(version finalisée de sept. 2017, mise à jour)

au génie fou

—> synthèse corrigée et augmentée des récits précédents du 21 juin, 6, 7, 27 sept. 2016

Effectivement, le savant fou professait dans un univers cité nulle part et l’on ignorait de prime abord d’où il put venir ni quoi vraiment il avait à y enseigner ; peut-être, cette grande divagation des approximations contenait tout ce qu’il faut pour lui plaire et l’attirer ; c’est même à cause de cette originalité à s’affirmer de nulle part, voguant dans un monde tout aussi hagard qu’Ipanadrega (le « il » du premièrement) choisit cet univers non cité justement, pour y terminer oui, ses études ; il désire les marquer d’un sceau singulier à rappeler au hasard de sa thèse, s’il en arrivait à l’exprimer un jour ou qu’il put la finir enfin, ce serait un heureux jour à ses yeux valeureux.

Toutefois, ajoutons pour les moroses que l’on savait très bien en quoi consistait l’enseignement du vieux professeur, on a voulu tester votre attention pour voir si vous suiviez ; tout a déjà été dit précisément précédemment : on y décortique bien ces vastes divagations trouvées dans les approximations hasardeuses, venues de nulle part, la grande spécialité de cet univers cité là ; et plus particulièrement au sein de la nature y sont étudiés les plus profonds de ces déterminismes ; par exemple, éclaircir la raison de notre présence ici, nos gestes, nos détestations ; élucider les motivations sous-jacentes de notre esprit, qui semble un peu (beaucoup) malade, ou qui s’égare ; ou encore, quel pari aventureux concocte la vie, est-ce une idée de la matière ?

Si vous n’y avez rien compris à ce qui vient d’être dit, lisez donc la suite, nul ne vous interdit de vous y instruire dans cet univers cité nulle part, c’est facile et sans frais ! Ici, İl s’efface provisoirement et laisse à l’auteur le soin de décrire ce qu’il a acquis, des savoirs des plus divers, sur cette planète, puis autour de soi, la nature prégnante comme une idylle offerte à bien plus que des lois. Il devient cet étudiant arrivant du bout du monde, assis enfin sur les bancs, pour le regarder gesticuler et l’écouter, le vieil homme, donner son cours, de sa science exprimée là ; sous des airs ballots, il radote certes un peu ses fredaines d’une manière assez docte et tout est raconté tout haut ; alors, dans son art si particulier d’enseigner tout un pan de ses connaissances, on lui attribua à cause de cela le titre de « savant » au génie outrepassé ; certains le prétendent d’une originalité quelque peu dérangée, parce qu’il n’agit ni ne parle comme la plupart d’entre nous. Mais vous qui dénigrez tout, qu’attendez-vous de l’aubaine, resteriez-vous à l’étude tout le jour pour le voir dans son discours, histoire d’en rire après coup ? Susciteriez-vous ce qui l’arrange, vous entendre lui répondre : « et puis c’est tout ? » Où se situe le terrain tout mou de votre mépris ? On doit apprendre, même d’un fou !

Alors viens écouter ce vieux professeur t’enseigner une parcelle de son savoir ! il va t’emmener là où tu ne peux pas anticiper ce qu’il dira, tu y comprendras des sortes de monde. Oh ! vous pourriez le trouver rédhibitoire ; traitez-le de « génie fou », c’est l’usage et il ne s’en émeut guère, il explore déjà d’autres âges ; vous pouvez tourner la page…

Le vieux professeur raconte à qui veut bien l’entendre, il y a bien longtemps, il fut le promoteur d’un travail sur la haine et la violence. Il disait avoir compris qu’elles demeuraient avant tout, la manifestation de réflexes premiers du vivant, comme l’instinct de survie, l’autodéfense est parfois associée à une attitude « politique » de domination, tout aussi primitive. Dans tous les cas, cela relevait d’un archaïsme d’adaptation, qui très vite va la corrompre, quand l’espèce se transforme ou mute. Pour lui, cette dégradation peut apporter une incapacité à progresser harmonieusement avec son milieu, et cela d’autant plus lorsque l’évolution matérielle de l’être s’avère hâtive, nous en sommes l’exemple le plus flagrant ; il montre à l’observateur une déficience « affective » notable, liée en grande partie à l’éducation et la dégénérescence d’une perception du monde, entraperçue sous un angle agressif, possessif et rétrograde. Il étudia assidûment toutes ces choses et effectua des recherches pour apprendre à l’amoindrir dans les pensées et les actes ; on éprouvait toujours comme une certaine lassitude dans sa voix, quand il s’exprimait sur cela.

Il en concluait qu’en tous les cas, des solutions radicales s’imposeraient ; une partie ne s’avérera possible que par l’émergence d’hommes de bonne volonté ; l’autre part, peut-être la plus imprévisible, sera apportée par la nature et les forces terrestres (elles peuvent conduire à l’extinction rapide de notre lignée évolutive). En ce qui concerne les options que nous prendrons, il en résulterait une réduction des libertés du corps (la prison), si l’on en venait à la restreindre sans modifier le fonctionnement du cerveau et apaiser toute haine latente ; malgré tout, il admettait que certains êtres à l’encéphale très dégradé ne pouvaient être soignés (cas des fanatiques) ; par conséquent ne restaient que peu de solutions, l’enfermement systématique ou l’élimination ; c’était plutôt au départ, à la naissance de l’individu, et ensuite pendant les apprentissages que s’opère le modelage de son équilibre ; par exemple, comparer deux enfants : l’un, vous l’éduquez avec froideur et âpreté, l’autre avec amour et bienveillance, que deviendra leur avenir respectif ? Inutile d’élaborer une thèse ni de longs discours ni de réaliser un dessin, l’un sera prédisposé à la violence ou tuera, très certainement, le second n’éprouvera guère ce sentiment, ou détiendra un discernement que ne possédera pas le premier ; il aura de plus des facilités pour se contrôler, à cause d’un cerveau plus épanoui.

avant les cours

Dans l’attente de la leçon, les étudiants se prélassaient sur les bancs de la cour ; puis on chuchotait dès son arrivée, le professeur était habillé bien court ; puis auprès de la porte d’entrée, un malappris, écrasa inutilement un cloporte qui passait là, le long du mur, ce qui fit pester le génial homme (le vieux singe qu’il était), témoin de la scène ; derrière lui, vous entendez des murmures, il vient de se produire une chose obscène et les plus anciens savent par instinct que cela ne restera pas sans un châtiment bien lancé, à l’attention du meurtrier. Le cours pourrait devenir très animé ; déjà, on pronostique des paris sur la punition octroyée, une pelote de papier balancée, un verre mal rincé à boire, une corvée qui rend mal à l’aise ou réparer la tanière d’une vipère…

les cours du savant fou

Au début de chaque année, quand les étudiants assistaient au premier cours du vieil homme, ce dernier avait pris pour habitude de tester leur ouverture d’esprit à travers un court exposé sur le salut ; vous savez bien ce banal salut coutumier, celui que chacun exprime dans un geste ou avec la voix… Il commençait invariablement de cette façon : entrait dans la salle, se plaçait devant eux et avec un large sourire disait « bonjour les enfants ! », puis attendait un peu, si tous à peu près, lui renvoyèrent son bonjour, il semblait satisfait et continuait sa leçon. Mais cela ne se produisait pas toujours ainsi et quelques fois, après sa politesse de présentation il n’entendait aucune réponse de leur part, aucun retour à son expression de bienvenue. C’est alors qu’il concoctait dans une petite mise en scène plus ou moins humoristique afin de leur expliquer en quoi consistait un bonjour d’accueil ! S’il ne recevait aucune réplique, après une courte attente, il sortait de la salle en refermant la porte, patientait quelques secondes, rentrait de nouveau et reformulait son salut jusqu’à susciter une réaction de leur côté… Ceci autant de fois que nécessaire ! Après il entamait une discussion sur le sujet, mettant en perspective ce cérémoniel et tentant d’en dépeindre sa fonction sociale.

