autour du 5 août 2020

(texte manuscrit)

—> [ajoutements] de l’auteur et du scribe : récit charnière inclassable… (à relier)
—> du scribe, absorber, manger, recracher, ou digérer, banale fonction de vivant…

« Que pouvais-je raconter de plus, que pouvais-je raconter de moins ? » Se disait le scribe de ce racontement ; était-ce une anticipation ou la révélation d’un fait ignoré ? Nul ne savait où les ramifications d’un tel robote furent développées, et ce qu’il fallait y trouver : la vérité d’une histoire affabulée, la réalité d’une information en cours de divulgation ? Le scribe n’en sut jamais rien…

(ajout électronisé du 7 août 2020 à 13h45)
Le scribe ne sait pas faire autrement, il est pris au piège, quoi qu’il fasse ; toujours revient une prosodie presque archaïque, elle l’assaille, lui demande des comptes, un compte rendu justement, ajoute sans cesse à son écriture une note supplémentaire indéfaisable ; alors il laisse filer, ne résiste plus, procrastine de moins en moins, tente de manger peu jusqu’à l’abstinence si possible, une résistance devient impossible. Plus il laisse entrer ce discours sans l’amoindrir ni le falsifier, plus il s’aperçoit de sa cohérence propre, son obstination à remonter les sources d’un cheminement naguère parcouru par tous les ancêtres. Quoi qu’il fasse, un moment arrive ce discours à la recherche d’une trace inconnue à retrouver. Il n’y pense pas, cela vient, quoi qu’ils fassent, disions-nous, comment se prétendre auteur d’un tel récitement quand il vous éclaire de sa clarté évidente, on n’est que scribe à cet instant, pas autre chose, on n’en est pas plus diminué ni augmenté d’un savoir de plus. Il ne cesse de s’étonner de la réaction de son corps au moment de ses écritures, il semble bien que ceux qui l’habitent organisent la réussite de « ce travail de vauriens », se dit-il. Il voudrait qu’on en finisse une bonne fois pour toutes, que la narration se tarisse s’arrête subrepticement sans jamais reprendre, il voudrait que cela sorte de sa tête définitivement, une bonne fois pour toutes, et qu’on y revienne plus, il voudrait tant ! Mais ce moment n’arrive décidément pas, il « doit » terminer l’ouvrage qui lui est demandé ; il a peur des représailles en cas d’abandon, alors il n’abandonne pas, il obéit, fait le niais ou l’imbécile, dis des bêtises quand la narration ne le traverse pas, il s’occupe négligemment à des choses subalternes, effectue quelques travaux d’aménagement, la peinture d’un mur en blanc, bouche quelques trous avec les restes d’un mortier usagé, s’amuse à quelques éclairements nouveaux dans les passages qu’il a restaurés, expérimente une nouvelle lumière plus économique, ajoute des gadgets, des boutons pour allumer et éteindre l’éclairage ainsi restauré. Des occupations secondaires et facultatives, dans tout cela, pour uniquement apaiser une petite homéostasie, éviter d’éventuelles contrariétés venues des extérieurs, pouvant l’agacer assurément dans des travaux supplémentaires, un emploiement pour une rémunération de misère et survivre dans sa cahute toute pourrie ; c’est ce qu’il dit, mais n’en croyez rien, malgré quelques fissures par-ci par-là, il arrive à survivre suffisamment au-dedans, dans un confort acceptable, comme si on l’avait préparé à une plus grande disponibilité insidieusement préparée à son insu pour qu’il puisse, quand les moments d’une grande traversée arrivent, abandonner tout le reste et s’adonner à ces écritures presque maudites, tout de suite, quand elles arrivent, pour ne rien oublier, le moins possible ; « ce serait sacrilège d’oublier la moindre traversée, je dois transcrire vite ce qui me traverse, j’ai peur d’un oubli ! »
Est-ce le scribe qui ajoute ces lignes, ceux qui l’habitent, ceux qui le traversent, la logique d’un plan de fabrique, ou un déterminisme ambigu avec des relents d’une faillite continue ? Y a-t-il un témoin de la scène ? Il n’y en a pas ! Il n’est pas seul, malgré qu’il croie l’être, il est bien trop habité par ceux-là, les habitants de lui et ceux autour, tout près, la plupart du temps invisibles, mais bien là ; les plus gros seraient cette Mouche qu’il va bientôt écraser, parce qu’elle l’agace, cette Sauterelle trop curieuse qu’il va déplacer hors du logis, avec précaution, parce qu’il a des principes éthiques (les Mouches n’en font pas partie), ou ce Cloporte (qu’il laisse tranquille, celui) caché dans un interstice, en haut du mur, près de la fenêtre ; non, il n’est pas seul, loin de là. C’est peut-être eux, tous ceux-là déjà cités (et les oubliés), de ce qui le traverse, ils en ont certainement une part non négligeable ? Voilà qu’il se met à faire de la littérature avec ces phrases aux rimes approximatives ; n’en croyez rien, ce n’est qu’un vent qui passe, laissez-le passer, et après, vous verrez bien ce qu’il en reste ?
Alors, qui les dicte ces récits ? Ce scribe dédoublé et qui ne cesse de se regarder écrire comme un clone de sa structure, à la charnière entre deux mondes, le sien et l’invisible, mais le traverse pourtant, il se pose cette question, tout le temps…

