(parole en marchant – 26 juin 2019 à 19h17)

—> 2. « petit chemin » :
—> durée : 52’22

à 0’01 discussions d’oiseaux (quels sont vos noms ?) ; à la fin du sonagramme, le chant d’un Pinson dans l’arbre Pouillot véloce…

1’24
› Il fait chaud ! C’est ce que me dit l’oiseau !
› D’accord ! Mais moi, j’ai pas encore chaud, vraiment, je viens d’arriver, je ne suis pas encore essoufflé, mais ça va venir !
2’19 (il tousse)
› Ça y est ! Les moucherons sont emmerdants, ils se mettent partout, ils vous guettent… Si vous n’avez pas mis les produits (répulsifs) qui vous intoxiquent autant qu’eux-mêmes, vous, il vous faut de grosses doses pour que vous en pâtissiez de ces produits chimiques ; (pour) eux, la dose est infime pour qu’ils s’écartent un moment (ou périssent éventuellement). Mais le lendemain, après lavements, vous voilà bien démunie si vous avez oublié le produit, voilà…
› Tout le monde croule sur (sous) la chaleur… « Il fait chaud ! » ne me dit pas l’oiseau, ici !
5’14 (il s’arrête de marcher)
› Où sont-ils ? Je les entends à peine… le silence !
5’32 (il reprend sa marche)
› Je vieillis, j’ai mal au genou, serait-ce la chaleur… tenterait-elle de me faire vaciller, déjà ?
6’45 (les chants d’oiseaux reviennent, il s’arrête à nouveau)
7’23 (il reprend sa marche)
7’47 (il s’arrête à nouveau pour écouter le chant des oiseaux)
8’16 (il reprend sa marche)
› « Il fait chaud ! » ne me dit plus l’oiseau…
› Que dit-il alors ?
› Il dit qu’il a soif.
› C’est donc qu’il fait chaud ?
9’39 (il s’arrête à nouveau pour écouter le chant des oiseaux)
› L’air fait trembler la lumière…
10’19 (il reprend sa marche)
› Ce sont des harmoniques, de la vibration calorifique qui tremble à des fréquences très basses…
11’00 (il s’arrête, écoute le silence et reprend aussitôt sa marche)
› Ah ! Ici, trois petites souches, où je vois les petits Hêtres reprendre (d’une pousse) au-dessus (de) leurs ancêtres ; eux aussi ils souffrent, mais ils sont bien à l’abri de (sous) leurs aînés qui les protègent, hein !
(il s’approche à côté de celui qui est le plus près de l’allée)
› Ne pousse pas trop près du chemin, car ils vont t’embêter, les deux-pattes du coin ! Je te le dis à chaque fois, m’écouteras-tu ? Je sais que ma voix ce n’est pas une vertu, j’en fais partie de ces deux-pattes, sans être le plus pire (mauvais), j’en suis un tout de même ! Protégez-les, ces petits, qu’ils grandissent sur les choses… sur les souches de leurs aînés, même s’il fait chaud, il faut les aimer, ah eh ! rimes faciles !…
› D’ailleurs, qu’est-ce que ça veut dire « aimer » ? Ce signe d’une exclusivité que l’on accorde à ceux avec qui on a une affinité pour créer des barrières avec des mots, qui embarricadent les affects. « Toi ? Je t’aime ! Toi ? Je ne t’aime pas ! » et toutes les variations entre ces deux cas. « Est-ce bien raisonnable », me dira celui-là me semblant quelque peu sage. Moi, je ne sais, il y a bien longtemps que je ne me pose plus ce genre de questions, elles ne m’amènent que des embarras…
› Il fait chaud !
› Feras-tu ton tour jusqu’au bout, se pourrait-il que tu t’écroules au milieu du chemin ?
› Je vois au loin une forme claire, serait-ce à un deux-pattes, un de ces véhicules qu’ils occupent pour avancer (garé sur le côté) ? À ce moment-là, à cet instant-là, je ne sais ? Mais nous allons avancer pour voir ça de plus près…