› La valeur première du salut reste d’abord une attitude d’apaisement, un rituel qui dit « je viens à toi et je te reconnais (symboliquement) comme mon semblable, mon égal » ; oui, c’est cela, c’est avant tout un geste de décrispation envers l’autre, il permet d’engager un dialogue autant que possible détendu et sans pression, suspicion, doute, intrigue ; ces aspects-là en sont d’autant plus réduits quand le bonjour d’accueil se réalise avec un large sourire réciproque (même si parfois il se cache une hypocrisie, une arrière-pensée, un calcul à travers lui).

› Comparez les saluts : en ville, dans les transports publics, dans la rue, vous trouverez trop de monde à saluer, cela deviendrait trop répétitif, vous ne l’exprimerez que si vous vous adressez à quelqu’un en particulier, évidemment ; dans ce dernier cas, ne pas saluer, sera donc vécu comme une absence d’égards envers l’autre… Dans les pays du sud, par exemple, si vous roulez dans un véhicule sur une piste ou un chemin de brousse, un coup de klaxon à chaque croisement ou dépassement d’un piéton correspond à une politesse, un bonjour ; si vous ne l’avertissez pas, il vous réprimandera très certainement ! Nous ne manquerons pas d’exprimer cet aspect dans nos futures explorations du vivant…

« je dirais du moucheron » (version corrigée)

—> (inclus les récits du 11, 16 avril et 4 mai 2016)

Le vieux professeur devant la table du prétoire commence son cours et dit :
› Nous allons parler aujourd’hui du moucheron, je voudrais dire de ce petit diptère, cet être…

Il prend une tapette, ouvre une boîte, laisse s’envoler quelques bestioles imaginaires, semble-t-il, on ne voit rien de toute façon.
› Que nous domestiquons ainsi, aussi dérangeant qu’il puisse être !

Et en brandissant l’ustensile, ajoute,
› je parlerai donc du moucheron avec qui nous dialoguons de la sorte…

Il élève et abat la tapette sur les hypothétiques insectes en frappant sur la table à plusieurs reprises, ce qui provoqua des rires dans l’assemblée ; cette attitude ironique, certes, peut surprendre,
› les moucherons comme le Phlébotome, la Simulie ou la Psychoda, de petites bestioles insignifiantes et qui nous embêtent dans toutes leurs manières ; ces êtres sans prétention représentent pour nous plutôt un agacement que l’opportunité de les découvrir ou de les comprendre, ces minuscules animaux ; nous les ignorons, nous n’en voulons guère et pourtant ils possèdent sur nous une créance certaine, car celui-ci est apparu des centaines de millions d’années avant nous, il fait partie de ces hôtes que je décrirais comme des êtres de « prélude » ; disons-le ainsi : quand nos ancêtres très très lointains émergeaient sous une souche commune appelée « eucaryote », où une branche progressivement s’est divisée et a formé des structures analogues à la nôtre d’un côté et de l’autre, tout ce qui s’apparente au moucheron, les insectes !

Il tape encore une fois sur la table,
› ajoutons encore, sur ces infimes petits insectes qui se nourrissent comme la Mouche banale (Musca domestica) par exemple, des pourritures du vivant, ils existaient là, bien avant les hommes ; ils les agacent en virevoltant tout autour d’eux et les lassent, sur les sueurs, aux premières chaleurs, ils s’ingénient à proliférer auprès des moisissures du temps qui passe ; ces minuscules choses apparemment futiles nous renseignent sur la luxuriance des lieux, sa folle activité, qu’aucun d’entre nous ne peut appréhender ni complètement ni tout à fait.
› Multitudes tourbillonnantes, des mondes trop infimes aux yeux des plus gros, malgré cela, tout insignifiants qu’ils sont, ils donnent au règne du vivant son incroyable diversité, et l’insolente nécessité de leur présence permet aux espèces les plus récentes dont fait partie le genre humain d’être et de subsister. Que deviendrions-nous sans ces êtres dérisoires ? Rien ! Nous n’existerions pas, la nature nous a prévenus, « pas touche à cela ! », ces êtres « préalables », les Procaryotes (microbes, bactéries, archées), les Micromycètes et puis tant d’autres, toutes les petites entités qui apparaissent à l’origine de la naissance de tous nos ancêtres… Ils forment avant tout l’essentiel de la masse biologique terrestre (réf.) ; les mammifères, même s’ils demeurent les plus voyants, en occupent un volume tout à fait ridicule à côté.

(Sur l’écran accroché au mur derrière lui, il fait défiler des images de ces êtres infimes, dans un silence attentif.)

› Souviens-toi quand tu éliminas ce Cloporte (il montre du doigt le coupable), un « Armadillidium vulgare » dans la fleur de l’âge ; avec ta chaussure, tu écrasas plus de quatre cents millions d’années d’évolution persistante, un animal antédiluvien qui te surveillait, toi, le jeune humanoïde de ce lieu ; je veux bien laisser mon imaginaire supposer qu’à côté de ses occupations régulières, celles de traquer la vermine, il guettait, impassible, tes moindres soubresauts, afin de vérifier si ta fraîcheur adolescente progresse vers un possible mieux qui ne vient toujours pas ; tu l’élimines, inconscient que tu es, ce descendant direct des premières existences *, il auscultait le mur de ta cabane, la tienne ; et tu t’endeuillas d’un crime insignifiant, toi, la progéniture des générations animales récentes qui ont hérité de lui, avec nos ancêtres communs.

(Il se tait soudain et lance un coup d’œil accusateur vers cet étudiant qui ne savait visiblement plus où se mettre en souriant niaisement dans le murmure amusé de ses camarades.)
› Toutes ces créatures préalables du vivant ont préparé ton habitat, pour que toi, humanoïde inconscient du reste du monde, si imbu de ta personne, tu puisses naître ; elles te regardent et t’observent ; elles se laissent détruire par toi, pour voir jusqu’où tu iras, toi qui crois être le maître de ces lieux ; mais, c’est un leurre enfin, une illusion, un fait exprès, afin que tu te mettes à l’ouvrage, celui du transport de la vie (et donc de toi aussi) en dehors de la terre nourricière, vaste sujet que j’aborderai une autre fois (il tousse et reprend). Tes soubresauts pubères, démontrent que ton mécanisme bafouille quelque peu, il a des ratés, des façons emberlificotées qui désagrègent le monde de manière inappropriée. C’est ce qu’ils se disent dans leur jargon, leurs messes basses, oh ! tu ne les entends pas vraiment ; pétri de ta personne, un ego démesuré caparaçonne et masque à ton discernement bien des éveils ; auraient-ils engendré un être dégénéré, perpétué autant d’imbécillité ? Tout cela, si ça se trouve, pourrait bien les amener à s’interroger sur ton avenir et l’on pense sûrement déjà à ces nouveaux êtres qui pourraient bien te remplacer ; l’inconscience crasse de ta sottise s’en aperçoit-elle ?

(L’expression fait rire la salle)

› De toute façon, la vie n’est pas pressée ; elle tâtonne et expérimente des processus à travers les progénitures de son invention, pour lui permettre (c’est mon intuition) d’encore plus se répandre par-delà les limites de la terre et conquérir les espaces cosmiques pour quitter ce monde que tu rends délétère à force, toi le petit être à deux pattes finalement très stupide, plus bête que ces bêtes que tu appelles « bêtes » ; ta vaniteuse prétention de dénigrer la différence de l’autre.

