(parole en marchant – 11 août 2019 à 8h03)

—> 2. « petit chemin » :
—> à corriger quelques incohérences
—> durée : 81’54

[ temporalité ]
› Attention ! Il vomit un peu au début, ça s’arrange ensuite…
› De quel « il », s’agit-il aujourd’hui ?
› Oh, une rémanence de ce « il » emblématique, échappée du « premièrement », qu’on n’a pas su mettre ailleurs…

0’23 (il parle tout bas)
On a été dénoncé, l’oiseau a fait « tititite tii ! »… Je viens trop tôt dans la forêt… on prévient, « il arrive ! »…
(chants d’oiseaux discrets)
4’29 (il se mouche)
6’46
La grande île, pays magique de mon enfance ; que n’ont-ils (pas) fait, les hommes, au-dedans ? Ils se chamaillent, ils se brouillent, ils s’entêtent dans la grande île, grand pays de mon enfance, île magique où je fus sans défense. Moi-même, j’ai accompli mon devoir d’homme, faisant ma première bêtise, mon premier élan, ma première folie, dans la grande île, pays de mon enfance, y retournerais-je un jour ? (j’ajoute) Pauvre comme je suis, n’est pas les moyens du voyage dans la grande île où j’ai failli naître, pays magique, qu’en ont-ils faits les hommes ? Leurs chamailleries funestes, toujours les mêmes rengaines, certains, richesses locales, veulent prendre le pouvoir, comme partout ailleurs, ils se chamaillent les hommes dans la grande île, pays de mon enfance, l’île magique de toutes les défiances, y retournerais-je un jour au-dedans de la grande île ? Mais, pauvret bonhomme que je suis, il pourra jamais venir sans le sou ; même là-bas, ma blancheur leur fait comprendre que j’en ai des sous, mais non !
9’58 (un oiseau lance un appel, télégraphie sonore des volatiles, un « ti titi ti titi ti titi ! », un autre lui répond par un « iii ! » voulant dire merci… ; il arrête sa marche pour essayer de comprendre…)

