(version 2 janv. 2015 à 1h38)
—> premier montage des textes primitifs du « premièrement »
—> non corrigée
Avant de lire,
les paroles écrites ici ne prennent leur essence que dans une lecture à haute voix, avec rythme et déraison, il y faudrait de la folie aussi. C’est un théâtre de propos amènes rugueux et doux, inspirés de la vie de nous et de ces arranges nerveuses, notre risible existence où l’être se croit tour à tour, Dieu, sot ou peureux. C’est une harangue, un dire comme il peut, une envie de mettre, une jubilation du mot, de la langue aussi, puisant au plus profond de la mémoire acquise et de ses lambeaux, celle de celui-là, mouè, le diseux, pauvret bonhomme, s’élointessant, pas à pas, petitement irrémédiablement. D’ici, il n’y a pas de hauteur, on ne voit plus la rampe ni des éclats qui musardes au travers d’une caboche encore mouvante, un esprit encore le hante et dès son approche, vous feriez mieux de poser ce livre, il va vous déraisonner, votre enthousiasme va en prendre un coup. Il n’a pas bonne presse, cela va vous prendre un temps de l’admettre ; alors, faites donc attention si vous persistez à l’idée, même infime, de continuer le parcours de cette lecture.
Vous voilà prévenu…
roman
tourments
naufrage
envies
et
espérance
d’un autre
lui
prolégomènes
İpanadrega était un enfant irréaliste, né de la conception de son maître, improbable et sans émotion. Du jour au lendemain, il devint un de ces monstres d’envie que le monde redoute et son créateur n’eut de reste qu’un désir, le voir détruire le château de sable de ses démons. ipanadrega n’avait de puissance qu’un pauvre esquif, à peine cette force des muscles qui vous fait casser de ces vitrines où les masques tombent. C’était un idolâtre, un vent futile sans émoi, une figure de style, une arabesque sans bons sentiments, une vague aubaine… Jadis, dans les contrées du bout du monde, il se racontait qu’un étrange être eut ravagé les terres australes à coups de bottes et de chagrins. Les poseurs disaient de ses méfaits « ce sont de viles digressions faites de gestes impromptus », précieux mots inattendus qui ne vous donnent pas le moral… C’est que d’inconnues engeances en ont gardé mémoire, à travers des romans alarmants, écrits tout le long des vastes hivers. Des sortes de paroles rocailleuses, faites de rien, faites de peu, de très petits souvenirs, des soucis surtout, enfin c’est ce qu’on en dit, cela n’est pas très clair, mais malgré tout, anime le vaste monde et l’ennuie assez. Vous pouvez en rire, ici… et là… (il les montre sur une mappemonde et s’en va.)
ipanadrega a vu tout cela. Il n’en tire aucune fierté, car c’est un enfant au cœur rejeté qui voudrait vivre, ne serait-ce qu’un été, la mine réjouie des innocences claires où brillent des fontaines de « flots bleus », c’est son imaginaire un peu désuet. Il se voit dire « c’est merveilleux ! » et vous écouter tout son tralala de mots mielleux ou futile, dire qu’il adore cela… Qu’il soit bête ? Non, niais certainement, un peu. C’est qu’il aime ces mots sirupeux au romantisme bidon qui vous donne de ces « allures ! » Évidemment, lui, n’ose point le panache, il se croit sot et s’illusionne donc, dans de savants apprentissages, corrigeant sa prose. Aussi, il a gardé un rêve ou deux au fond de son placard, une horrible et sombre cachette, qu’il protège fiévreusement, la main sur la gâchette. Faites donc attention à ce que vous dites.
regret
D’ailleurs, il regrette les anciennes vacheries des semaines passées, à s’agacer de jour en jour, en de vains propos, sur la limande étroite de ces entrefaites ; c’est qu’il a les idées plates, un autre de ses méfaits, des plus déplorables, des plus indécollables, sa joie ! İpanadrega a fait des rêves de son regret. La tristesse l’inonde dès que se pavanent tout autour ces cœurs de l’ennui, alors qu’il voudrait tant chanter, avoir une envolée lyrique, s’élever d’une manière un peu magique et faire chavirer le frêle esquif… Il est né d’une rumeur d’estomac, celle de son géniteur, et du tourment, celui qui s’immisce dans ces hauts du crâne que le cerveau dessert quand, au fond de la nuit, vient d’apparaître le début d’une insomnie, une humeur de plus à son chapelet aventureux, une autre goutte de pluie, un ciel humide et un mal qui ronge, comme la fuite douce et continue d’un univers dépenaillé, sans cendres ni reflets, une musique s’insinue, un souffle prenant et discret à la fois, une misère dans le noir, jusqu’au matin enfin, ivre de fatigue… Des ondes métaphysiques l’inondent. Avec au visage, le rouge et des pommettes luisantes ; il rêve d’une femme, comme d’une figure de l’amour et s’agace à des désirs qui s’évadent bien vite hélas ! Navré… Il a réussi à alpaguer, malgré tout, une émotion ou deux, son remède à l’ennui systématique. C’est en cela que vous le trouverez très enchanté aujourd’hui, comme certains jours, il a passé une nuit sans colique… Certes, İpanadrega n’a pas connu le regard de l’ingénue, cet idéal magique, ni son souffle, ni son sein, ni ses reins, ni la besogne des envies et de l’instinct. Sa verge sent le moisi et ne s’engorge que de pertes d’eau sale. Ce n’était pas qu’il fût vierge, mais cette raideur ici, ne l’inspire plus et les mouvements de chairs, ces remuements frénétiques, le répugnent… Les embrassades aussi l’incommodent le mélange des haleines la sueur érotique des matins froids n’est plus le même rêve narcotique qu’à ses vingt ans en fait, il trouve que sa vie c’est de la merde !
tranquillisez-le (in adloquatur)
Oh ! Ne vous moquez pas de lui, n’apportez aucune médisance, aucun défi. Hé ! Sinon qu’arriverait-il ? Une humeur inappropriée, un geste qu’un instinct très offensif lui ferait regretter. Alors, au lieu de le quereller, donnez à ses abattements, de doux chants, montrez-lui de belles images à ses yeux enfin réjouis, qu’alors il musarde son regard esseulé sur la chaude nuit d’été, un verre à la main, la mine alanguie, le front enrubanné des idées du jour, à la recherche d’un extraordinaire moment où il pourrait faire de l’amour, son ultime destin ! D’ailleurs, pourquoi faudrait-il constamment écrire des récits de haine et de violence, alors que se prélassent de frénétiques oripeaux au creux de vos vilains mots ? Il aura toujours une tirade d’avance… Voyez-le, il soliloque avec ce verre devenu une vasque aux mille propos, et ce n’est pas un dé à coudre qu’il tient là, il ne recoud rien, mais peut-être un idéal tout trouvé, l’ivresse d’un soir doucement allongé, avec des impressions de paix au creux des reins… À cet instant, un vent frêle a instillé comme une sorte de température épatante, le sourire d’une muse qui veut faire mumuse avec lui… (je vous dis : laissons-les.) ipanadrega ne tuera point, n’en faites pas un assassin. Il s’ingénie à imiter les gestes d’une femme, y retrouver toute la grâce, la volupté et les sentiments qui vont avec. Ne criez pas son nom, cela le ferait partir, inonderait les commodités de la rue, vous escaladeriez avec hantise, la peur au fond des yeux, les fenêtres des rudes immeubles à la texture froide que sont les cités d’aujourd’hui, ce serait bien d’inutiles tracas pour vos extrémités surprises. Laissez donc le mouvement libre à ses membres anodins, pour une fois qu’il parade, si cela l’amuse, ne vous en offusquez pas, ce serait idiot, pas bien malin, ce n’est qu’un songe, un être imaginaire, un passant, que vous croisez. Oui, les mots en ajoutent et se rallongent, les faux-fuyants et les mensonges sont la rançon de sa gloire encore inconnue. Il flirte avec une femme au cœur méprisable, on a mis la beauté à sa table et il tente un régal, la serviette autour du cou. Chut ! N’ébruitez pas tout… Aujourd’hui, İpanadrega a vu « l’Aurore » de Murnau, ce vieux film muet fait d’images oniriques, et cela l’a réjoui. C’est alors, estimant s’être instruit de l’ancien, bien plus qu’il n’en faut, il eut un désir de doux homme, à moins que ce ne soit d’un doux somme ? Mais qu’importe, puisqu’il n’est que ce rêve, laissé au mois de juillet sur la plage arrière d’une auto négligemment garée et que par la vitre cassée, s’en est échappé pour s’évader dans les bras d’un sommeil mal barré… (Nous le sommes aussi.)