À l’adresse du savant fou, un étudiant dans la salle lève la main et lui pose une question :
› Monsieur !
› Oui ?
› Mais si je comprends bien ce que vous dites, nous avons une attitude idiote !
› Il se peut, c’est fort probable, c’est même certain… Enfin pour clore mon propos, au sujet de ces êtres, que je baptiserais « préalables », des êtres préliminaires, comme mon moucheron, qui, pour exister, n’a pas besoin de l’homme, mais qu’au contraire ce dernier ne peut subsister que grâce à ces progénitures préparatoires du vivant dont fait partie justement la Simulie, par exemple.

(Pendant son discours, défilent derrière lui sur l’écran, les images : d’une forêt tropicale décimée ; des épandages de pesticides ; des expérimentations de semences en laboratoire ; des vues au microscope d’un sol mort et asphyxié par une culture intensive comparée à un autre plein de vie, fourmillant de micro-organismes et de vers de terre ; décris dans tous les océans, la présence d’immenses zones imprégnées de détritus, constitués surtout d’une myriade de petits fragments de plastiques, on voit un bateau en remonter une quantité impressionnante ; etc., etc.)

› S’il élimine définitivement toutes ces espèces de diptères entre autres, à la taille insignifiante, il se détruit lui-même, indirectement. Tous ces petits êtres infimes, microbes ou bactéries, si certains semblent funestes et provoquent des maladies, la plupart demeurent essentiels à l’essor de tous, aux formes d’existences les plus apparentes, les plus grandes ; tout comme les dernières souches les plus dépendantes de l’évolution du vivant, mais en raison de leur aspect imposant n’en restent pas les plus prégnantes ni les plus irremplaçables, la prépondérance subsiste bien dans tous ces êtres que l’on dit donc préalables. Par conséquent, le moucheron est partie prenante de ces êtres « préparatoires » à la survie de l’homme, ils lui deviennent indispensables ; alors que choisir : des moucherons qui virevoltent autour de vous et vous agacent ou le chaos de leurs disparitions ? Car, sans ces diptères et tous ses congénères, ajoutez-y les abeilles, microbes, vers de terre, etc., je vous le répète et insiste, nous n’aurions pu exister ; comme pour la plupart des mammifères d’ailleurs, toutes les grosses espèces les plus importantes ne peuvent subsister que par la présence de ces « êtres infimes » installés avant eux, qui leur ont aménagé le terrain en quelque sorte ; voilà la chose essentielle, chers enfants, veuillez bien réfléchir à ce que je viens de vous dire, prenez conscience de cette réalité.

› Réside dans votre intestin une multitude de bactéries, d’archées (elles sont cent fois plus nombreuses que les cellules vivantes vous constituant (réf.)) ; elles furent inventées bien avant que l’homme apparaisse, elles se trouvent là pour donner à notre structure les moyens de survivre et surtout de digérer notre nourriture ; sans ces petits êtres, la grosse bête de chair et de sang que nous sommes n’existerait pas ; nous restons un assemblage qui émerge de tout cela, un montage animé qui dépend d’une infinité de minuscules entités plus ou moins visibles, et toutefois très présentes, elles nous permettent de subsister, elles jouent un rôle préalable, préliminaire à notre destinée, à notre être…

* (Petite parenthèse de rien du tout, mais qui en dit long : cet arthropode, ce cloporte écrasé et laissé là, au bord de cette porte, qui au bout de quelques jours se décomposera en cendre, absorbée par la vermine, histoire de retourner à la terre nourricière, pour s’y ajouter d’une couche primordiale ; petit message répété inlassablement depuis la nuit des temps, sa trace sourit, elle attend… à quand, notre tour aussi.)

« le vivant »

› Le vivant a ceci de particulier, quand son biotope est perturbé ou devient inadéquat, certains auront plus de mal que d’autres à s’adapter aux nouvelles conditions imposées par son environnement. Il lui faudra, de la chance et une sérieuse capacité d’acclimatation, cela n’est pas réparti également entre tous les individus ou entre toutes les espèces ; l’aléatoire demeure dans ces cas, un facteur prépondérant dans le sort de chacun des êtres, aucune règle immuable ne peut être affirmée avec certitude, tant les paramètres restent multiples. Le hasard peut parfois favoriser les choses ou provoquer des désastres ; l’évolution, l’expansion humaine appartient à une de ces opportunités, qui pourront tout aussi bien dans un avenir plus ou moins proche, entraîner, si les conditions le permettent, une dévastation de celle-ci. La nature, quand on lit son histoire à travers les traces laissées, nous montre qu’aucune entité vivante ne se trouve à l’abri d’un mouvement d’humeur des forces telluriques, telles que les éruptions volcaniques, les tremblements de terre, les ouragans, les tsunamis et j’en passe. L’apparente réussite de notre espèce s’avéra possible, véritablement, grâce à des hasards heureux qui coïncidaient avec des circonstances climatiques optimums, et qui ont favorisé notre répartition. Mais à l’échelle de la planète, l’âge de notre lignée demeure bien jeune, elle n’a pas subi ou surmonté encore de grands désastres, comme ceux qui préludèrent à l’extinction des dinosaures, voire plus près de nous, des Néandertaliens, nos proches cousins ; d’après ce que nous savons, ils auraient en grande partie disparu à cause de phénomènes probablement concomitants non vraiment élucidés aujourd’hui, mais contemporains avec notre arrivée dans les aires de leur habitat.

› Le vivant représente avant tout une symbiose, la pérennisation des êtres les plus récents n’étant rendue possible que par l’antériorité d’entités préliminaires. Notre espèce se montre donc très dépendante, son avenir est étroitement régi par la présence de ces êtres premiers et seulement si ceux-ci ne sont pas menacés. Notre vie propre y est intimement liée, nous devons tous prendre conscience de cela, notre survie en découle. Cette révolution de l’esprit, s’avère fondamentale, en complément s’ajoute la nécessaire compréhension du « partage » d’un bien commun, « la terre », et de la distribution de ce bien entre tous, nous et les autres nous faisons tous partie d’un même processus existentiel. Cela implique une acceptation de son principe essentiel, sa diversification, son hybridation permanente entre tous les êtres, quels qu’ils soient, par la force et le hasard des choses, bien heureux ou malheureux, laissé au seul choix des désirs aléatoires de la nature ; puis, que l’homme inclus en son dedans admette enfin ou s’y soumette, sous peine de périr, s’il continue à toujours en tout, à vouloir être le maître ; ce consentement nous apportera probablement le meilleur des éveils !

› Vous pourriez l’étudier, cela, tiens ? Avez-vous déjà constaté que le vivant s’entre-mange perpétuellement, que l’un soit régulièrement absorbé à un moment quelconque par une ou plusieurs autres entités existentielles, et vous ne pourrez rien y changer, c’est inexorable ?

› Et, dans ces ingurgitations réciproques, rien ne nous montre clairement si celui qui déguste une vie (une salade par exemple), sa machinerie interne ne cherchera pas à décrypter le code génétique de celui qui est avalé, ceci afin de le comparer, ce code, avec le sien propre, et de voir si par hasard il n’y aurait pas quelques fragments à récupérer avant les rejets inévitables des surplus digestifs, en plus des nutriments essentiels à tous ; pourquoi n’irions-nous pas déchiffrer le petit stock chromosomique de celui qu’on absorbe, pour vérifier ce qui nous dissocie, puis enfin, par le derrière, éjecter ce que l’on ne garde pas ni pour l’aliment ni pour l’entendement ; ce morceau de programmation héréditaire, contenant des informations communes à tout être qui te disent indirectement : ceci, tu le mangeras ; ceci, tu ne le mangeras pas ; ceci est bon pour toi ; ceci est mauvais pour toi ; ceci n’a pas d’intérêt pour toi…