› C’est passionnant, votre histoire ?
› Oui ! C’est l’aventure dans la forêt, Monsieur, vous n’êtes pas obligé de me suivre. Peut-être, allons nous découvrir quelque chose d’extraordinaire, subitement, malgré qu’il fasse chaud, ce que l’oiseau ne me dit plus !
› Moi, je dis que c’est un rayon de lumière qui éclaire une partie des branchages ou du sol ?
› Ce que tu vois, au loin, si clair, on dirait bien… Mystère ?
› Oui ! Mais il fait chaud… Et l’oiseau s’en fout de ce que je dis !
20’01 (il se mouche)
› Il se pourrait bien que tu aies raison, c’est un éclat de lumière qui se réfléchit sur un sol, un branchage…
20’40 (la Biche traverse l’allée)
› Ah ! Une Biche vient à traverser, à cent mètres de moi, à peu près, dans un silence complet, j’aurais fermé les yeux une seconde que je ne l’aurais pas vue !
› Alors, c’est quoi cette lumière ?
(il parle tout bas)
› Elle est verte, elle éclaire quelques herbes illuminées sous son rayon, c’est bien cela ! C’est amusant, comment cela fait ; de loin, le vert éclatant apparaissait si blanc ?
› Tu parles tout doucement, à peine t’entendras-tu… à peine on t’entendras tu… à peine, on t’entendra, le sais-tu ?
› Je sais, tu bafouilles ?
› Oui, mais il fait chaud !
› Ah ! C’est pour ça ?
22’18 (sur un tas de bois, un écriteau nouveau, il s’arrête)
› Oh ! Un panneau, amusant ! Sur fond jaune, imprimé en noir, il est dit « danger ! » avec un petit dessin où l’on dit (montre qu’il n’est pas prudent) de ne pas monter sur la pile de bois, elle risquerait de s’écrouler et vous seriez aux abois ! Oh, c’est la première fois que je vois ce panneau, c’est amusant ! On prend vraiment les gens pour des…
› Des quoi ?
› Des…
› Tu vas le cracher, le morceau ?
› Oui ! Des sots (dit-il tout doucement)
› Oh, je m’attendais à pire !
› Oh ! Je puis être vulgaire, sais-tu ?
› Ça va, pas trop de Moucherons ?
› Oui, j’ai vu pire !
› Suffit que tu parles d’eux pour qu’ils s’amènent ! Alors, ton moment extraordinaire, va-t-il venir ?
› Attendez, soyez patients ! Nous avons tout le temps (snif)…
24’23 (il se mouche en marchant)
› Sais-tu que ton chemin est décevant ?
› Ah ! Si, vous allez voir (snif), nous allons tourner à un moment…
› On tourne à droite à gauche ?
› Suis-moi, à droite…
› Il y a une barrière ?
› Quel obstacle ! On passe sur le côté, voilà tout…
› Tu es intelligence toi !
› Oui, je suis un deux-pattes !
› Tous les deux-pattes sont intelligents comme toi ?
› Oh, y’en a même des pires que moi !
› Ah bon ?
› Oh oui !
› Eh, il y a aussi des sots ?
› Oui, beaucoup ! C’est la majorité, mais c’est pas forcément leur faute, on n’a rien fait pour qu’ils ne le soient pas, sots ! On ne les a pas forcément aidés. Je dirais même qu’on les a entretenus dans cette situation, de (ne) pas être plus intelligent qu’ils ne le sont, c’est intentionnel même ! On veut bien vous éduquer, mais pas trop, ou si l’on vous éduque, c’est selon certaines conditions, certains critères ; vous devez faire allégeance, ou sinon vous crierez « misère misère ! » comme en ce moment, quand il fait chaud ! Ça serait même pire, ça serait une fournaise infernale si vous ne prêtez allégeance à aucune caste, à aucun peuplement, à aucune tribu, vous allez les voir vous maudire ! Eh, de dire que cela ne se fait plus, c’est bien vous tromper, Monsieur, cela