metaphora
« Ta métaphore est ta physique ! » Lui hurle, un idolâtre, un sophiste de plus à son chapelet d’aubaines creuses et incertaines. Cette fois, cela le saoule. On veut profiter de lui, il est la risée de tous, son tourment. Des gens ont lâché des fadaises que l’on ébruite trop à son goût. Sa voix déchire les âmes les plus douteuses, on a brisé sa mélancolie, il enrage ! Vous parliez des peines et des désastres, lui n’abordait que le cœur de son envie et le rêve qui allait avec. Il n’a pas osé monter sur le pont de ce navire en perdition, pour être ce brave capitaine sauvant des vies, qui, pour la frime, porte galons et veste d’apparat. C’est un modeste ! « J’ai su toute de suite ce que sera ma délivrance et je n’ai cherché qu’à l’atteindre », disait-il au témoin de son drame, car il y en avait bien un, en somme, cette petite dérive de l’inconnu, cette peur des découvertes, des déconvenues. Sauter d’un train à l’arrêt n’est pas bien difficile. C’est quand il avance, à vive allure, que cela pose un problème de survivance à celui qui se jette au-dehors, avec l’idée peut-être, d’un éventuel suicide ou d’une évasion impromptue du sort ? Mais pourquoi donc se laisser tomber, alors qu’il suffit de voler ! C’est tout de même effarant de ne pas y avoir songé plus tôt ; c’est comme perdre l’équilibre sur la rambarde du pont, idiote situation. Écarte donc les bras, tu es un « oiseau », même si ton vol ne dure qu’un instant de raison : « La délivrance des airs est d’une ivresse incommensurable », pense-t-il avec l’amusement d’une enfance retrouvée… Si vous interrogez sa mémoire, il vous récitera sûrement toutes les histoires qu’il a engrangées : la magnifique aventure des déserts de sable, au fond de celui-là, de Gobi, ou la douce pente au bleu profond d’une vague immense se finissant en déchirure, sur la falaise du rire idiot de ce mercenaire abruti par les massacres des vies qu’il a monnayés l’autre nuit ; des aubes assassines autour de lui… Il vous en dirait tant et tant, sa parlotte est l’esclave servile de son imaginaire. Mais rien ne vaut le souffle du vent dans le vide aérien d’un vol plané interminable, voyez-vous, glissant paisiblement avec insouciance… rien ! Ne lui parlez pas des dimanches où, retiré de tous, ayant acquis les plus profonds rêves qu’un être puisse atteindre, il dort pour se reposer des hommes. Il s’engorge des délires divins que sa mémoire vous délivrera probablement plus tard, un soir illuné et magique du beau mois de mai, comme une bonne fortune, sous la printanière feuillaison des arbres du jardin, tous assis, l’écoutant vous raconter cet éternel recommencement, à chaque fois repris et augmenté par des savoirs accumulés de siècle en siècle, ce qu’on appelle « la légende éternelle ». Et pourtant, İpanadrega vous dira : « je suis vide ». Sa carcasse est absente, il n’est rien, cela n’a pas de sens. Il est traversé de toutes parts, de tous les mots du monde qu’il lui faut rassembler et disperser encore, dans un ordre nouveau ; le devoir de conter d’irrémédiables légendes devient son fardeau. Il rumine mille fois une thèse peu ordinaire, faite de tracas et de chambardements, du terrible au meilleur, avec au milieu, des récits incertains. C’est un jongleur, un illusionniste, mais ne le lui dites pas, il s’évaporerait aussitôt comme ces oiseaux perdant le nord, au vol alerte et court, par petits bons… Hop ! Hop !
insomnia
songe
cauchemar
chimère
fantasme
soyez
indulgent
Dans les rêves endormis pousse d’étranges êtres venus de lointains horizons d’où l’on ne sait quelle guérison ils ont apporté. Un murmure doux et profond trouble les nuits d’un abandon généreux, les souffles disgracieux de ces créatures qui reposent, un temps heureux. Un songe délicat travers leur sommeil… à moins que ? ipanadrega serait né de tout cela, les songes, les cauchemars, des divagations les plus variées, fruits d’une grande imagination et de voyages dans ses hallucinations…
***
Mais trouvant comme un embêtement dans ces hésitations et qu’il était ébloui de son émoi, comprenant très vite ce qui faisait son agacement, alors, pour la beauté du geste, il fit relire à l’auteur le début de ces quelques lignes, et lui demanda de réécrire ce paragraphe qui l’insatisfait. – Je me mêle peut-être de ce qui ne me regarde pas, mais vous avez un loup noir au creux des yeux et je vous trouve bien distrait en ce moment… Peut-être feriez-vous bien d’appeler le fossoyeur. Qu’il enterre vos mauvais mots et je sais votre talent capable d’un mieux… Mais ici à cet instant, dans vos dits, l’esprit de moi n’est point là. Je vous avais pourtant demandé de tout mettre, le vrai comme le faux, les mensonges et la vérité, que l’on s’abreuve à satiété de l’idée de moi sans gêne ni pudeur. Faite place… Je vais vous dicter.