› Mais voilà ! La lecture de ce code ne se réalise pas consciemment, cela fait partie de la mécanique interne (secrète) qui régit les battements de notre cœur et le fonctionnement de nos viscères ; tout cela s’exécute à notre insu, une sorte de masque invisible sur toutes sortes d’énigmes que l’on découvre à peine et dont le cryptage génétique semble devenir l’instrument suprême de toutes nos dérives, de toutes nos manières ; interroge sans cesse notre subconscient et programme régulièrement ce dernier pour des fins encore non avouables. Mais d’où vient-il ce besoin de chercher à les comprendre, ce désir d’analyser le mystère de ton existence, à vouloir tant t’expliquer ce qui te meut, toi le petit être à deux pattes qui se trouve très doué ? Peut-être aussi en oubliant que l’intelligence est distribuée à toute vie, c’est ce qui l’anime ; c’est un processus du déplacement, la quête d’une information sans cesse espérée, sans cesse convoitée, absorbée et sans cesse laissée par ici ou par là, afin que d’autres, semblables ou non, les récupèrent et prennent les devants, processus interminable se perpétuant depuis le début de notre temps des vivants…

« théorie »

« Quand nous aurons compris, nous, homo sapiens, que nos accaparements incessants se perpétuent au détriment des autres êtres, cela, va fatalement, indirectement, finir par nous nuire, parce que tout dépend de tout et que tout est imbriqué. »

› Voici ma théorie : depuis longtemps, la vie, insidieusement nous incite à être son jardinier, elle nous a conçus et nous expérimente à cette fin ; j’en suis profondément persuadé ! Vous croyez d’abord que tous les mécanismes d’acquisitions ne viennent que de nous, non ! Transmis à travers une programmation génétique, un b.a.-ba organique, aléatoire et prémédité ? Oui ! Puisque cela s’est trouvé ainsi argumenté, un jour de hasard, à un moment lyrique de la nature, voilà, c’est ça, oui ! Et en cela, elle persiste dans un long poème qui n’est pas terminé, bien avant que nous apparaissions, elle a réalisé et inventé une sorte de versification rythmique du monde animé ; elle a insufflé en nous la plus étrange chose qui soit, l’inspiration… Perception indescriptible sans laquelle nul ne pourrait écrire d’histoire, d’opéra ni élaborer des romans, ou d’une sensation, en composer une musique, développer un geste de danse, ou peindre sans détour une impression de soleil levant ;

« cet art demeure une création du vivant et l’homme n’en est pas l’unique propriétaire, il n’en est qu’une de ses plumes, sans plus. »

› Certes, l’éveil correspond à un long apprentissage, celui de nos erreurs et du reste ; puis lorsque nous les aurons assimilés, saurons-nous saisir l’opportunité du meilleur des choix, prendre celui-là, tout indiqué pour survivre et acquérir cette notion du partage ?

› Ici, on élimine le loup, car il gêne les bergers, mais ne devraient-ils pas justement apprendre à cohabiter avec lui comme cela se fait ailleurs, « dans une collaboration instinctive intelligente », ce carnassier a autant le droit de vivre que nous ; alors, quand ils pourront oppresser leurs proies de manière tout aussi volontaire que nous-mêmes, cette coexistence en sera plus apaisée. Ici, un berger s’est fait agresser, mais du côté des loups, ils se racontent des choses identiques, que les hommes ne cessent de les décimer ! Est-ce leur faute à eux, si la nature leur a donné des crocs pour tuer moutons, volailles et chèvres ; elle a toutes les raisons de s’occuper à régénérer en permanence les équilibres de son règne ; qu’un être, plus que les autres, s’adonne à tant vouloir dominer, qui pourrait bien s’en amuser ? Elle détient sûrement quelques leçons de vie à nous insuffler, comme cette conscience acquise du monde, qui nous renvoie comme un miroir, nos attitudes de bête à deux pattes et qui se croit, se voit, ambitionne l’émergence de sa race, au détriment d’autrui ; elle va corriger le petit scélérat, d’une manière abrupte et qui va lui déplaire, c’est certain. Avons-nous les moyens de dicter à la nature les choix de son aventure ? Soyons modestes et humbles sur ce coup-ci !

« appartenance »

« Vous ne trouverez nulle part l’information originelle d’une quelconque décision sur l’appartenance des terres ; qui estima qu’elles nous soient prédestinées en priorité ; vous n’y rencontrerez que des accaparements, puisqu’elles sont offertes sans discernement aucun, seulement vous croiserez des hommes qui se les approprient sans concessions ; cette usurpation s’ajoute à tous les crimes dont ils s’avèrent capables ; cet égoïsme de jeunesse montre combien nous restons ignorants ; quant à l’éveil, s’il émerge un jour, apportera-t-il ce qu’on appelle “le partage” ? »

› Et vous croyez que la planète demeure votre propriété ? Elle ne peut constituer votre unique « possession » puisqu’elle vous a créé, vous êtes un de ses fruits ; le monde nous est offert à la vue, à nos sens ; ou plutôt, renversons le principe, il nous englobe tous, et laisse à notre disposition son air, son eau, son sable, pas plus à l’un qu’à l’autre, il ne statue sur rien ; il reste à la disponibilité de tous par la force des lois naturelles, sans plus de règle. Que m’importe de le voir ainsi réglementé et partagé entre vous ; une chose vous est acquise, la durée de votre vie, parce que « vous avez décidé » de vous l’approprier, ou que des conventions établies exclusivement « entre hommes » vous les octroyèrent (je sens votre sens de la propriété quelque peu perturbé par ces allégations, vous vous y habituerez…). Après le processus d’accaparement terminé, cette idée se dissipe, ou alors ce sont des descendances éventuelles qui reprennent cette conquête à leur compte, mais cela n’a pas vraiment de signification ; d’ailleurs, ces partages sont fondés sur la raison du plus fort, du plus puissant, bien trop souvent ; vous croyez que le monde vous appartient ? Mais vous divaguez ! vous vous trompez amèrement, cela ne veut rien dire, c’est un leurre, une vue de l’esprit, une notion de conviction forte envers ce désir de posséder, cette terre offerte ne peut s’appréhender ainsi, vous restez en son dedans (réf.), vous ne venez pas de l’extérieur ; et qu’alors, même si vous arriviez d’une planète différente, oseriez-vous décider que celle-ci, du fait que personne ne vous la conteste, devienne votre acquisition ? Ce n’est pas le cas, vous subsistez à l’intérieur d’un monde et vous n’en détenez pas les clés ni ne pouvez en réclamer la propriété, car cela ne relève d’aucune réalité sinon des arrangements bien commodes entre hommes, pour éviter toutes chamailleries oublieuses des autres vies. Vous demeurez dans un lieu où vous devez collaborer avec autrui (avec tous ceux qui n’ont pas l’apparence humaine), où vous devez apprendre à partager ; comme le berger doit aussi apprendre à vivre avec le loup, en éduquant ses chiens de garde, en pratiquant correctement son métier, comme cela s’est fait depuis des milliers d’années et pour ne pas le tuer inutilement ; la terre « appartient » autant à lui qu’à nous, ou au renard qu’à la poule, non moins à la fourmi qu’aux cloportes, pareillement pour l’oiseau et la carpe ; le territoire que vous délimitez ne demeure que temporaire, abstrait, momentané, incertain, en concurrence avec d’autres, et cela toujours régulièrement tant que vous le concevrez à travers l’idée du combat, de l’affrontement et de l’acquisition, à travers des victoires, des renoncements de l’autre ; non, vous vous égarez ! vous vous trompez ! Qu’avez-vous donc à prouver sinon votre égoïsme forcené, il faudra bien vivre un jour, avec cette nouvelle capacité que vous devrez atteindre, à évoluer de cette notion de l’appartenance ? Je vais bientôt disparaître pour ne plus exister, ma coucherie reste provisoire et je ne demande qu’un confort minimum ; celui qui me croise avec sa grosse voiture, aux broums broums audacieux, la queue à l’air (des rires dans la salle), en me montrant son contentement, ses vastes possessions, son capital, sa femme, son chien chien, son yacht interminable ; et plein d’autres trucs qui « en jettent ! » ; avec cette vanité qui se croit supérieure, que veut-il me prouver ? Qu’il rupine d’aise ? Cela m’indiffère au plus haut point. Ces gens demeurent des égarés ; d’ailleurs, la plupart d’entre nous se sont fourvoyés dans ces illusions venues du passé, ces gloires et ces conquêtes, des notions devenues arriérées, qu’un jour vous devrez tempérer, casser, détruire, pour reconstruire les choses dans une conception moins égoïste.