11 août 2020, de la rapine

(texte manuscrit, à 9h) (version et ajouts)

—> version finale : 0. ὕλη, livre des préambules

Préalable à de vulgaires mentions légales pour satisfaire quelques ego d’un droit que l’on prend, etc.

(De tout ce récit)
    • Quoi, il n’y a pas d’auteur ?
    • Donc on peut faire une rapine, se l’approprier goulûment sans représailles et toucher des droits sur l’auteur de notre mine ?
    • C’est malin !
    • Il ne faudrait pas que l’écriture soit médiocre (pour un tel effort) ? Il faudra aussi biffer ce qui dérange, l’aseptiser de toute allégation contraire à nos principes. Oui, c’est cela, il faut en faire du fric !

    • J’ai gravi les plus hautes montagnes, allez, paf ! J’y mets mon nom, sur ces ravissements !
    • J’ai traversé, conquis une vaste étendue, allez, paf ! Je la baptise d’un nom, le mien ! Mon choix z’à moi, ma fierté pour que l’on ne m’oublie…
    • Tiens, là, cette fleur que je ne connaissais pas, allez, paf ! Étiquette avec mon patronyme ! (c’est moi qui l’ai découverte, c’est ma fleur !)

« Les papillons, ceux qui se posent dessus, la fleur jolie, s’amusent de ces appropriations inopportunes, on sent comme des rires de phéromones exhaler l’air ; il fallait bien trouver quelques pantins, hominidés que l’on anime (très agités ici), pour amuser les gens du coin… »
Un aggloméra de procaryotes, voyageant sous l’aile d’une mouche, rapportèrent ces amuseries dans un tout petit paquet de mémoires endolories : « J’ai respiré une particule qui me l’a transmise ainsi, cette histoire sans merci », raconte ce scribe momentané, avec un rictus jusqu’au bout du nez.

(texte manuscrit – 11 août 2020 à 23h25)

du scribe et sa vertu – ou tragicomédies
(discours procaryotique, sûrement ?)

Dans l’ordre !
« Aujourd’hui, rien ne vient, la fatigue, la chaleur, l’étouffement dans l’air, rien ne vient… »
    • Ce n’est pas bien !
    • Tiens ? Voilà qui se met à écrire un journal de bord ?
    • Ridicule !
    • En effet, de prime abord cela ne fait pas partie du rapport ?
    • Que voulez-vous dire ?
    • Eh bien, du récit attendu ! Son compte rendu !
    • Ah oui ! Vous me l’avez précisé naguère, la souvenance est restée…
    • Que doit-on faire ? Le réprimander, l’anéantir, le contrarier, faut-il le fâcher ?

« Plus de promenades dans la forêt avec ce temps caniculaire, c’est trop ! Trop de moucherons, la fatigue, l’étouffement dans l’air, j’ai du mal à écrire… »

    • Votre eucaryote semble défaillir, que doit-on faire ?
    • Rien ! Qu’il se débrouille tout seul ce bon à rien !