s’est toujours fait, de médire d’autrui ; d’autant plus qu’il est un étranger (celui qui essaye d’entrer), étranger tout relatif (snif), puisque nous venons tous du même endroit, les distances entre nos ancêtres sont suffisamment grandes pour que l’on oublie que ces ancêtres-là étaient les mêmes, à tous, à tous ! D’où que vous remontiez, peu importe l’endroit, prenez n’importe qui, n’importe quoi, de ce qui s’anime sur cette planète (snif), vous verrez (si vous y regardez bien) ! Ils ont tous les mêmes ancêtres, comme (pour) vous (et moi), c’est curieux n’est-ce pas ? Eh ça (snif), on s’en aperçoit, on le voit depuis peu, c’est comme un petit éveil pour les curieux, ceux qui s’intéressent à la chose, ils le constatent et s’en émerveillent, vous dirais-je !
› Plus qu’il en faudrait ?
› Non ! Pas assez, je dirais, pas assez répéter l’argument, « que l’on vient tous du même endroit ! » (snif) Nous partageons tous, quelle qu’en soit (snif) notre tribu, notre règne, notre espèce animale et végétale. Nous avons tous en commun des petites briques d’informations qui te disent d’où tu viens ; c’est marqué au-dedans, suffit de lire ! (snif)
› Vous répétez ce qu’on vous a dit ?
› Ce que certains ont constaté ! Ils étaient suffisamment nombreux (à l’avoir trouvé) pour que j’accepte cette réalité, comment elle est dite, et peut-être faudrait-il encore l’affiner, nous risquerions de découvrir quoi d’encore plus subtil ?
31’56 (il se mouche)
› Vois-tu, je suis coupé en deux, une partie renifle, l’autre est sèche, une partie pleure, l’autre ne rit pas, elle est sournoise, je suis coupée en deux…
› Et pour quelles raisons ?
› Parce qu’il fait chaud, cela accentue mon déséquilibre…
› On ferait pas dix kilomètres de plus ?
› Oh non, c’est sûr ! Encore deux, trois, ça sera bien suffisant, si j’y arrive, si je ne tombe pas en syncope.
› Tu ne t’es pas encore cassé la gueule ?
› Oh, cela ne saurait tarder ! (snif)
› Alors, vous disiez quoi déjà, que l’on vienne du même endroit, eh, si c’était vrai, cela ?
› Oui, je ne dirais pas que je le crois (snif), mais tout coïncide, beaucoup de choses me le font confirmer, quel qu’on prenne (qu’en soit) l’endroit, d’où vous venez et que l’on remonte aux sources (snif), on aboutit au même ruisseau (snif)…
35’07 (il s’arrête, se mouche et écoute les oiseaux)
› Ah ! Nous frôlons des zones aux chasses gardées, « fait attention ! tire à vue ! abattage sur place ! enterrement aussitôt ! » c’est sous-entendu !
› À ce point ?
› Oui, à ce point ! C’est ce que me dit l’oiseau !
› Et l’on connaît les tombes ?
› Oh, ils le savent, ils les ont vus, mais c’est à nous de chercher les preuves !
› C’est méchant ce que tu dis là ?
› Non ! Méchant est celui qui abattit, celui qui abattit la personne qui ne marchait pas au bon endroit, car cela vexait celui qui s’était (avait) accaparé le territoire en question, celui qui est derrière les panneaux « propriété privée ! chasse garder ! tire à vue ! » Ce sont des panneaux méchants, ce sont des mises en garde !
37’17 (écoute le chant des oiseaux et du moucheron…)
38’07 (il reprend sa marche)
38’27 (il s’arrête à nouveau, écoute les chants…)
38’42 (il reprend sa marche)
38’48 (snif, et s’arrête encore, écoute !)
39’22 (il reprend sa marche)
39’40 (stop à nouveau)
40’04 (repart et s’arrête aussitôt, écoute !)