« la nature ne cesse de nous dire… »

› Si la nature s’apparentait à une seule entité identifiable, ce dont nous doutons, elle pourrait nous interpeller ainsi : « observe-moi, instruis-toi de moi, regarde comment j’ai fait ; quelle solution ai-je embrassée, quelle formule empirique ai-je adoptée au fil du temps, qu’ai-je abandonné, qu’ai-je réussi, qu’ai-je entrepris, apprends de moi, copie mes choix heureux, oublie ceux qui devinrent malheureux ; et comme tu sembles vouloir t’affranchir de moi, sache que tu héritas de mes répliques, ces petits bouts de moi, oui, tu en fais partie, tu ne te situes pas en dehors, tu résides en mon dedans, alors n’hésite pas à m’imiter ; ne fais que reproduire, je me charge du reste, puisque je t’ai créé. Tente de dépasser ce que j’ai réalisé, si tu le peux, ou que tu t’en sens capable, mais comprends-le, quoi que tu accomplisses, tu seras toujours, de moi, une des branches ; oui, je me suis immiscé en toi depuis ton commencement, depuis que je t’ai conçu, et cela à ton insu, n’en prends pas ombrage ; oh ! et puis, tu n’y peux rien opposer de toute façon, je m’occupe de perpétuer la suite, tant que cette terre nous supporte… »

› Au début, à tes origines, « homo sapiens », le sais-tu ? On me l’a dit, tu apparaissais là, « noir » sous le soleil éclatant d’un même continent, cela est inscrit dans tes gènes ; des hommes de science les ont lus, nous le confirment : « c’est ainsi que ce fut », au commencement, ces temps révolus des grandes migrations (réf.) ; ils en possèdent les preuves, ne cessent de les accumuler dans des annuaires, inventoriés avec l’aide de ces machines qui comptent les très nombreuses empreintes de nos anciens, jusqu’aux plus ancestraux. Vois, écoute, instruis-toi des nouvelles de ce monde ! Je sais, ce qui te gêne, dans tout cela, ce sont les « gènes » ; ils gardent la trace de tes pas, du plus lointain dont on se souvienne… Oui, nous venons tous d’un même endroit.

« dans l’esprit de la race pure »

› J’entends toujours la même rengaine de ces êtres maladifs, ayant à l’esprit cette notion de « la race pure », ils veulent façonner la nature et la considèrent comme une entité à normaliser, canaliser, homogénéiser, ils choisissent un risque fou ! D’ailleurs, ils sont fous ! Elle apparaît à celui qui sait voir, comme un mécanisme au fonctionnement relativement anarchique, mais il s’agirait plutôt d’un désordre qui ne cesse de s’organiser, laissant à chaque être l’opportunité d’une exploration, d’une déviation, comme la nôtre ; évidemment, au bout du compte, dans le cas d’une dérive qui s’avérerait inappropriée ou déséquilibrante, elle sera tôt ou tard annihilée, nous prenons ce risque et ce n’est pas nos armes (à l’efficacité meurtrière régulièrement plus affinée qu’hier) qui y changeront quoi que ce soit, au contraire, elles achèveront le processus avec notre perte au bout ; l’intelligence ce n’est pas la force ! Ni les gros muscles ! tout cela n’est que destructeur, ne construit rien, ne pérennise aucun avenir ! Alors, elle se fout bien, qu’une de ses entités vivantes veuille la dompter (même si certains hommes croient avoir ce pouvoir, ce n’est qu’une illusion) et qu’en fin de compte c’est bien elle qui aura le dessus, de toute façon, quoi que l’on prétende ; nous n’existons pas en dehors d’elle ni à ses côtés, ce serait plutôt le contraire, nous sommes inclus dans son dedans… je me répète oui ! Mais c’est exprès…

« Chaque vie s’exprime à travers une expérimentation du vivant, laissée là, au hasard des vents et des événements avec comme bagage, en mémoire, toute la génétique de ses antécédents. Cette phrase me vient : “liberté offerte à toi de subsister comme tu l’entends ; ton patrimoine, tes apprentissages, tes actes, qu’ils demeurent beaux ou laids ou incertains, ajoutent comme une source, ton destin, à ce devenir que nous partageons tous, mais au bout du compte, tu devras en assumer les conséquences”. »

› Nous devrons nous y adapter une bonne fois pour toutes, à ce mécanisme naturel ; notre éveil arrivera quand la majorité d’entre nous en aura pris conscience, ce processus auto éducatif ; accepter enfin qu’il se soit immiscé en nous depuis nos débuts (mécanisme probablement élaboré en partie, par l’héritage génétique, commun à tous les vivants ; en quoi devrions-nous nous y soustraire, par une volonté délibérément narcissique, divine ?) ; vouloir changer ces règles à notre propre fin, égoïstement, sera toujours un moment ou un autre, à notre désavantage… De là, à produire la culture d’une plante à partir d’une semence trafiquée et homogénéisée par nos soins, dans tous les cas de figure cela reste un non-sens ; chacune possède depuis ses origines, naturellement, la capacité de s’adapter à son biotope ; à chaque habitat s’impose une graine appropriée au terrain, qui s’y accoutumera instinctivement au fil des années à force de la remettre en terre (processus vieux comme le monde), lui permettant d’acquérir, outre un rendement adéquat, mais surtout une résistance qui peut se passer allègrement des insecticides ou de toute substance similaire. D’ailleurs, ces substances artificielles ont été conçues pour une agriculture dépendante d’une industrie mercantile, elle se moque royalement de la qualité nutritive des végétaux ainsi soi-disant protégés, et elle n’a pas hésité à élaborer à ses propres fins financières, des semences stériles, un comble ! Ce processus économique veut des rémunérations immédiates à courte échéance (ils se dépêchent de conclure leur marché de dupes ; combien de temps va durer cette supercherie ?) ; alors que le vivant si l’on n’y prête attention n’est pas pressé au contraire, il agit sur le long terme et recherche une symbiose (tout un art !). Comment faisaient nos ancêtres avant ces industries manipulatrices ? Chaque organisme sait s’adapter à son milieu, on n’a pas besoin de lui apprendre, juste l’aider… Le monde change continuellement dans une évolution permanente, dans une multitude de croisements, pendant que nous tentons un accomplissement exactement inverse, on tend vers la réalisation d’une « race pure » ; on a pérennisé cela, avec les chiens (reproduisant des animaux formatés tous plus dégénérés les uns que les autres), les chats, maintenant avec les plantes, avec les hommes ; comme exemple, les familles de ces rois qui se perpétuaient entre elles et avaient de sérieux problèmes de consanguinité ; faute de sang neuf, chaque descendance engendrait toujours un monarque plus crétin que le précédent… Ne considérez-vous pas comme étonnant que parmi les plus beaux enfants on trouve régulièrement des métis ? Une race pure devient vite stérile, n’aboutira à rien, ce sont les croisements, les brassages qui procurent la richesse ; l’humanité est vouée à se mélanger éternellement, comme elle a invariablement agi auparavant ; une espèce animale trop chaste reste une hérésie, un non-sens, une dégénérescence, dans le processus même de la vie ; la pérennité arrive avec les métissages, les défauts des uns ou les qualités des autres apportent cette diversité qui permet la meilleure des adaptations. À celui qui saura observer la nature, cette évidence lui sautera aux yeux, encore doit-il les ouvrir !

