute de suite ce que deviendra ma délivrance et je n’ai cherché qu’à l’atteindre ! » disait-il au témoin de son drame, car il y en avait bien un, en somme, cette petite dérive de l’inconnu, cette peur des découvertes, des déconvenues. Sauter d’un train à l’arrêt n’est pas bien difficile. C’est quand il avance, à vive allure, que cela pose un problème de survivance à celui qui se jette au-dehors, avec l’idée peut-être, d’un éventuel suicide ou d’une évasion impromptue du sort ? Mais pourquoi donc se laisser tomber, alors qu’il suffit de s’envoler ? C’est tout de même effarant de ne pas y avoir songé plus tôt ; c’est comme perdre l’équilibre sur la rambarde du pont, idiote situation. Écarte donc les bras, tu es un « oiseau », même si ton vol ne dure qu’un instant de raison, « La délivrance des airs devient d’une ivresse incommensurable », pense-t-il avec l’amusement d’une enfance retrouvée… Si vous interrogez sa mémoire, il vous récitera sûrement toutes les histoires qu’il a engrangées ; la magnifique aventure des vastes plaines, un de ces goby, monde aride fait de cailloux et de sable ; ou la douce pente au bleu profond de cette immense vague, finissant en déchirure, sur la falaise du rire idiot de ce mercenaire abruti par les massacres des vies qu’il a monnayés, l’autre nuit ; des aubes assassines autour de lui… Il vous en dirait tant et tant, sa parlotte est l’esclave servile de son imaginaire. Mais rien ne vaut le souffle du vent dans le vide aérien d’un vol plané interminable, glissant paisiblement, avec insouciance, voyez-vous… rien ! Ne lui parlez pas des dimanches où, retiré de tous, ayant acquis les plus profonds rêves qu’un être puisse atteindre, il dort pour se reposer des hommes. Il s’engorge des délires divins que sa mémoire vous délivrera probablement plus tard, un soir illuné et magique du beau mois de mai, comme une bonne fortune, sous la printanière feuillaison des arbres du jardin, tous assis, l’écoutant vous raconter cet éternel recommencement ; à chaque fois repris et augmenté par des savoirs accumulés de siècle en siècle, ce qu’on appelle « la légende éternelle ». Et pourtant, İl vous dira : « je me sens vide ! », sa carcasse demeure absente, il n’est rien, cela n’a pas de sens. Il est traversé de toutes parts, de tous les mots du monde qu’il lui faut rassembler et disperser encore, dans un ordre nouveau ; le devoir de conter d’irrémédiables odyssées devient son fardeau. Il rumine mille fois une thèse peu ordinaire, faite de tracas et de chambardements, du terrible au meilleur, avec au milieu des récits incertains. Il se voit, surgissant de nulle part, enfourcher « un songe bleu », comme le doux rêve de ces amoureux qui l’ont attendri un jour qu’il somnolait auprès d’eux ; ou encore, après un long voyage, découvrir une vastitude faite de landes au bord d’un fleuve ténébreux. C’est un jongleur, un illusionniste ; mais ne le lui dites pas, il s’évaporerait aussitôt comme ces oiseaux, ayant perdu le nord au vol alerte et court ; par petits bonds… hop ! hop ! Hop !

songe, cauchemar,
chimère, fantasme,
soyez indulgent !