debentia dici
Dans ses rêves, à moitié endormis, pousse des êtres étranges venus de lointains horizons d’où il ne sait quelle malédiction ils ont importée. De ces illusions charmantes il n’en reste presque rien, seulement quelques tourments auxquels il ne tient, ainsi qu’une vacherie mélancolique qui lui égratigna un peu la joue, au réveil. N’en persistent à peu près aucun de ces songes délicats, du remords, des pertes et des fracas. Innombrable est sa fuite et de l’ennui qu’il régurgite une seule idée résiste, il la laisse tout de suite dans un coin, auprès des pensées, pour la faire resurgir à la moindre envie d’y revenir ensuite, il aime les taquineries accorder à son âme, le désir de l’humiliation…
Ce qu’il faut dire
vertigo
Aux grands rêves abracadabrantesques il a renoncé, ainsi qu’à l’image obscure du prestige qu’il s’était donnée. – Je vous pardonne ! Je sais que vous êtes passée l’autre soir, ma douce envie, d’entre les sommeils, étalée à mes désirs fous… Vous avez exhalé une clarté d’aube fine jusqu’au bout du jour. Ironiquement, avec un éveil chanteur à l’allure fière et sans trêve, vous m’avez lavé le cœur et puis le reste. La lumière apparaissante inonde ma rancœur ; je suis à bout du monde. – Il dit n’importe quoi, ne l’écoutez pas ! (Ce sont des adeptes du « bon droit », des étouffeurs de feu, qui reluquent son envie et voudraient que l’on raconte cette histoire autrement, il n’est pas de cet avis !) De là viennent les vertiges, et des élans soporifiques par instants, le doux rêveur s’ingurgite des façons de penser et des sortes de matières à usage prohibé que nul être ne connaît ; son jardin secret à peine dévoilé. Sans être nauséabonde, elle a sur lui des effets que certains diront néfaste, mais une attention profonde montrera à la curiosité du visiteur, une vaste cuisine faite de savants mélanges qu’il cache à la vue de tous. Sa pitance, maigre condiment, a des allures très spirituelles avec des opinions survenues de tous horizons, saupoudrant les mets à la manière des épices les plus foireux de la création ; et dès lors, cette substance se frelate comme un repas pourrissant d’avance… mauvaise nourriture ! Ce sont des troupeaux atypiques qui ont crapahuté de monde en monde, sur des barges de gros, mêlés à des blés immondes, ne pouvant plus être farine à pain, voguant longtemps dans les soutes à charbon, puis étalés sur les vastes zones des caravansérails avant d’être charriés dans ces entrepôts de la mémoire où l’on stocke enfin les idées. Les vertiges viennent de cela seulement. « Un ergot satanique », disent les incultes. Il a seulement laissé traîné trop le temps avant de les employer, ces condiments à l’idéale devenus putride, à la saveur indécise, l’ont rendu fatigué de l’attente. Alors, elles se sont entassées, certaines ont fusionné, on en a volé sûrement, d’autres, évaporées au-delà du doute, nul ne sait et certainement pas lui… Quelles idées ? À son double il se confie souvent, menant une lutte éprouvante parfois, pour prendre les devants et imaginer ce que sera le temps plus en avant. – Je n’ai pu vous voir, je sais, je vous en donne du tracas, n’est-ce pas ? Comment me mettre au pas, vous dites-vous ? Vous riez comme un soldat, le caractère vous va comme un fusil que l’on changerait d’épaule et des miettes sur la table témoignent de votre fringale tapageuse, ces nourritures bien grasses ingurgitées trop vite et sans faiblesse ; vous butiniez les quelques restes ? Je vous les laisse volontiers ! – À cause de cela, je me mets à l’abstinence pour perdre ces kilos de l’embonpoint inutile qui me mutile. On vit de trop d’abondance ici, oui souriez, j’ai découvert le remède dans cette diète austère qui me convient si bien !
malitia
Oh, il vous en donne du souci, vous la justice de ses ennuis, sa conscience désapprouvée à la volupté trop éveillée ; elle ne lui apporte aucune envie et vos épanchements ne font rire que les souris.
Vous dites,
– Trouvez un travail, occupez-vous à des tâches non aimées, c’est une corvée qui vous serait salutaire.
Inévitable, cet ennuyez-vous ?
Un gros doute s’installe, vous l’avez agacé ! Et voilà, de cette chose inéluctable, il n’en accepte pas la musique.
– On ne m’achète pas et je ne plaisante encore moins face à vos tralalas mondains qui en ont filouté plus d’un.
Il sent la pauvreté qui vient lui faire toutes sortes de misères, et sait que vont arriver certains, pour lui conter un drôle d’air…
Vous dites,
Mais que cet homme est seul !
On ne le voit avec quiconque
ni dire du mal à quelqu’un
ni dire du bien c’est certain
ni messe basse, aucune hélas,
loin des filles
loin des femmes
loin de nous
loin de tout.
Mais que nous cache-t-il
cet homme isolé
un mensonge ?
Un de ces secrets inavoués
qu’une fatale presse
aura vite fait d’étaler.
Médisance !
Ce sinistre propos prédit l’idée encore vague d’une rumeur, l’émergence risquée et spontanée des vermines mal lavées qui prolifèrent invariablement dans ces esprits peu instruits de la bonté possible du monde ; il faut qu’ils salissent pour s’approprier un bout de votre être, en tirer la substance de leur force qui vient de naître. Leur joie ? Faire de la peine à ceux qui ne vivent pas comme eux, et de la sorte ils y voient des lépreux, là, ici, partout, pour vous faire fuir… Ce qu’il y a d’étrange dans l’étranger, c’est notre peur au-dessus de tout ! Fatale amie qui rôde avec l’inconnue… C’est comme la beauté d’un geste simple, une pomme tendue dans un papier essuie-tout où elle fut décrassée puis essuyée. Fruit des discordes et fruit que l’on donne par abnégation. Le temps aura toujours raison de nous.
studium
choses
savantes
et
choses
navrantes
dedans, studium in interna
Curieux de tout, il a fait de savantes études du dedans de son crâne et y a trouvé de terribles incertitudes où crèvent les tenants de votre ingratitude. Puis lasser de cet intérieur cervical, la mine réjouie, avec des élans soudains et brefs, reprenant des jeux d’enfance et puis d’autres, comme un intermède, il envisagera d’en sortir peu à peu, y voir tout autour et peut-être qu’un jour, il décidera de parcourir les lointains horizons…
***
Savez-vous, il brûle au dedans et aucun ne s’en doute, il fait semblant avec un air de rien du tout, somme toute ; mais quelle misère ce feu en creux, il l’inonde, le broie, le consume, il résiste encore et combien de temps cet encore là va durer ? Les murs de son antre ne cessent de lui murmurer des arranges pas fameuses. Mais qu’ont-ils vu de si prenant pour assaillir autant ses rêves, ils ont une mémoire bruyante et ne sont pas sages avec lui, c’en est à vouloir partir. Parfois il a honte de ces humeurs et le sang coulant dans ses veines, lui, ne peut que rougir, c’est sa raison d’être.
Pourquoi donc le rouge est-il la couleur du drame ?
Qu’il faille des chairs éclatées pour y répondre,
alors on en fait tout une tragédie,
cet illustré devient très décevant.
Il a prié en mécréant, il a gueulé de toutes ses dents et à peine pleuré, juste une sueur pourpre c’est installé, un tir mal barré qu’il a enfilé par mégarde un jour de grand froid où ces hivers lui sont de plus en plus pénibles, il y perd à chaque fois plus qu’une dent.
Hier ce fut une oreille, une jambe blessée, un rein, aujourd’hui le bras cassé, demain la tête lésée, on finit toujours dans un drôle d’embarras.
Il le sait, ses humeurs ne sont pas risibles et le ciel noir aux vastes soirées étoilées ne lui en porte pas rigueur, celui-là même, qu’il inonde par millier des propos dithyrambiques, inlassablement récités jusqu’à ce qu’une haleine fétide l’arrête soudain, avec cette bouche pâteuse des bla-bla innombrables qu’il faut laver.
Il s’invente au moment du sommeil des histoires inévitables qui empêche de dormir, c’est toujours pareil, c’en est à vomir, laissées lui au moins de quoi faire une pause et quelle fatigue énorme faut-il asseoir, pour une heure d’un bon repos ?
Doit-on l’assommer ?
Il a renoncé aux drogues des médecines que l’on ingurgite sans réfléchir.
Il songeait à ce savant bizarre, un jour écouté, qui parlait de ces médicaments nés des sécrétions naturelles du corps et de l’âme…
On ne veut pas d’un être autonome, cela ne se fait pas, c’est d’une indécence civile, il faut que vive la manne médicamenteuse et industrieuse, le soin « pilule » nourriture de nos angoisses et de nos tourments, voilà la nouvelle richesse de cette époque !
C’est l’insomnie qui lui dit d’écrire toute une nuit et penser,
– Qu’y puis-je ? C’est au-delà de l’ennui…
C’est au-delà de toute vie saine et paisible. Il a choisi des chemins tortueux, improbables et sans carte ni trace de quoi que ce soit. Tout est à découvrir, le moindre propos, la moindre envie, la moindre extase.