› Que dire de ces masses ouvrières nées d’une idéologie politique ou financière qui cherche à les conditionner comme des robotes, ou les remplacer plus tard par ces automates ? Quant à ces derniers, qui constituent d’ailleurs une forme d’intelligence momentanément archaïque certes, mais reproduisent tout de même des tâches du vivant, nous devrons aussi les inclure dans cette mécanique ; ces « machines » sont intégrées à leur milieu, le robote « x » n’est pas le robote « y », chacun a une « personnalité » qui nécessite des réglages différents ; si les briques qui les composent leur restent communes, leur usage, leur occupation ne demeurera jamais totalement identique à chaque fois, vous y trouverez des variations ; dans le processus de la vie, vous rencontrerez en permanence cette adaptation au besoin de l’instant ; ce mécanisme en somme instinctif, inné, va dans le sens non pas d’un progrès, mais d’une évolution et du renforcement d’une pérennité, d’une subsistance, d’un avenir par forcement le plus heureux.

« Oui ! au cœur de chaque vie se trame une expérience, que réalise le vivant dans son règne animé, incertain du résultat qu’il manigance. »

› Pour ajouter une suite à mes affirmations, la nature possède-t-elle une conscience, demeure-t-elle juste, équitable ou morale, se pose-t-elle ces questions ? Eh bien oui ! dès lors que nous nous interrogeons nous-mêmes à ce sujet et si je reprends les arguments énoncés plus en avant, le fait même, que ces raisonnements s’immiscent dans notre pensée, contribue inévitablement à un processus de la vie ; puisque nous faisons partie du vivant et que nous y sommes inclus, en son dedans, implique, disais-je, que cette problématique constitue un de ces atermoiements ou une des explorations qui le mènent à assimiler les choses de l’univers ; et par là d’envisager tous les possibles comme cette réflexion que je suis en train de vous exprimer ici, à ce moment précis. Résumons ainsi : tout ce que nous incarnons, savoirs, connaissances, sciences, etc. s’ajoutent au fil de l’existence, nous n’en sommes pas les uniques propriétaires (illusion !), et apportent un héritage commun à tous.

« Reprenons : chaque être génère une expérience, une réalisation incertaine quant au résultat, qui se répète indéfiniment de génération en génération… histoire de voir où cela la mènera ; de plus, nous ignorons si les choix de la vie restent hasardeux ou déterminés ; ou les deux à la fois. »

› En fait, pour trouver son essor elle n’a pas forcément besoin en tout, de l’homme, et dans les voyages d’explorations, de vulgaires machines suffiraient, elles peuvent demeurer plus résistantes (aux rayons cosmiques par exemple) que le métabolisme d’un être biologique et préparer de la sorte ses futurs transports ; nous ne représentons que l’entité qui construisit le robote, l’intelligence élaboratrice que conçut le cheminement du vivant ; nous devions acquérir certaines facultés pour bâtir des automates qui permettent à ce vivant de s’étendre partout où il pourrait et perpétuer ainsi sa colonisation ; en cela, notre pérennité en tant qu’espèce, peut s’avérer menacée, tant nos réalisations vont au-delà de notre survivance raisonnable, et notre sagesse (s’il en est une) à engendrer des processus en équilibre avec le milieu ne paraît pas pertinemment efficiente ; il nous manque des dimensions que certains semblent pourtant obtenir (sans discernement véritable), mais dont le mécanisme apporte toujours des légendes (des histoires à dormir debout), des suspicions (corruptions de tous bords), des limites à l’entendement (probablement une génétique dépassée)… n’en avez-vous pas assez de ces leurres ? On peut avancer malgré cela, savez-vous ? Choses que le robote ignore, lui, dans son fonctionnement, n’élabore qu’une logique déterministe, celle qu’on lui a attribuée ; tout le souci réside dans son entretien, dans la volonté de lui permettre de perdurer (et dans la méthode encore rudimentaire de sa régulation aléatoire : « trouver la juste mesure ? ») ; tout son mécanisme devrait autoriser à ce qu’il optimise la résolution de ces problèmes-là en parallèle avec les tâches pour lesquelles on l’a conçu…

› Toutes pensées, toutes actions de nous-mêmes demeurent un processus du vivant, quand des individus « divaguent », par exemple lâchent une bombe atomique, c’est aussi de la vie qui perd la raison, s’égare, pète les plombs, déraille et parfois se détruit elle-même par simple détresse… (il réfléchit un moment et reprend)

› Justement à propos de cela : « se tuer par désespoir ! » Mais qu’est-ce donc ? Une invention que la vie insinue, pour éliminer les êtres « inappropriés », comme celui qui se fait exploser avec sa charge de dynamite autour de la ceinture, au milieu d’une foule ? Il extermine par désenchantement et s’anéantit lui-même dans une désillusion de l’existence dans laquelle il ne se voit plus d’avenir, peu importe la cause, au bout du compte ; il tue d’autres êtres avec lui, qui ne sont, eux, pas forcément désespérés.

› Oui, ce sentiment ressemble bien à une fonction du vivant pour annihiler les êtres pas conformes (atteints de folie, de démence, affirmeront les spécialistes) ? À force d’engendrer ces individus, ce cycle que la nature ne peut empêcher (semble-t-il ?) va susciter l’apparition d’un acte modérateur (au gré des circonstances comme en cas de surpopulations), insinué dans nos cervelles, il va égrener cette désillusion et freiner les mécanismes propagateurs de l’espèce ; alors, « se tuer par manque d’espoir », cela devient-il un agissement de la vie qui élimine une partie d’elle-même, défectueuse, pour préserver ceux qui restent ?
› Que dire des rats quand ils sont trop nombreux, qu’ils s’entre-dévorent par un simple choix volontaire ? Non ! ils s’étripent aussi par désespoir ! Ce serait ainsi leurs constituants génétiques qui programmèrent en eux ce geste régulateur (ceci indique que le milieu ne suffit plus à les pérenniser)… Nos égarements demeurent autant ceux du vivant et une récidive exagérée ou trop répétée de cela peut aboutir à l’extinction d’une espèce, la nôtre ; ce processus ne révèle rien d’exceptionnel, nous sommes inclus au cœur d’une expérimentation permanente de la vie, elle explore tous les possibles à travers nos actes, en sortir semblerait-il invraisemblable, sinon, quoi, un soubresaut, chercher à s’assagir ? Tout comme le lion mange ou tue le lionceau qui n’appartient pas à sa progéniture, cet acte qui peut apparaître à certains « horrible » obéit comme le reste, à un mécanisme de survie (qui a dit que la nature dégouline de tendresse ?). La question, ici, ne consiste pas à savoir si tout cela est bien ou mal, bon ou mauvais, mais à essayer d’assimiler et de comprendre leur véritable finalité ! De là à en conclure une nécessaire évolution, qui puisse nous aider un jour à discerner les agissements rétrogrades et nuisibles, comme ceux qui nous apporteront une pérennité, un espoir d’avenir, quoique la tâche semble immense, ne nous interdisons pas de rêver.

› Toutefois, n’idéalisons pas trop la nature, elle est ce qu’elle est, le fait que nous en faisons partie concourt à ce que nous sommes ; par contre, elle engendre partout un même phénomène qui inclut systématiquement des recherches d’équilibres et de diversification ; et puis cet argument : que les animaux ne demeurent pas forcément plus pacifistes que nous, s’ils usent de moyens moins voyants que les nôtres (en effet, ils n’ont pas inventé la bombe atomique), leur « réussite » à ce jour n’apparaît pas à notre égal, ils ne s’en trouveraient pas moins agressifs à priori (aspects constatés par exemple entre les grands Singes ou les Suricates aux mœurs très belliqueuses (réf.)) ; cela ne se montre pas moins pernicieux, entre eux-mêmes, entre eux et nous et réciproquement, la violence reste inhérente à la vie. Le problème intervient au moment des échanges, la nature n’a pas obligatoirement perçu la nécessité que tous les êtres puissent communiquer entre eux ; ces connexions ne s’établiront au fil du temps, comme cela s’est toujours fait, que si un impératif, un besoin se fait ressentir, apporte une évolution, une opportunité d’expansion, de survie ou de diversification, d’une espèce à une autre, c’est évidemment valable aussi pour nous. Cet échange, quand il s’avère possible, ne se passe pas forcément au niveau de l’intellect, ni des mots, mais plutôt à travers un affectif, ou du sensitif ; des communications physico-chimiques bien souvent ignorées, nos perceptions actuelles n’arrivent pas encore à les discerner toutes et puis en restent d’autres à découvrir, qui appellent cette soif d’apprendre, de comprendre, de se répandre !