de 10’09 à 10’15, une Sittelle torchepot

de 10’21 à 10’34, toujours la Sittelle…

10’57 (il reprend sa marche)
Pardon, je vous dérange, je m’en vais, « merci ! » me disent-ils, « va-t’en ! »…
11’23 (le murmure dérangeant d’un avion haut, dans le ciel ; les oiseaux sont discrets maintenant)
Peu à peu, vous faites des révélations ?
Oui, mais je ne cite aucun nom, vous avez remarqué ? Aucun nom du pays de mon enfance, la grande île où je fus sans défense, pays magique !
12’23
Saloperies ! Des saloperies, par terre, toujours là… Quand les hommes seront partis, on pourra voir les traces laissées, en gros, beaucoup de saloperies quelques bombinettes délaissées, à peine explosées, désamorcées peut-être, et beaucoup de déchets qu’il faudra régurgiter sans cesse de la terre, car ils les enfouissent, ces déchets, sans savoir quoi en faire ; et à force, ils en ont péri de leurs détritus tous pourris. Voilà ce que l’on dira quand ils seront partis, les hommes ! Comment la vie peut-elle engendrer une telle engeance ? Il y a quelque chose que je ne comprends pas, que je ne m’explique pas, cette violence inutile ; d’un seul regard il y en a un qui vous juge, et parce que vous n’êtes pas comme lui, déjà, vous veux vous périr (détruire), veux vous faire périr, veux vous anéantir ; par on ne sait quel stratagème dans son esprit, il réagit d’une façon déjà toute pourrie dans sa tête. Oui, la pourriture peu à peu le gangrène, alors il a de la haine, et ne peut s’en défaire de celle-là. Comment la nature a pu engendrer un pareil être, je me le demande ?
Vous voilà encore en train de médire ?
Oui ! Et pourquoi donc je médis ? Est-ce une bonne raison de médire, ai-je de bonnes raisons de bénir, est-ce… ai-je de bonnes raisons de frémir, ai-je de bonnes raisons de maudire ? Ces répétitions sont dans la variation, on ne peut maudire toujours de la même façon, même à (dans) ce sujet-là, nous varions ; thèmes favoris, certes ! Mais quand l’on parle trop des joies de la vie, qu’on s’émerveille d’une nature encore jolie, l’on devient fade ! Oui, il faut périr un peu, il faut apporter le drame et l’on s’en satisfait, on y est trop habitués à cette lame qui sans cesse transparaît, on se l’enfile soi-même d’un trait, et on la retire et l’on s’alarme, que cela fait mal, en effet ! Voilà, voilà !…
18’20 (l’oiseau interroge « tidi qe ? » ; le vent apporte la rumeur de la grand-route toute proche)
… Ma bonne dame, ce que l’on fait sans cesse ! Oh, moi, moi ! Que fais-je, hein ? Je ne fais que répéter… Et de la gangrène, euh, hein hein, je l’observe ! Je la retire, je la régurgite, je la vomis, aussi !
19’29
Finalement, j’aime bien le froid, il apporte le frisson !
19’36 (deux coups de feu, au loin)
Aaah ! Il y avait longtemps que l’on ne tirait plus ? Ça y est, ils recommencent, ils n’en peuvent plus !
Peut-être qu’ils vont te « touer ? »
Oh ! C’est bien possible, quand je vois le vice dans leurs yeux, cette haine, ce sang qui coule déjà, me monte un dégoût ; mais moi, pauvret bonhomme que je suis, que puis-je y faire ? Éructer devant eux ne serait qu’attisé un peu plus vite ma mort ; leur haine dans leurs yeux, ils ne savent pas faire autrement, ils ont besoin de la chair, voir couler le sang, c’est leur stratagème ; la vie leur inventa cette sorte d’idylle, cette sorte de salut, pour qu’ils nous foutent la paix ailleurs ! Mais là où ils sévissent, ils emmerdent le monde, Le monde des autres, des autres qui ne sont pas « eux ! »
21’47 (le Faucon crécerelle répond, cet oiseau en concurrence avec eux, pour quelques proies ; eux le tueraient bien volontiers !)
Et c’est ça qui me désole… J’aurais voulu venir dans la forêt, avec une joie, mais ces coups de fusil me l’ont enlevée tout d’un coup ! C’est le cas de le dire…

de 22’17 à 22’19, l’oiseau dit « u tidi uu ! »

Après coup, je ne vois couler que du sang, je les vois rougir sans honte le sol, ils ont fait leurs ponctions, au-dessus ; quelques bêtes, quelques hommes ont tiré dessus ! Et vous voudriez que ma parole, là, ici, à cet instant, on la répète, qu’on la lise, qu’on la régurgite aussi, mais vous rigolez ! Laissez là au fond du trou, elle n’est pas pour vous… (il parle tout bas) ma parole ; je ne suis déjà plus guère un homme, j’en déteste toutes les formes…
« Oh ! Parce que vous n’avez pas vécu l’idylle d’un amour important », me dit-on, « vous avez de la rancœur », me rapporte-t-on encore ; peut-être ? Mais je ne suis pas à plaindre, je suis pauvre, certes, mais je ne suis pas à plaindre, et d’ailleurs, je ne me plains pas, « je maudis ! » c’est pas pareil ! Je ne m’immisce plus dans vos débats. Là encore, je vais faire une rime, ils sont tous pourris, la plupart, là où l’on maudit, l’un, le Loup, l’autre l’Ours et guère les hommes (ils ont en conflit des territoires que ces derniers accaparent sans cesse). Ils ne se rendent même pas compte que toute la nature, pourtant qui les fit naître, s’empressent de les remplacer par quelques êtres un peu plus dociles. Ils n’arrivent même pas à s’imaginer, les enfriqués de tout, tous ces dictateurs un peu partout, qu’ils produisent les instruments de leur propre déclin, de leur propre perte. Et cela en fait (ajoute) plus d’un dans leur traîne (à) ces quelques-uns… (ils) vont faire périr les autres, ceux que l’on traîne (malmènes)…
(il se mouche)