de 40’05 à 40’36, extrait des variations du Troglodyte ; « quel est ton nom, monsieur l’oiseau ? » se dit l’homme, au lieu de s’interroger sur ce que l’oiseau lui raconte…

(zoom à 40’28)

41’06 (snif) (il marche à nouveau)
› Vous avez compris ? J’ai pas besoin de traduire, c’est éloquent ! C’est étonnant, même !
› Ils savent tout ça ?
› Eh oui ! Eux, ils sont habitués ! Une mémoire rôde dans la forêt, elle leur est transmise dès la naissance…
› Celle de leurs parents ?
› Pas que ! Pas que ! Tout le monde participe ! C’est comme chez nous, mais nous ne le savons pas, nous croyons que nous sommes les inventeurs de nous !
› À ce point ?
› Oui ! À tel point que l’on en fait un dieu, de nous, et après on retourne l’interrogation, l’exclamation, en faisant croire aux badauds que Dieu nous fit à son image, c’est vaniteux ! S’il est un dieu qu’on l’appelle univers, c’est bien suffisant, il n’est à l’image de personne, ce dieu-là ; il est même au-delà des dieux, il est au-delà du vivant, il est l’ultime créateur (la force des choses), et encore, on ne sait pas tout !
(il parle tout doucement)
› Peut-être que ça serait l’information, le maître mot, de tout, ce petit savoir qui se perpétue à travers les particules, à travers les formes animées ; qui dit ce que chaque particule a été ; ce qu’elle transporte partout où elle a été (snif), dans quelle structure elle a habité, la moindre particule ! Ça en fait des lieux, au fil des milliards d’années, ça en fait des aventures, impossible de tout raconter ; même de résumer serait assommant, tant cela a varié…
44’39 (il se mouche en marchant)
› Il fait chaud ! Je puis vous l’assurer, j’en suis coupé en deux !
(il feint de prendre un chemin dangereux)
› Oh ! Ne va pas dans ce chemin, il est formellement interdit ! Y’a marqué comme ailleurs « chasse garder ! propriété privée ! tire à vue ! DÉFENSE D’ENTRER ! » Plus tu t’avances plus le panneau grandi, et il se met devant toi comme une barrière pour t’interdire son entrée à ce chemin funèbre où l’on t’abat et t’enterre aussitôt, sur le côté, voit les zones où les tombes ont été creusées !
(il montre du doigt)
› Quel fantasme ! C’est peut-être vrai, toutefois ? C’est vrai que ces endroits que tu me nommes et que tu me montres sont plus verts qu’ailleurs, comme si une nourriture funèbre justement, y aurait été implantée !
› Oh ! Tu vas maudire !
› Nan… médire !
› Ah, oui…
› Ne maudis que celui qui eut un de ses proches abattus. Moi, ça ne m’est pas encore arrivé, cela ! Mais à force, cela ne pourrait pas tarder, je passe souvent, si souvent près de ces endroits. Un soir ou un matin, l’idée me viendra fugitivement d’y entrer dans ces zones interdites !
› Eh, qu’y feras-tu ?
› Oh ! J’irai voir si l’on me tire dessus, des fois que j’aurais envie que l’on m’abatte.
› Il y aurait des armes automatiques ?
› Certainement ! Avec des caméras, des radars, des drones, tout un arsenal, pour tranquilliser celui qui a accaparé le terrain, où il ne supporte rien, il a peur ! (snif)
› Tu crois ?
› Oui, il a peur ! Plus vous possédez, plus vous devez avoir peur que l’on vous pique ce que vous avez… « pris » aux autres… Oh, vous allez dire que je me répète ; mais (snif), les choses n’appartiennent à personne, on les détient, on les possède un moment, le temps de vivre, et puis, quand vous vous abattez au sol, que vous ne pouvez plus les tenir (détenir), d’autres les récupéreront à votre place. Ils y habiteront, à votre endroit, ou utiliseront votre objet d’autrefois ; un brin de nostalgie vous submerge alors ! Vous regrettez l’époque où vous possédiez tant ; vous vous languissez de ne pas avoir de descendants ; peut-être auriez-vous dû vous dire « si j’avais aimé un peu plus ? » J’aurais trouvé de quoi prendre la relève (snif), un qui serait comme moi, un voleur de territoire, un poseur de panneaux où l’on écrit « défense d’entrée » (en grand !) Voilà ce qu’il pourrait se dire, le gars qui ne cesse d’accaparer… Le petit papillon marron qui passe auprès de moi, lui, lui entre dans ces endroits, il s’en fout bien, tout comme la belette, tout comme l’oiseau ; ces panneaux s’adressent surtout aux deux-pattes et au gibier un peu gros (indirectement), « avant que l’on ne l’abatte ! » me dit le papillon blanc, auprès de moi. Lui (pour lui), c’est pire, on l’écrase par inadvertance, on la gobe, sa chenille, avant qu’elle ne s’envole, avant la métamorphose ! Ce sont peut-être eux les papillons qui les premiers, s’envolèrent, avant les oiseaux ! mais le chant, c’est à peu près sûr, ils sont précurseurs, les oiseaux !

…

Sonagrammes audiométriques :