C’est drôle comme les tourments vous inspirent ? En comparaison, le bonheur est fade et sans saveur, stérile et insolent, il ne sécrète aucune imagination dans les têtes, quand tout va bien. Même cette phrase ne va pas bien. Tenez ! là ! rien que d’en parler tout devient d’un dérisoire innocent, futile, stupide…
Vite ma drogue ! Ma dose de tragédie, ma décrépitude, la pâleur dolente et superbe de mon rein qui m’en bouche un coin avec cette soudaine et terrible colique néphrétique, souviens-toi ma douleur, ce fut à se tordre dans des sueurs éclatantes, rhaaa…
Drolatique inspiration.
Mais oui, c’est risible, il ironise, la description tient de la farce, la souffrance méprisable est une garce et j’en passe, des myriades de sobriquets piteux à son encontre et lui vomir à la gueule toutes les morphines pillées dans les officines, pour taire cette douleur puante…
Nous sommes notre propre malheur, nous en faisons à toute heure une manière de vivre et vois avec quel acharnement nous nous entêtons dans ces guerres de toutes natures où la stupidité s’extasie et fait amie avec la connerie, où je dois mettre ces mots ?
***
Je pose mes notes comme de précieuses rédactions
que l’on trouvera un jour comme ça pour rien
riront ceux-là les découvrant d’un geste hautain
diront : il écrivait cet homme-là pour les chiens
les jetterons mes mots en pâture à la meute
avec dédain auront joui repus de l’émeute
***
Quand İpanadrega s’essaye à la vie des hommes, très vites, il s’engorge dans des phantasmes d’être fou, s’active en une savante étude imaginative qu’il écorne à peine née et râle sur la rampe de ses idées, d’infernaux propos mal barrés…
– Chers amis de l’ombre, bonjour !
Que faites-vous dans ces coins rassis, aux angles ambigus et noirs ?
Plus d’une fois, je vous ai vu, furtif, l’œil aux aguets, prêt à bondir sur votre proie, dénuée de tout embarras.
C’est que vous êtes sales et sans arrêt pénibles et toujours pareils, l’haleine au dedans, versatile et puante telles les rognures des poubelles dégorgeantes, celle-là même que l’on vide chaque matin dans ces camions à ordures de la grande ville.
– Vous avez la dent navrante, écornée et chancelante des êtres mal entretenus, vous bavez trop, c’est dégoûtant, vous êtes répugnants, l’odeur est fétide dans vos remuements gras et double, c’est vraiment désolant.
Je sais votre espièglerie et le registre de vos manies à me guetter souvent lorsque je repose ou que je dorme, vos ombres suspectes sont là et me narguent, je vous méprise quand je suis dans le plus simple appareil.
– C’est vrai que je suis ce « sans sommeil » toutes les nuits, s’adonnant au réveil hypothétique d’un cauchemar systématique, celui d’une vie très merdique et mienne, j’en deviens très bucolique, le rêve champêtre m’enivre jusqu’à la colique, on finit invariablement par y goûter un jour, à cette terre toujours par terre.
La nuit est devenue son royaume où il s’occupe à l’évitement de son somme, infernale écriture qui l’assomme…
Déjà l’aube ? se dit-il.
Il faudrait tuer le jour, le masquer à cette étoile toujours là-haut, mais qui en voudrait de ces jours ennuités, le monde ne serait plus pareil.
Alors, il s’invente une histoire de vaurien, vide les coffres pour de la misère et gueule à l’astre du jour sa nouvelle manière.
Au soleil, certains sombres amis sont venus me voir et se sont assis auprès de mes ombres multiples, pour leur faire diversion, c’est mon outrage, aucun détour possible, le jour me protège me dis-je ? Mais quand cela brille en haut, c’est les hommes qui à la place m’oppressent et veulent me faire rendre gorge, j’ai abusé de leur fric qui m’était tendu comme une tentation. Ils ont des manières, oh ! ma mère, teintées d’une justice de la force et de l’enfermement assez systématique, le ton n’est plus pareil maintenant, et pourtant, j’ai comme une vague idée… l’idée de mettre une raclée à tout cela, pour en finir une bonne fois pour toutes.
Vos saloperies c’est tout ce qui m’ennuie et je vous les laisse jusqu’au bout de la nuit, éternellement !
Voulant ainsi bouleverser les grandes légendes d’autrefois, il n’a pas tué la sorcière et le dragon. Dans une infinie mansuétude, la vie lui donna un indéniable talent d’orateur savamment ingénié en lui, au fil des ans, cousu par petits bouts dans sa cervelle énervée et pour qu’à la fin il puisse dire, « je n’étais pas si mauvais. »
Oui maintenant, il s’engorge de trop de mets des plus incertains, la mine déconfite, il braille de l’intestin. Il ingurgite trop de repas, certes, mais ce n’est que pour ne plus penser, ne point écrire le roman de sa vie, omettre une folie, éviter de terribles dits ! On l’a vu qui maraude par ici ou là, crachant toute sa verve et avec talent dénier, engloutir toute une dinde, avec des marrons chauds jusqu’au dernier rot et oublier sa liturgie, la messe est dite !
dehors, studium externus
Curieux de tout, il a fait de savantes études du dedans de son crâne et y a trouvé de terribles incertitudes où crèvent les tenants de votre ingratitude. Puis lasser de cet intérieur cervical, la mine réjouie, avec des élans soudains et brefs, reprenant des jeux d’enfance et puis d’autres, comme un intermède, il envisagea d’en sortir peu à peu, y voir tout autour et peut-être qu’un jour, il décidera de parcourir les lointains horizons ?
***
C’est alors qu’il a fait de sévères études du dehors de son crâne et y a trouvé les effrayantes rumeurs d’une peste future qui refroidira toutes nos âmes ; une terrible légende est en train de naître et d’un œil darne, il implore à sa raison de bien réfléchir à ce qu’il faudrait bien faire en ce bas monde pour être ne serait-ce qu’un jour, qu’un instant, un soleil, dans les tourments qui le damne, y lire une histoire ou d’y voir clair un moment, devenir lucide ici là et reposer un peu ensuite…
Dans des bibliothèques pourries où traîne comme un léviathan, des manuscrits pas finit ou peut-être oubliés, ou encore d’auteurs dépenaillés, a qui l’on a obligé de mettre des mots au portemanteau et puis fermé la porte…
« J’ai vu, improbable ennuie, ma raison vaciller sous le joug des prêcheurs, moqueurs. J’ai vu et bu. J’ai vu et lu et me suis enfui effrayé. L’étude était trop austère et les maîtres peu Professeur, de cyniques orateurs à l’horaire bureaucratique… Pas bien malin, j’ai couru au-delà des salles, sous le soleil, puis la pluie enfin, jusqu’au moment propice, inévitable, de l’ennui revenu et qui fait chanté ! Les fossoyeurs arrivent et je m’éparpille. »
« Courant, jeunesse vive en moi, auprès des filles, j’inventai une histoire pour les voir rires – que c’est beau le sourire d’une femme ! Mais d’indicibles petits troupeaux ont écarquillés mes yeux à la vague pleine, tout débarbouillé, lavé des sueurs du jour engrange en moi la rumeur d’un amour pas bien fameux, tant pis, c’est pour rendre heureux. J’ajoute un mot ou deux et puis m’en vais. Maudit vendredi gras ! »
***
Enfin lasser des autours de lui, la mine réjouie, avec des élans soudain et bref, reprenant des jeux d’enfance et puis d’autres, plus viles, comme un intermède, il décida de parcourir les lointains horizons.