13 au 31 août 2020

(texte manuscrit – 13 août 2020 à 17h30)

du scribe et son zèle

    • Pourquoi n’allez-vous plus vous promener en forêt ?
    • Je ne vais pas me « promener » dans la forêt !
    • Vous y alliez bien pourtant, je l’ai constaté à maintes reprises ?
    • Oui, en effet, mais ayant un piètre talent d’orateur, je n’y vais que pour y recevoir quelques inspirations (salutaires et sans condition). Elle a tant à me dire cette forêt. Même si l’on voit que j’y cause, au-dedans, dans mes parcours tout le temps ; cela les fait piailler, les oiseaux, des moqueries d’eux que je comprends bien, je ne leur en veux pas ; c’est qu’elle me parle cette forêt, elle anime ma voix dans des pensées irrépressibles que je ne peux feindre ni interrompre. Elle m’a tant dit, et je dois maintenant me refréner quant à la parcourir de nouveau ; ces récitements innombrables, il me faut déjà les mettre au propre dans un livre de mille pages d’influence ! L’auteur, ici, c’est la forêt et ses habitants, ce sont eux les auteurs, je ne suis qu’un scribe leur prêtant attention, un larbin zélé, c’est tout moi, ça !
    • Et vous y croyez à ce que vous me dîtes là ?
    • Pourquoi croire ? Je ne crois pas ! J’obtempère ! Dans un zèle indécent…
    • Oh, c’est malin ce que vous dîtes, je ne rentre pas dans votre jeu, c’est un mythe de plus ! Et probablement vous y croyez, vous voilà bien dévot ?
    • Pensez ce que vous voulez, je m’en fiche !

(texte manuscrit – 14 août 2020 à 10h22)

sources (redite)
    • Il n’y a pas d’auteur propre, c’est tout ce qui me traverse le coupable, et ça en fait un monde, chacun y a sa part ! Vous, vous ne faites que copier, recopier, influencé par tout cela, oui, ça vous traverse, mais ne reste pas ! La copie est toujours plus pauvre que ce qui la broie, la consume, au fur et à mesure que l’on oublie d’en recopier la moindre inspiration, celle qui vous sourit et à qui vous avez dit oui !

(à 11h45)

    • Elles te disent « va, vis, devient, que l’on voit ce que tu deviens ? »

(texte manuscrit – 15 août 2020 à 19h10)

tragicomédies : témoins (version)

    • Il y a ceux qui font et il y a ceux qui regardent !
    • Ceux qui font souvent se corrompent, ceux qui regardent parfois racontent ce qu’ils voient ; ce n’est pas sans déplaire aux faiseurs si on les flatte, si on les encense, si l’on parle d’eux. Si d’aventure ils s’affairaient à des tâches obscures ou tyranniques, toi qui regardes, si tu racontes ce que tu vois, dépêche-toi de fuir si le tyran s’en offusque ; dépêche-toi d’abattre celui qui t’a vu, toi le despote découvert, tu vas tyranniser un autre que toi ?
    • Et puis aussi, il y a ceux qui mentent à tous, qu’ils fassent ou voient, embrouillent ou boivent… (version : Et puis, il y a ceux qui mentent à tous, qu’ils fassent ou voient, embrouillent ou trinquent, et même osent tout accomplir en même temps, faire et voir, mentir, ils boivent une soupe des grimaces, eh, leurs repentirs où sont-ils ?)
    • Enfin, au milieu de ce marasme, la plupart se débrouillent comme ils peuvent ; voir et faire, faire et voir, cela va de pair, le talent de chacun fera bien l’affaire, on en trouvera toujours un à raconter ce qu’il observa : ceux qui s’affairent.
    • Avec tout ça, méditer cette parole d’un air enjoué, remplacer les mots « faire » et « voir » par ceux que l’on veut, il y en aura toujours un pour toutes les couleurs, les cendres, les saveurs, le dedans le dehors, les odeurs, tous les sens y mettront une grande ampleur à nos médisances, à nos malheurs, nos erreurs réussites ou paix retrouvée, pour ajouter à nos jeux éperdus un petit bonheur (que l’on avait perdu de vu)…

(texte manuscrit – 31 août 2020 à 2h10)

« Le scribe a été bien consciencieux, il a transcrit ce qu’il a pu, il a annoté comme il se doit tous les récits (d’une croix), corrige, barre, refait, défait, des mentions temporelles de lieu à chaque parole transcrite, écrite, orale, électronisée… il a copié tant et plus… comme si c’était le son de sa voix, il a fait du bon ouvrage, “le récitement d’un fou, certainement”, diront les gardiens de la pensée… n’en jetez plus, le scribe a fait comme il a pu… »