(parole en marchant - 13 oct. 2017 à 19h12)

—> ironie

Euh ! j’avais la grosse tête auparavant, mais j’ai l’impression maintenant qu’elle a réduit, elle ne contient plus la totalité du chapeau que je mets, elle a rétréci ? Se pourrait-il qu’une peuplade quelconque m’ait jeté un sort ; mes divagations auprès d’eux naguère ne leur convinrent pas, à tel point qu’ils me rapetissent particulièrement du ciboulot, ce serait bien possible ?

Aujourd’hui, en dehors de ce fait rétractile, en effet, euh ! je n’ai aucune sensation d’une diminution ailleurs ; à moins que le tissu du chapeau en question se soit élargi, ou qu’il fut porté inopinément par une plus grosse tête que la mienne, à tel point qu’il en reste décousu, détendu, agrandi ; mais j’ai beau regarder les coutures et humer un parfum, celui d’une chose différente qu’il aurait contenu ; je fais comme le chien, renifler et je ne sens aucune autre odeur que celle de ma personne, ni ne vois sa confection désassemblée ou rompue par l’éventuelle excroissance anormale d’une cervelle à l’embonpoint notoire ? Non ! Je crois plutôt… enfin, je le concède bien, c’est mon propre crâne, mon enveloppe cervicale qui rétrécit étonnamment, subitement ; peut-être, n’a-t-elle plus besoin d’un pareil encombrement, à mon âge on doit se contenter de peu ? Son usage, dans ma jeunesse, nécessitait probablement des fonctions élaboratrices supplémentaires pour justifier l’élargissement de mon sommet, elles ne s’avèrent plus indispensables ni obligées aujourd’hui ; c’est possible ! Mais c’est curieux, cela surprend, on aurait pu me prévenir tout de même ; je n’irai pas jusqu’à dire que cela me vexe, n’ayant aucune prétention d’avoir, la substance qui séjourne en haut de mon crâne, la plus prééminente qui soit. Euh… enfin… je me pose des questions, mes qualités neuronales, mes capacités motrices ne vont-elles pas aussi s’amoindrir ? Et mourir un jour, cela arrivera fatalement, d’un cerveau ténu ridicule… vous verriez un corps insensé avec une tête tout amincie, en haut ! Ce serait drôle ! Et j’ai bien peur que la disproportion ne se montre pas à mon avantage, que l’on se moque de moi, dans le pire des cas, entendre : « ah ! t’as vu la p’tite tête ! »

Si l’on me traite ainsi… vous ririez que j’en serais vexé ! Ne souriez pas ! En tout cas pas maintenant, attendez d’avoir fini de lire ce que je vous raconte ! Riez ensuite, mais en cachette, mais pas devant moi ; je risque de m’amoindrir encore un peu, et de ça je ne veux ! Déjà, je n’avais guère de propension à désirer agrandir quoi que ce soit de mon corps ni une quelconque partie, pour épater la galerie ; ou de vanter quelques érections anormales, tonitruantes ou débordantes ; de ça, je n’en ai guère usé. Non, que ma cervelle se réduise à ce point est plutôt une interrogation d’ordre clinique, presque médicale ; pourquoi donc cette diminution têtue, elle avait une taille qui auparavant me satisfaisait pleinement, entre un trop et un pas assez ; non ! là, je rétrécis et cela m’embarrasse. Je m’attends à l’altération de quelconques autres organes de mon corps qu’il aurait engendrés, et m’amoindrirait à nouveau… comment pourrait-on dire ? Est-ce dans ma perception, concédant une ignorance totale des mécanismes internes de ma personne, n’y ayant jamais mis la tête pour observer si cela fonctionnait encore ? Apparemment, oui, puisque je vous parle en ce moment d’une manière qui me semble normale, intelligible, quoique parfois les élucubrations de ma cervelle me fassent dire des choses qui me dépassent, auxquelles je n’y comprends que pouic ! C’est même étonnant, non… Non ! Je suis navré de voir la nature m’amoindrir à ce point, surtout d’une zone que j’aurais voulu garder intacte, autant que possible, jusqu’à mon dernier soupir, histoire de vérifier comment ma fin inexorable arriverait, dans une douleur la moins désagréable possible ; aussi pouvoir m’éteindre dans mon sommeil serait la plus grande joie que l’on puisse m’offrir, c’est la meilleure façon d’en finir… Non ! Je suis tout de même quand même un peu vexé d’être amenuisé de la sorte ; déjà… pendant un trajet si vous devez dépasser un fossé, à vingt ans l’on saute sans réfléchir ; maintenant, on cogite… avant ! sur l’éventuelle réception des deux membres inférieurs, dans quelle situation ils vont parvenir à me soutenir, pour constater au final, de ne plus pouvoir franchir le Rubicon aisément ; on se casse, disons-le franchement… on se casse la gueule ! Ce qui amusera les plus jeunes d’entre vous, on s’y attendait ; et moi, je trouverai là une bonne occasion de les prévenir qu’eux aussi quand ils auront votre âge, ils seront confrontés aux mêmes aléas ; alors vous rirez peut-être moins à votre tour, demain, c’est « chacun son tour ! » justement…