Curieux de tout, étude du dedans et du dehors de son crâne accompli, après avoir trouvé les terribles incertitudes où crève votre ingratitude toujours tenue. Lassé de tout, la mine réjouie, avec des élans soudain et bref, reprenant des jeux d’enfance et puis d’autres, comme un intermède, il décida enfin, de parcourir les lointains horizons.
peregrinari
vous verrez
la fin est adéquate
Il faut vous préciser, avant de décrire son errance, qu’il fut découvert, à la fin du périple, semble-t-il ? Allongé sur le sol, inerte et sans vie apparente.
On l’aurait trouvé, plongé dans un sommeil immense, une léthargie innocente, ne sachant d’où elle fut venue, il était là, tranquille, étendu, apaisé, le corps en attente d’un verdict suprême, celui des hommes, celui de son destin, certainement, son sort allait être débattu.
Peu à peu, une assemblée, comme pour le veiller, c’est organisé tout autour, dans un grand calme, tout doucement. Puis, quand la réunion fut nombreuse, un ancien, très solennellement, prit la parole. Il disait le connaître depuis longtemps et dès lors une légende s’immisça à travers ses mots. C’est alors qu’un combat nouveau et étrange perturba le narrateur, il avait du mal à exprimer certaines phrases…
Il semblait bien qu’ipanadrega, malgré sa dormance, tentait de contenir les dérives du vieillard qui voulait inventer un mythe sur le champ. Et c’est à travers tout cela, que les témoins de la scène nous rapportèrent en détail, la drolatique histoire de ce moment des hommes.
Alors, comme la légende apparaît comme inévitable, nous vous dirons que ce sont quatre voyages nés de l’imaginaire, des sens et des sentiments.
vox – la voix
videre – la vue
sudorem – la sueur
cutis – la peau
vox – la voix
Vous dites
« la voix de son être l’accable »,
mais personne ne l’a entendue…
Parce que cela devait être ainsi, ipanadrega rencontra un errant, un pèlerin, vivant de croyances et de pêcher, là c’est son affaire… L’homme de peu, de rien, l’invita pour un manger et un repos, dans un cloître en-montagné où il ne put s’empêcher… Des songes…
C’est la première fois que je dormis dans un lieu aussi désirable, on avait mi le nord de manière admirable, au mieux des principes du jour, comme de nuit et des aurores boréales. Le lit très confortable, bien que petit, abritant juste un corps, mais cela suffit amplement à l’apaisement de l’âme. Ce fut ma bonne fortune du moment… J’avais vu en d’autres endroits, des paillasses moi réjouissantes, des couches amères où surgissent punaises et cancrelats, les salissures du désordre et de la misère.
J’ai longtemps médité des soirs jusqu’à l’aube, aux midis et certains matins, des jours sans fin, à m’occuper de peu, avec un pâle repas que l’on digère et se sente bien. Observer le paysage des flots, les brumes s’évanouir et ne plus penser à rien…
Au mont Athos où l’on dit des prières inversées pour tranquilliser la populace des grandes veillées de messe, un prieur ôte sa chasuble et donne le saint sacrement à la myriade des bienvenus, adoubés de la sorte par un Dieu inconnu des yeux, que le vin chrétien, le sang du raisin, devenu pour l’occasion sacrée, entretiennent la petite ivresse pieusement bue…
Voyez-le, ce soir
il s’est brouillé de paroles
avec une rencontre coutumière
les mots ont pris de la fatigue
et lui ont tapé dessus
des ragots et des obstinations imbéciles
maintenant,
il régurgite
il mal à l’aise
il mal au cœur
c’est pas l’heure
faut pas le déranger
il faut vous en allez,
mais pas trop vite
dite au revoir
assez lentement
Mélancolique et charmante, la dame du préjudice s’est introduite comme précédemment dans un à-propos, mais oui, que disiez-vous ? Oh trop rien, peu de chose, je passais par là et vous m’avez accosté, souvenez-vous, j’étais auprès d’un homme sans chemise, aliter et bien mal en point. C’était vous ! Au temps jadis, un microbe désœuvré avait vaincu votre élégance naturelle et le lit faisait de vous un bien beau malade pour la savante médecine, très accaparée à décortiquer vos viscères et dénicher l’intruse contamination qui vous pourrissait.
Ces jours-là, on a de noirs désirs et c’est le visage d’une enfant, un babil charmant qui vous ramasse un sourire délaissé et le porte à vous comme une douceur des îles, avec du lait de coco glissant entre les dents comme un réjouissement raffiné…
videre – la vue
Vous dites
la vue de son être me peine,
mais personne ne l’a vue…
ipanadrega a croisé, un jour excellent, un être accolé à une pierre, les yeux fermés, exposé au ciel et qui déclarait solennellement « vivre de lumière ».
Après le bonjour et l’accueil, l’homme peu bavard, ne se nourrissant que d’eau et de quelques autres liquides cachés, n’avait que du soleil au creux des yeux pour se donner un genre.
Il avait le teint blafard, comme s’il allait s’éteindre incessamment. De son corps suintaient ces mots : je vais te tromper !
Il puait le cadavre, malgré des étincelles dans sa vie.
ipanadrega, homme simple et peu instruit, songe :
Pourquoi donc renier ce que donne la nature, ses fruits, ses blés ?
Étrange être que celui-là…
Imaginez ! Vous êtes aux affaires et un grand pontife, vous asperge d’ordres des plus vils dans un mépris très énervant. Vous détestez ce dédain et encore moins les diktats. Vous vous dites, « il n’a pas la manière », cet homme immoral vous déprime tout le jour et c’est avec l’arrogance d’un seigneur que vous lui refusez vos dernières obéissances. Il en est surpris, au dépourvu il vous frappe et la réplique est cinglante, vous avez la répulsion des armes et pourtant résistez à son insolence.
Des grands paysages capricieux aux lunaisons exquises ont digéré sa course les soirs, fatigués par l’outrance du jour, il a mis beaucoup de nostalgie dans tous ses propos ; c’est que le monde l’étouffe, la nuit venue, une halte, le repos jusqu’à l’aube, ce n’est pas terminé…
Aujourd’hui, vous faites une prière
au temps qui ne sera pas
et pourtant l’était un qui ne dira plus
Aujourd’hui, la musique !
Aujourd’hui, des tonnes d’eau, la nuisance étale le haut qui mouille…
sudorem – la sueur
Vous dites
la sueur de son être me lèse,
mais personne ne l’a senti…
La sueur des matins froid.
ipanadrega visita une cité en guerre d’où s’élevaient des fumées innombrables et des bruits d’enfer…
C’était une ville de forgerons, toujours travaillant pour s’armer et s’entre-tuer en d’incommensurables endiablées, dès l’outil mortel terminé. C’est à celui qui aura trouvé le meilleur ustensile, de prendre la tête d’une milice et de vaincre les rues remplies des adversaires du jour. Aujourd’hui, c’est l’homme à la dague bleue, enduite d’un poison rare, qui gouverne la bataille…
On lui proposa d’essayer, avec un simple coutelas, de dépenaillé un passant attardé, du bord d’en face. Mais il ne fut point tenté, ipanadrega, c’est dit, ne tuera point.
Esprit pourtant effilé, vif et ardent, prêt à éventrer à la moindre incartade, le Maître des lieux, semble raffiné, joue du luth et s’habille aux couleurs de l’océan, d’un outremer très profond. Il aimait à dépenaillé l’adversaire, c’était une tradition, un rituel, une maladie, une manière de s’agacer.