« Le vivant est un transmetteur d’information, le fil de la vie demeure immatériel, c’est un message héréditaire qui s’est constitué au fil du temps. »

« cours grossier sur la taille du cerveau »

› Chers enfants, ce n’est pas la grosseur du cerveau qui procure le plus d’intelligence (et d’ailleurs de quoi parlons-nous ?), c’est la façon dont il est conçu et la pérennité de son usage qui lui permettent de subsister au fil des âges, dont il est question. Regardez ces insectes, ils héritent de quatre cents millions d’années d’adaptation, ils existent toujours, très nombreux ; notre espèce (homo sapiens), vieille de quelques centaines de milliers d’années, dans sa dernière évolution, dispose certes d’une volumineuse boîte crânienne, résultat des acquis de ses ancêtres, ses prédécesseurs, mais cela ne veut pas dire pour autant qu’il obtint un intellect supérieur à tous les autres ; d’ailleurs, si l’on compare notre héritage génétique à celui de nos voisins vivants, le nôtre est loin d’apparaître le plus vaste, un simple grain de riz en possède un plus étendu ; la petite plante « Paris japonica » contient un génome cinquante fois plus grand ; certaines fougères, les pins, détiennent aussi un patrimoine génétique plus important, nous devrions la jouer modeste de ce côté-là ! Et si l’on parle d’intelligence comme d’une capacité adaptative, peut-être, mais en cela, les insectes, par exemple, gagnent avec une antériorité colossale, de millions de pages d’histoire supplémentaires. Ce n’est pas la complexité qui donne la performance, c’est bien la faculté d’acclimatation à un environnement et sa manière de perdurer ; à consommer une énergie juste suffisante, pour procréer et subsister, bref, « s’adapter » en permanence et donc constitue cette capacité à « évoluer » ; leur taille nous montre, par voie de conséquence, l’aboutissement de cette « faculté » et à en voir le résultat, je la trouve « révolutionnaire ! » Quant à nous, sur ce point, nous n’avons pas encore fait nos preuves, notre espèce apparaît également bien jeune et permettez-moi de vous amener à réfléchir à travers cette interrogation onirique :

Imaginez une nuit interminable
ce qu’elle sera
dans dix mille ans

› L’humain dépense énormément de ressources naturelles pour sa seule subsistance ; « prendre conscience » que ces biens communs doivent être partagés équitablement entre tous les êtres vivants reste encore un long cheminement à atteindre ; son égoïsme forcené, comme un défi qu’il exhibe pour narguer qui, quoi, la vie ? La grosseur du cerveau n’est pas un référent déterminant, de mon point de vue, et l’antériorité de notre espèce n’apparaît pas, elle aussi, suffisamment ancienne pour tout justifier, d’autant plus que c’est nous-mêmes qui nous mettons à la première place, pour prétexter notre prééminence sur autrui. Nous ne sommes que les seuls à raconter cela, et l’affirmer ainsi est d’une vanité incommensurable. Ce n’est pas parce que nous avons la possibilité de détruire beaucoup sur terre que cette capacité d’anéantissement démontre la soi-disant prédominance de l’homme sur les autres formes de vie. Je dirais même que cette expression de force violente ne représente que l’aveu impuissant de notre faculté à nous adapter, cette frénésie ne nous donne qu’une aisance « celle de tuer », celle de « nous » annihiler. Je ne vois là vraiment rien qui puisse prouver que nous demeurons supérieurs à qui que ce soit ? Ce potentiel dévastateur nous montre plutôt une dégénérescence de fonctionnement, une inaptitude à gérer les énergies qui nous entourent, l’évidence d’un échec ! Et la résultante à venir de cette situation est connue de tous, c’est la mort, une extinction pure et simple de notre espèce, à cause d’une incapacité à évoluer de ses propres « tares ! » Ce constat devient pour moi, sans appel !

› Enfin, de désigner comme des héros, des hommes de guerre, des chefs, des conquérants, n’est pas bon signe, notre histoire regorge de ces personnages ; méfiez-vous de ceux qui désirent vous commander et prétendent vous apporter monts et merveilles ; la lecture de notre passé nous montre qu’une dérive autoritaire reste toujours possible ici, comme elle sévit ailleurs encore. J’affirme même, sans trop me tromper, que ces êtres-là souffrent d’un mal dangereux, la recherche du pouvoir n’amène qu’une aliénation de plus à l’esprit. Aujourd’hui, un dictateur, ou une société surarmée représente plutôt le symptôme oppressant et désastreux de ce que les hommes se trouvent capables de faire : se détruire eux-mêmes ; et ça, c’est lamentable ! En rien, mais absolument en rien, un signe d’intelligence supérieure ! Ce n’est que la simple marque d’une dégénérescence avérée… oui, je sais, vous dites que je me répète, c’est vrai ! Mais méditez là-dessus tout de même…

(il s’enflamme !)

› D’ailleurs, certains ne comprennent même plus pourquoi ils s’entre-tuent ! Seraient-ce des êtres à ce point décadents, que la nature ne nous inspire plus aucune manière pour s’en débarrasser ? J’insiste, « ils ne s’en souviennent plus, de ce pour quoi ils s’entre-déchirent ! » Leurs massacres quotidiens, n’ont d’arguments que cette opiniâtreté à s’endurcir un peu plus chaque matin ; mais refermons cette parenthèse, je risque de m’énerver bien plus qu’il n’en faut…

› Revenons à notre sujet initial… en d’autres termes, toutes ces considérations nous montrent l’étendue colossale de nos ignorances ; nous semblons très ignares de nous-mêmes et du fonctionnement de nos viscères, nous commençons juste à les comprendre à peu près. Concevez que nous ne maîtrisons guère notre propre mécanique interne, elle reste complètement autonome ; notre tube digestif, sa structure, dont le processus d’assimilation des aliments demeure fondamental à toute forme de vie… il possède autant de terminaisons nerveuses que celles du cerveau, voire peut-être plus, totalement indépendant, oui en grande partie ! Ce sont les Bactéries et les Archées (les Procaryotes), qui permettent à la digestion de se réaliser ; sans ces micro-organismes « préalables », nous ne pourrions digérer ou plutôt nous n’existerions pas ; je me répète, c’est exact… Est-ce vous qui ordonnez à votre cœur de battre ? À vos cellules vivantes de se régénérer ou de mourir ? À la plaie d’une blessure de se refermer ? À notre insu, je vous dis ! Elle nous maintient en vie dans ce « véhicule » corporel et effectue l’entretien général, en quelque sorte ; à nous d’accomplir le reste, en menant notre existence, puis de laisser quelques traces, ce que je réalise ici en vous parlant ; ce que vous produirez demain, en écrivant une œuvre, en exprimant un art, à construire un pont, un sourire capté par l’œil indiscret du photographe, etc., etc. Mais aussi certains tueront, massacreront, s’égareront ; ceux-là, oublions-les, ce sont des erreurs de la jeunesse de notre espèce ; puis enfin à chacun de mourir, afin de céder la place aux suivants, cycle intangible du vivant.