Non ! la chose que j’aurais voulu voir s’amoindrir le moins possible, c’est bien cette zone-là, qu’elle reste intacte ! Pourquoi devrait-elle se réduire à ce point ? J’ai comme une appréhension, d’être traité de petite tête ! Oui à tout vous dire, cela n’est pas génial ; déjà pendant mes jeunes années, que l’on me surnomma « grosse tête » ne m’égayait pas forcément ; d’autant plus exprimé de manière ironique et moqueuse. Ceux qui me connaissent depuis longtemps, m’ayant chamaillé de la sorte, m’affublent à nouveau non pas de grosse, mais de « petite tête », cela m’effrayerait un peu et j’entends à l’avance des rires narquois ; je devrais alors user d’une répartie satisfaisante pour vaincre, d’une certaine manière, cette jovialité sarcastique… Oh ! mais les années passent, il me reste de quoi sourire ; certains ont perdu leurs cheveux, certains ont perdu un rein, certains ont perdu la vue, ou comme moi, sois devenu à moitié sourd… Arrive aussi des aléas, maintes choses pour nous amoindrir tant à force de vivre, et subsiste toujours un sujet sur lequel rebondir pour contrer la contrariété ainsi émise ; eh ! je ne m’illusionne guère, je m’en soucie plus autant, j’admets l’embarras du choix, selon l’individu qui me dira ça… Mais tout de même, régresser jusqu’à obtenir un petit cerveau, en tant qu’humain, cette vantardise je ne l’ai plus ; et ce n’est pas l’ampleur cervicale qui élève la personne, c’est ce qu’on rencontre au-dedans, le plus important ! Alors peut-être, cet intérieur-là admettre qu’il se réduit à l’essentielle et me concède l’indispensable, là si c’est le cas, je pourrai dire « je suis satisfait » ; c’est certain, je n’use pas de tout le potentiel que m’offre la nature, et j’ai abandonné, laissé à la dérive certaines fonctions qui ne m’intéressaient guère ; dans ce cas, je veux bien ! Mais que l’on me conserve ce que j’utilise tous les jours, régulièrement, et qu’on les amplifie, ayant peut-être plus de place parmi les organes fondamentaux de ma carcasse ; accentuez donc ces zones en remplacement de celles devenues amoindries… Oui, là, d’accord, ce processus je le soutiens ! Et finalement, c’est peut-être une bonne chose, quitte à maigrir de quelque chose, autant maigrir efficacement même si nous devons nous passer de ces emplacements, donnant ces fonctions dont vous ne trouvez plus vraiment l’usage.

À la réflexion, cela s’avère une chouette solution de ne s’encombrer que des éléments essentiels et pour les déterminer, nous devrons bien vivre un temps pour comprendre ce que l’on doit laisser ou garder ; vous ne pouvez pas le décider à vingt ans ! À vingt ans, on ne sait pas ce que l’on fabriquera dans quarante ans… Alors ! Finalement, je me suis convaincu moi-même, à propos de ce rétrécissement, qu’il ne perdure pas trop tout de même ; je pourrais malgré tout me vexer… encore une fois, et à nouveau chercher à me persuader que ce n’est pas bien grave… Voilà cette digression étant terminée, je m’en vais finir ma balade ce soir… À la prochaine fois !