Peu à peu, le temps a modifié cet usage, des gens trouvères cela ennuyant à force, on se lasse de tout et ce fut un jour ou probablement une nuit, dans l’embrasure d’une porte qu’un fin couteau acheva l’homme en bleu, son sang mélangé à l’habit dans un mauve éclatant, au deuil idéal, brûlé sur un bûché d’encens, comme pour se laver des crimes précédents, il disparut en se consument…
cutis – la peau
Vous dites
« la peau de son être est saine »,
mais personne ne l’a touchée…
La peau a des plissements changeant avec le temps
Elle se dérobe tout le temps
Enveloppe charnelle du bout des temps
La peau a des plissements charmants et changeants
Sac à viscères où des liquides sanguins s’évaporent et s’enveniment après les ouvertures impromptues des assassins
Aux aubes charmantes ou des corps ont macéré avec le temps
Des puanteurs moribondes du matin ont crachées leurs matières
Honteuses exhalaisons ou les peaux se révulsent après les lavements
ou la pose d’eaux qui sentent bons
un jour peu-être j’aurais la recette des senteurs inoubliables et éternelles
où les essuyages serait disponibles avec déraisons
mordre à pleine denture la chaire évanescente sous les enveloppes oppressantes
des monticules mouvants que sont nos vies
l’éclaboussure odoriférante comme une pisse navrante
invente un reflet par moment
après qu’un rayon en coin eût réfléchi avec brio sur la salive d’une pluie
notre misère nue et sans habit
la nuit des noces, explorer les ouvertures naissantes d’une envie
au fond d’un gouffre sans puits
Jugé comme on juge un esclave, le verdict sur son enveloppe charnelle était tombé comme une sentence incontournable. On s’étonnait de son apparence et qu’elle n’eut pu servir autant que son entourage le voulait. Le contact était invraisemblable, il n’avait décidément pas la manière commune des usages ni le plissement où le frottement des corps s’obère jusqu’à l’épuisement.
On avait du mal à le considérer comme un des nôtres, disaient-ils…
Il n’avait pas ce souvenir facile de l’enfance où suintent ces moments de tendresse dans les bras d’une mère. C’était, comment dire ? Comme une absence de ce sens : le touché. Les caresses maternelles étaient inexistantes dans sa mémoire. Il vivait cela non comme un handicape, mais comme une ignorance… Eh comment peu-t-on regret ce que l’on ignore, vivre cela comme un manque ? On ne regrette que ce que l’on perd et il n’a rien perdu. Dans sa mémoire, la tendresse n’a pas d’existence. À tel point que même si ce mot n’existait pas dans la langue, il n’aurait aucun besoin de l’inventer pour la décrire…
Il se souvient de ce poème entendu, d’un inconnu et qui lui donna un songe à ce sujet.
Souviens-t’en, tu avais fait un songe sur le sujet et un inconnu te raconta des sensations regrettées. Il t’en parla tout l’été, c’était son envie de vivre une émotion, avoir un apaisement, une épaule sur laquelle s’épancher…
Souviens-t’en, il en fit une balade qu’il t’a chanté, tu trouvais étrange son invention. Ta rudesse l’a tourmenté et toi avec ta gueule d’empoté, tu te moquais de cette « tendresse » si bavante et pourtant, si tu savais… Mais tu ne sais pas.
Mais peut-être, confondait-il avec « la grâce » ? Cette tendresse des solitudes du corps et de ces êtres où, indicibles, s’exhalent des soupçons d’harmonie et des emportements en communion avec la vie…
La tendresse
a des mœurs
bien bizarres
ce n’est pas
sa moindre tare
pour une fois
que j’y jette
un regard
de bonne foi
il me reste
les miettes d’un soir
quelle histoire !
La tendresse
est une nurse
permise aux grands
qui vous montre
les fesses en grand
quand sans honte
il n’y a pas
autre chose
à montrer, et voit
sa porte close
quand elle regarde
presser les cons
qui oublient son nom
La tendresse
vous caresse
ah le cœur
et puis le reste
même si ce n’est
pas l’heure
vous fait la fête
et sûr ! elle plait
je sais bien
vous lui offrez
des couplets entiers
en y pensant.
La tendresse
une paresse ?
une vaurien ?
on ne sait pas bien
qui se prostitue
comme ça
au coin des rues
et elle vous a plu
y’a pas qu’aux rois
qu’elle dévoile ses vertus
même au son
d’un accordéon
quand elle veut baiser
au fond
qui dirait non ?
ipanadrega était couché sur le sol, endormi pour faire un somme, dans ce qu’il y a du plus banal repos des hommes.
Il fit un vaste rêve où séjournait tout le gotha des plaisirs les plus fous, de la tendresse et de l’harmonieuse vie idéale.
Final éclatant !
péroraison
s’estomper
peu
à
peu
Voilà,
le voyage se termine,
İpanadrega en a assez vu
le jour du dernier souffle arrive
Il se dit à lui-même
Ayant vu le monde comme il était pénible et sans grand intérêt ! Ayant postulé à toutes les entreprises du genre humain, leurs facéties, leurs manières et leurs dédains. Ayant mille raisons de feindre, rire ou pleurer, toutes les humeurs ainsi explorées. Estimant avoir fait le tour de la question, de son sort et du rôle qu’on lui fit jouer. Avec une grande plénitude et dans la solitude la plus absolue, il décida de s’initier enfin, à la dernière aventure possible, celle des rêves éternels où tout s’évapore peu à peu dans une infinie douceur…
Je voulais vous parler de l’endormissement, de toutes les sortes de manières et de son endossement. Force est de reconnaître qu’il s’agit là d’une étrange façon, la chute de ses membres jusqu’au bout des reins que l’on enfile pour un rien, sa métamorphose et le vide qui lui va finalement si bien…
drôle ce monde où tout un jour pourri
ma vie s’en va nourrir les vers comacs
me suis beaucoup ennuyé
ils ne sont pas drôles ici
allons vieille carcasse
je te quitte, te dit adieu
m’en vais vers d’autres horizons
trouver un sens à ma raison
Et il se tut…
Aujourd’hui İpanadrega n’est plus
le vent l’a perdu de vue
chose entendue
J’ai cherché à prendre la beauté et la contraindre
J’ai cherché pareillement la laideur pour l’éteindre
J’ai brisé des chaines que je voyais, elles étaient pourtant irréelles,
mais on m’avait appris la croyance et le dédain
il m’a fallut oser bien des outrages pour atteindre
l’inaccessible envie de bien des hommes
et c’est avec une amère clairvoyance plus que de raison
que je découvris le fond mon âme dans des écrits
plus qu’improbables
et pourtant
j’y ôte une morale et un pâle dessin, derrière,
il est inscrit, sous la suffisance des mots,
au-delà des sens, comme une essence, un baume, une opale
la fraicheur d’un matin de mai…
Aussi, avant de disparaitre dans cet inexorable destin de l’être
aboutir enfin à la plénitude qui me vient
jusqu’à l’épuisement du tout qui fait ce moi
jusqu’à la dernière impulsion, la dernière vibration
du dernier de mes neurones vivant
à l’aube de mon grand voyage
où j’ai bâti une maison
dans un jardin
à l’abandon
je ne vous dis pas merci
Vivre ne dure qu’un temps, avant la naissance et au-delà de la mort, il est des mondes dont on ignore tout, mais que des bribes de matières à peine explorées, à bien y regarder, nous dévoilent certaines réalités. Sommes-nous prêts à les contempler ?
Dans d’autres mémoires, j’ai vu des mondes des plus divers et a pu comparer le vôtre aux autres. Il n’est pas forcement meilleur, ni plus heureux, ni plus orgueilleux. Il y a seulement les différences… qui sont le sommet de votre ignorance.
À cet instant, après ces derniers mots, je ne suis plus.
ajoutements
agrégats
ajoutements
autrement
dispersement
Comme il aimait se perdre dans les marigots immondes, il a tout essayé, jusqu’à mourir d’avance, avant l’heure ultime et ce fut tout le temps raté. Probablement n’y croyait-il pas, qu’il expérimentait, comme une répétition de théâtre et s’y voyait « grand comédien » en vous mettant en garde.