› Le mécanisme digestif constitue ainsi et encore, toujours, un « processus préalable » dans la chaîne de l’évolution de toute vie, et il se forme dans l’embryon avant le cerveau final du haut de votre tête ; il serait plutôt le premier, et le second celui de votre crâne… De considérer l’émergence d’une conscience, comme la perception de nous-mêmes, résulte d’une adaptation particulière et propre à certaines existences, je doute que nous ne soyons les seuls à bénéficier de cette émergence si spécifique ; et de là, aller vers une autonomie totale ? Cela ne me semble pas possible… mais ce serait probablement une illusion, certainement, qui nous est donnée pour ne pas nous affoler. À cause de cet inconfort de l’esprit à penser l’inconnu qui l’apeure ou le perturbe, on y a mis le mot « croire » ; apportant cette manière de percevoir le monde, avec toutes les interprétations que notre imaginaire invente pour ne pas se méprendre et par conséquent nous rassurer. Ajoutons, c’est mon point de vue, la croyance apparaît, quand une « ignorance » ne peut se résoudre, on « croit » à une explication quelconque de l’entendement pour combler ce vide ; réfléchissez assidûment à cette affirmation… Dans ce processus adaptatif, constitué de « leurres » plus ou moins instinctifs, et encore aujourd’hui, je dirais « des illusions tranquillisantes » que nous ne discernons pas forcément, avec lucidité, l’inconscient reste un moteur majeur de nos vies ; ce ne sont que des mécanismes de l’esprit qui se sont établis au fil des millions d’années et qui obéissent à la nécessaire évolution de la chose vivante, pour en assurer sa pérennité ; « un être effrayé de tout, au moindre nouveau, ne peut guère progresser ; des subterfuges apaisants lui ont permis d’avancer (peu importe qui les y a mis) » et dans ce déroulement, nous sommes inclus, tout à fait dedans. Mais, de ces mécanismes, nous n’en comprenons pas vraiment tous les fondements, d’où ces conflits permanents ; des soubresauts de jeunesse d’un être qui se cherche et doit se trouver, il est question ici d’assimiler ce principe appelé « survie », notre avenir en dépend ; chacun est sommé de se montrer « à la hauteur », encore faut-il distinguer ce que la vie attend de nous… Ce que je raconte évidemment n’est qu’une interprétation très parcellaire, nécessiterait de plus amples explications, c’est certain. Enfin, ce qui peut nous sembler curieux, c’est ce besoin immanent du règne vivant s’exerçant sur nous, il nous incite à prendre « conscience » des réalités de ce monde ; disons-le autrement : essayons d’évoquer ce que j’arrive à percevoir, ce petit quelque chose qui nous amène à désirer comprendre toujours plus ; à discerner subtilement ce que nous sommes, de notre mécanique interne jusqu’au fonctionnement des choses en dehors de nous… posez-vous cette question ! « Tentez de définir cette nécessité qui nous pousse à réfléchir à tout cela ? » Et justement, c’est tout à fait dans ce que je suis en train d’exprimer actuellement…

intermède

› Voilà, ces premiers cours préliminaires sont terminés maintenant, ils devraient vous aider à explorer le monde du vivant plus intensément avec un œil plus critique, je l’espère. Nous avons rendez-vous demain matin, dans la forêt d’à côté où vous aurez à découvrir plus activement ce que la vie veut dire ; nous allons en effet apprendre à reconnaître toutes ses formes d’existence, de la plus petite à la plus grande, en essayant de n’oublier personne ; le but de cette démarche consiste à vous amener à prendre conscience de la masse prépondérante des choses animées qui perdurent sur terre et dont nous faisons partie ; nous allons débuter ce parcours en vous aidant à susciter cet éveil au monde autant que faire se peut… Nous le commencerons ensemble, mais ce sera à vous de le terminer ou de le prolonger dans la limite de vos espérances ou de votre désir, le point final, ce sera à vous de le décider si ce choix vous apparaît nécessaire ; certainement pas à moi…

« aujourd’hui »

Sur la table, le savant a laissé quelques notes, il m’autorise à les lire et permet qu’on les reproduise ici :

« La résurrection des comportements grégaires, tels que ces tatouages ancestraux, faits pour vous distinguer ou vous inscrire, comme une marque de repérage, à un groupe social, si ce n’est pas une mode, à vouloir s’identifier, montrer sa volonté d’appartenance “tribale” ; de ces rites primaires de survie, dans un monde où pointent des signes d’incertitude de plus en plus assidue, j’y vois là, moi, comme une commodité de refuge, comportement similaire à celui du financier, quand il achète de l’or, sa peur s’apaise. »

« Une sorte de retour aux sources, en quelque sorte, je reste assez persuadé que ce repliement apparaisse encore comme un réflexe instinctif de protection, à l’inverse d’une attitude sociale mûrement réfléchie ; il demeure vraiment “tribal” au sens véritablement primitif du terme. Cela nous renvoie à nos origines ; je ne donne ici aucunement un jugement de valeur ni décide d’une règle morale ou de conscience, je m’explique un simple constat ; constat identique avec ces percements de la peau, pour y introduire anneaux ou bijoux quelconques (parfois très nombreux, sur tout le corps) qui relèvent du même mécanisme, ainsi que la mode vestimentaire, les jeux sociaux, comme les sports d’équipe, représentent, avec la perception que j’en comprends, les rouages d’un processus similaire. Je me permets ce constat, que l’humain garde en lui des comportements primitifs, grégaires et collectifs ancestraux ; quand des événements comme la montée des intolérances, le repliement, le nationalisme, le fascisme, les conflits religieux, ressurgissent pour atteindre certains des niveaux exacerbés tels, que l’on voit perpétuellement refleurir ces marques “tribales” et cela d’autant plus intensément dans une société en crise ; mieux elle se développera, plus vous observerez la renaissance de ces comportements oui, primitifs, apparus à nos origines, c’est-à-dire il y a très longtemps. Laissons donc, les ethnologues et les anthropologues, nous les décrire avec davantage de précision et de détail que moi-même je ne le pourrais. »

« Pour finir, j’affirme sans trop penser me tromper que notre propre histoire ne nous sert pas de leçon, nous répétons invariablement les mêmes erreurs (devenues des tares) de nos ancêtres, les plus viles, les plus inconscientes et les plus détestables. Ces signes précurseurs, ces marques d’identification encore “tribale” préfigurent des années futures terribles, de haine et de violence, comme dans le passé nous avons su déjà en produire. Un éveil salutaire s’avérerait nécessaire, mais au point où nous en sommes je ne vois vraiment pas comment l’atteindre, l’exprimer aussi intensément qu’actuellement, le partager avec mes semblables, bref trouver une solution autre que la guerre ou les conflits permanents. »

Entendu quelque part : « Votre monde se constituera pour beaucoup de ce que vous en accomplirez ; si vous provoquez un chaos, il deviendra ce chaos interminable ; si vous en faites une joie, il apportera l’allégresse apaisante au moindre soubresaut d’une aisance. »

« Hier, j’ai déjà affirmé cela, “la vie c’est avant tout un long poème”, oh ! je le comprends bien, en répétant ceci, l’on prêche pour notre cause, le vivant ! Mais persistent diverses choses plus inertes, qui se distinguent de notre principe essentiel, nous y puisons des ressources existentielles ; notre substance semble un vaste récit qui étend son animation à tout ce qu’elle accapare ; ces atomes qu’elle assemble en molécules et forme une agitation et transmet toutes sortes d’informations, celles de sa présence vers un avenir incertain, mais qui peu à peu se construisent au fil des générations, au fil du temps ; la vie serait donc comme une convulsion de la matière, c’est ça, un long poème qui s’égrène depuis quelques milliards d’années sur terre, et ailleurs peut-être, analogues à d’autres systèmes, en mouvement ou non, ce serait bien pareillement des vibrations, des messages en forme de pulsations hétérogènes, des ébranlements, assemblages de codages qui se réalisent là où c’est possible, comme au niveau de nos briques, ces ADN des plus divers… »