Sa jeunesse, il la raconte pour dégoûter, il a ce don extrême du drame, ce qui suit fut rapporté par des alcooliques en état d’ébriété, mais, au parlé exact et bon, des hommes de la vie vraie, endurcis par les labeurs sans soifs et la cravache du salaire piètrement gagné.
À l’adolescence, encore pubère, à la peau claire et douce de l’enfance finissante, il a fait la lourde expérience des attouchements sensibles sur les corps, sans timidité, et il eut une envie irrésistible de sentir comme une sueur après des jeux qu’il croyait interdits. Ce fut après cela qu’il s’imagina pouvoir découvrir avec un grand émoi, des sentiments et de l’amour vers son prochain. Mais, idéalisant trop son rêve fou, il y mit tellement de principes et des alinéas à n’en plus finir, qu’à force, une fois alors, pris jusqu’aux tripes, gueulant sa rupture à propos d’une idylle trop pudique, il pleura. S’illusionnant avoir trouvé une nouvelle manière d’aimer, c’est là qu’il fut désolé, c’était un être frelaté pourtant. Il ne le comprit qu’après les éloignements de la désunion…
Pour s’épancher, de cela il savait comment faire maintenant et navrait d’ennui femmes, amis, voisins, ennemis. Il en faisait toujours trop, le sentiment exacerbé jusqu’à l’outrance.
C’est dans ces méandres, que s’introduisis des malfaisants, émus de l’aubaine, n’y croyant au début, guère, leur calcules, les fit jouir, au passage, ils lui dérobèrent tout un pan de ses convictions.
– Dans la vie, on prend des coups et il faut parfois admettre qu’on le méritait bien.
– Que cela te serve de leçon, dirent les ingrats
– Cela va t’endurcir, pauvre idiot !
Croyez-vous qu’il entende cette raison ? Point de cette musique, la prière est métaphysique et la mélodie ne joue pas, elle musarde, elle se fredonne, mais on ne la perçoit pas vraiment, son corps est absent, la chose charnelle du devoir et des sens n’est pas présente, il en a oublié jusqu’à son essence, le monde lui reproche sa parure, son approche et des dédales de verbes sans attrait ni opulence. Alors frénétiquement, debout, sans honte bue, il rugit de vilains mots très méchants, c’est de là que date ses premières misanthropes.
Vous auriez tord d’être navré, le spectacle fait toute une notoriété de cet aplomb et en l’occurrence on ferait erreur d’en nier l’attrait qu’il suscita, la presse est si impudique, mangeuse d’embruns si merdique, avec des mots dans les articles, pour du scandale et du fric.
Voyez donc ! la place était pleine et l’on avait mi dehors, autour des tables, les célébrités et des notables. La rue apportait son lot de rumeurs, la musique était vaine et sans saveur, la production avait choisi des airs faciles, à la limite d’un certain mauvais goût, juste assez pour un peu capter une attention lointaine que les gens raillaient tout en buvant debout.
Chose charmante, avant tout, une troupe humaine à l’enfance des écoles débutantes, des gaminets aux habits tout vieillots que la tradition voulait que l’on portât, en hommage, pour la foire, à la république, à sa gloire, des chants patriotiques et des encensoirs de l’Église catholique traversant les rangées, fumait pour la rhétorique du prieur, sous la chaleur du jour, cet été-là.
C’est pendant le discours du grand pontife du lieu qu’il y eut ce scandale religieux : on avait cassé la croix et brisée en divers morceaux pour former à l’image d’un diable, la figure d’une faux. Étrange et redoutable présage du bedeau, qui auparavant les ayant prévenus de la tragique histoire, « elle est advenue ! » disait-il, les yeux exaltés, sortant des orbites, presque hurlant d’un mal pieux et heureux à la réussite de la prédiction, étourdie, devenu comme fou, priant, courant, pour enfin se jeter dans un puits avec ce « aaah » long et distant, finissant par un plouf final, noyé, dans une épreuve si durement payée… (Souriez si vous le voulez.)
Ce n’est pas qu’un rêve ou deux, mais bien d’innombrables nuitées à sommeiller péniblement dans les noirceurs d’une lumière absente avec cette angoisse du lendemain et des heures passées dans le vaste jour, au gré du soleil ou sous les nuages gris quand triste est la saison, la lueur invasive et prégnante qui pourtant donne à exister, la riche idée sur terre, cette musique des corps qui bougent sans cesse, de la mouche rustique au gros bifteck d’un hippopotame mourant, picoré par les vautours, la vie, la vie débordante et qui nous submerge salement.
Quoi faire des outrages de ce temps inflexible ? Vieillissant, va ton chemin, pauvre être enlisé et vivant, tu as beau mégoter une rallonge ou deux, de faux airs, de hardis subterfuges, la façon est trop douce et le flic t’a reluqué, illusoirement, que tu sois grand, béni ou des cieux en croix, pontife ou misérable, la métamorphose est inexorable…
Vous aviez enfilé un habit indistinct pour paraître insignifiant dans les foules et du public. Ne pas être observé ni entrevu, une chanson magique en guise de mot secret et hop ! le mouvement de vos cellules, la voix et sa vibrante éruption sur la rampe des couloirs, comme un chef, on vous suit des yeux, prenez garde que l’on ne vous attrape, ne faites pas le célèbre, n’érigez pas de trop voyantes œuvres, ne soyez guère talentueux, ne faites pas des manières, à quoi bon être reconnu ? Et de tous ces tracas, du : bonjour, bonsoir, vous l’avez aperçu, c’était lui, il m’a souri (regards croisés), il m’a demandé (hagard désolé) : Où sortir ? La fuite des autographes au bout de la rue… Infernal enfer de la star éperdue…
J’ai à vous proposer d’adorantes petites pestes pour vos bals et vos rentes et pour message, de ne point lécher les vitrines et de vous quémander à quoi faire de toutes les heures de ce jour…
…
« Tout ça, c’est du flan, c’est du style. »
C’est tout à fait cela, mais elle est gangrenée par une satanée recherche : l’inspiration. « Le style ! » c’est tout ce qu’il a, comment trouver la manière d’écrire son testament, la note ultime où tout devient sujet, dans son imagination : comment finir…
Le style ? Mais c’est tout ce qu’il lui reste, une dernière façon de mettre, une touche finale au tableau, laissé là, pour faire place à ce qui va naître, de toute vie, de toute mort, du plus profond de cette terre honnie ou adorée, que l’on rejette, que l’on reprend, il en revient enfin toujours les mêmes choses : cette vivante extase de l’esprit, les pires moments de son éveil où, navré, il entend tout, comprend tout, ressens tout, de nous, de vous, d’elle et lui ou l’ailleurs, on s’en fout !
Une myriade de mots tapageurs inondent son âme, faible ? Il le serait, s’il n’en tirait pas toute sa force, pour mieux rebondir, cet élan qui vient du cœur ? Il haït n’aime ni ne jouit de l’existence ni d’un autre lui ni du désir. Lasse ou enjoué, il fait d’une figure, ce style, à l’embrassade des allées, sur l’esplanade de ses idées, puis les ôte, les jette ou qu’il les replace, à tout moment, « il ne voudrait peut-être pas avoir envie de naître ? » Se trouvant misérable le jour et puis joyeux une nuit, et l’instant d’après s’éprendre d’une musique, un visage, une « madone ». Avoir un désir, une simplicité dans la vie, se sentir utile, être aimé, suivre son instinct. Ou encore, vomir le monde, ne plus le comprendre et mettre fin à ce que deviennent ces pirouettes, dans ce « style » qui l’inonde, l’appel du large et des côtes d’où il émerge, ameutant les lointains dans une engueulade avec le « créateur », pour la forme, pour le « style », encore une fois.
Cent fois, rajouter à l’ouvrage sa misanthropique quête, c’est de lui-même qu’il méprise toute emprise à sa morne existence, ni heureux, ni malheureux, ne devenir rien, à ce moment-là, précisément, il voudrait ne plus être. Mais la vie, qui le pourrit, n’en a pas fini avec lui, elle le forge et déloge ses idées noires, le temps d’un endormissement ou d’une fatigue, à un repos du corps… Alors il lui dit « tu me prends pour poire ? J’ai bien vu ton manège, là où tu me dis de mettre, comment je dois faire, comment je dois paître, salope ! »
Amour, ami, ennemi, voisin, chien ou chat, tous ceux qui vivent n’ont plus la manière d’enjoué son avenir. Le sort est trop pâle et les dés sont jetés, il n’a d’autre idée que pour une quête, un dernier râle, dans un final éclatant, être au sommet de son meilleur imaginaire, de son art indicible, il dit « ce n’est pas facile ! », mais qu’adviendrait-il s’il n’y avait plus cette possible extase du devenir ? Il serait depuis longtemps perdu, la chair mourante disparue dans le ventre des verres du pourrissement inévitable…
Une musique n’est morte que quand on ne la joue plus. Si elle vit dans les mémoires, c’est donc qu’elle vibre, elle existe ! Son chant résonne et peut-être inspire celui qu’elle étonne, son air qui détonne… Laissez alors une trace pour qu’un vivant s’en éprenne, s’initie et comprenne qu’il faille poursuivre, qu’il soit tenu de la finir, cette partition interminable, multiple et prégnante, mélodique sensation des éternels recommencements…
Il faudrait écrire d’une manière épaufrée sur d’adroites lignes mitigées d’où l’on ne peut s’enfuir. Avoir un verdict édulcoré sur la manière de mettre les ardents entonnoirs à la poutre, pour qu’on l’écoute et ne pas passer outre. Je sens votre ardeur quelque peu décontenancée ? Moi, je vous dis : il faut vous en foutre !
En ce temps-là, İpanadrega vivait de rentes qu’un vieil homme avait laissées ici sans gendre ni chien.
Comme la justice avait trop d’affaires à traiter, il ne lui fut rien demandé sur l’usage du bien qu’il avait emporté.
Et puis d’ailleurs, peu le savaient, les regards étaient ailleurs, le monde criait sa colique, le siècle commençait dans le fracas des armes – une habitude des rois : rendre gorge, se faire des ennuis avec des ennemis – la coutume n’a pas changé encore aujourd’hui. Lui a pris soin de se poser loin des heurts, loin !
C’est un prudent.
Il se souvint de ce jour où le corps réclame. C’était au fond d’une librairie, cherchant un livre à voler pour s’instruire, n’ayant point le sou. Il se leva du rayon, n’y trouvant guère de quoi lui plaire, un étourdissement s’empara de lui, il ne comprit pas tout de suite ce qu’il lui arriva, mais s’appuyant contre l’étagère, il saisit bien vite son état, il avait faim. La veille, quelques morceaux de sucre au fond de la boite firent son dernier repas, c’était tout.
C’était sa révolte, aux petits matins froids, dans un pays d’abondance, il avait faim pour goûter à cela, parce que c’était son choix à cette époque-là. Idéal de bon teint, qui sied à d’artistiques idées, l’anarchie jusqu’au bout du nez, sa misanthropie n’était par encore née.
Ne riiez pas à l’abondance de sa bonté, il n’en a pas, vous n’aurez que du dédain. Voyez plutôt un être étrange s’emparer de lui et faire fuir plus que de raison la soif malsaine de son regard, il englobe tout. Tant que fuse un rayon de lumière, ses yeux hypnotique mémorises la moindre nuance, la couleur de cette ombre, le flouté d’une brise dans la ramure des nuages et du ciel.
La mémoire ! Voilà le dessin, voilà ce présage, voilà cette volupté acquise où s’égrènent l’esprit, la manière apprise jusqu’au tréfonds de lui. En haut de sa tête, comme un mirador guettant la moindre mignardise de ses entre faits à moitié mûre, à moitié défaits des laideurs du jour, un chagrin de plus dans la raideur de son cou.
J’ai de jolies entremetteuses qui me fond rire la cervelle et oublier qu’hier vous aviez un dédain à me flanquer le moral par terre. Ce n’est pas comme cela que l’on arrange mes affaires. J’ai la honte au front quand vous dilapidez vos maux devant les assemblées vénéneuses de vos soi-disant beaux quartiers au fric fou et dilapidé avec indécence d’une manière très rupine, j’exècre cela en vous, et de vous à moi, j’y mets le holà !
Le détachement.
Il savait que toutes les fêtes de la vie n’étaient pas pour lui et aucune marque ni empreinte de bagues ou colliers n’ont sévi sur son corps. Les réjouissances et les vacheries ne l’attachaient guère, sa joie était une infinie solitude et une observance des dehors et des dedans, sur la berge des ravines du temps. Sa bête illusion d’un autre que lui.
Il se voit comme de cette vie observante d’elle-même et qui s’interroge du cheminement de ces neurones et comprendre pourquoi donc le règne du vivant se cache à lui-même tous ses secrets, à tel point qu’il faille inventer les hommes, qui n’ont de cesse de vouloir en percer sont mystère et sa raison, « quelle étrange chose ? » se dit-il.
Du règne, il n’en sait à peut prêt rien, juste ce qu’il faut pour lui trouver une énigme et des raisons d’exister.
Ne voulant au final, ne laisser aucune trace en brulant tout ce qu’il avait fait jadis, avant la mort inévitable. Il aurait voulu être exceptionnel, il n’est que banal à ses yeux et c’est déjà trop.
Il est né nu, il finira tout aussi nu.
Il voulait dire se qu’il éprouve, du temps et de cette vie qu’il lui a été donné. Il voulait écrire « bien malgré lui » à la fin, mais des emportements de son humeur maussade l’en ont dissuadé. Les discours et les bravades sont un soliloque éloquent de sa parade, il se voit le grand renier de ce siècle dans le comptage du temps des hommes…
Comment peut’on écrire autant des tristesses de l’âme et des sentiments, « cette vie n’est pas mienne », crache-t-il à demi-mots dans son purgatoire aux idées obscures. La métaphore quotidienne et le laissé paraitre l’obsèdent ; « il faut être sociable et jouer d’amitié avec des êtres semblables de cœur et de sens… ».
Ne jouez pas au plus fin, il vous dira comment faire et défaire cet écheveau qui ne vaut rien. Voyez cette figure qu’il allonge dans les reflets des miroirs aux mensonges qu’un soir invité inextrémiste, il donne à la littérature sa maladive contracture. Il épouse le verbe et rumine la faute expressément pour contrarier le langage et ses excès. C’est une petite maladie pas très grave qu’il enfile les jours désagréables pour se faire plaindre et exulter de la farce. Il endosse sa maladive perfidie comme une extase des meilleurs jours, il rupine d’aise à la figure agacée des indigents qui l’inspecte.
À chaque milieu son langage. La bourgeoise entrevue dans un monde hautain et friqué ou l’imprégnation fumeuse des truands dans les bas-fonds, ou encore la cheville ouvrière bafouée dans l’usine qui vient de fermer pour cause d’actionnaire. Tu dois flirter dans tout cela et résoudre la parlotte adéquate, sous peine de rejet : t’es d’aucun monde, tu ne fais qu’enfiler une allure de passage pour l’entendement ou la rébellion. Faut revoir ton style ; bonhomme !