… les pauvres, les renégats comme moi, ceux qui voudraient vivre en paix, qui n’ont aucune quête d’un quelconque pouvoir, il y en a encore, c’est certain !
Mais qui êtes-vous pour parler au nom des hommes ?
Je ne parle pas au nom des hommes ! Où vous avez vu ça que je parle au nom des hommes, je parle de la forme qui me ressemble, car j’en suis un aussi de cet être-là, je ne me défile pas ! Mais arrêtez, mais arrêteront-ils de tirer enfin ! L’été est à peine fini, que voilà qu’ils tirent encore, c’est le plus détestable des ennuis pour moi dans la forêt, à cet automne leurs tirs incessants en fin de semaine ou en début, c’est selon le rite, ici, est instruit de cette manière, l’on ne tire pas en milieu de semaine. Vous me donneriez une arme, je ne sais pas ce que j’en ferai, mais je risque de faire du dégât, non pas contre ces pauvres bêtes que l’on embête, mais contre eux ! Mais cette joie serait imbécile, d’autres l’ont, ils s’illusionnent, ils ont des illusions, alors ils tirent sur ceux qui s’en différencient de leur forme, un peu toujours (des) deux-pattes, mais de la couleur de leurs yeux, de leurs peaux, de leurs cheveux, si lui, elle ne leur ressemble pas, ils tirent à vue, perpètrent le petit génocide local. C’est une habitude, ils ne supportent rien, ils ne désirent qu’un coït au pire anal, c’est pas banal ! Une colique survient et cela fait mal ; mais je ne m’inquiète guère de ce côté-là, le temps les gangrènes, moi je ne serai plus. Ce qui me constitua, apparaîtra sous d’autres formes, reconstituées, la particule qui me forma, peut-être le lui dira à cette nouvelle forme, ce que je fus, (et) dans quel embarra l’on m’a mis, comme ce le fut pour moi de relire au creux de chacune d’elles, ces particules, tous les corps qu’elles habitèrent, la petite information qui les habita, et qu’elle se déverse comme ça, comme une nouvelle inspiration ; voilà ce que fait chacune de mes particules, tous les jours j’en recrache et tous les jours, j’en absorbe ; elles me transforment, nous transforment. Ce processus est pareil partout, tout se transforme, s’associe momentanément et se disloque, chacun fait l’expérience de l’autre à côté ; on dit « tiens, ah, tiens, tu viens d’où toi ? » « Moi, je viens de la galaxie là-bas au loin, je fus apporté à travers un rayonnement insolite qui traversa un corps et je m’y suis fixé, donc, je t’apporte une information lointaine… »
(Comme par magie, des voix intérieures prennent le pas sur son discours où il ne fait que maudire, elles en explorent les détours et en reprennent le thème avec un autre discours, lui ne s’en étonne plus guère, il déverse ces voix et les mémorisent à l’aide de sa petite machine enregistreuse)
Moi, ce fut de cette étoile-là qu’une partie de mes particules furent construites. Et puis de quelques autres, tout autour, dont j’ai oublié le nom ; et même en avaient-elles, un nom (c’est une manie ici de tout nommer) ? Elles n’existent plus, et à cette époque, la forme que j’assemble n’existait pas encore, elle n’en a pas la mémoire.
Ah ! Voilà ! Et que fais-tu dans ce monde ?
Eh bien, tu vois, j’habite momentanément cet être qui a du tracas. Il se dit, « tiens, qu’est-ce que je fous là ? » Et quand il regarde les formes qui lui ressemblent, il est dans un grand embarras !
Ah bon ?
Oui ! Elles lui déplaisent beaucoup, il n’aime pas leurs manières, leurs idylles, leurs amours et leurs défaites ainsi que leurs guerres, leurs haines, leurs dépits, c’est toujours de la même graine que cela vient, il semblerait qu’une formule toute pourrie les occupe, ils n’arrivent pas à s’en défaire…
Une formule toute pourrie ?
Oui ! Oh, ils appellent ça d’une génétique particulière qui n’est pas parfaite ; mais de quelle perfection parlons-nous, ça n’existe pas ?
Eh ! C’est ce que j’essaye de leur dire, mais ils ne comprennent pas ; ils s’occupent à l’aide de cette formulation, disons-le génétique, c’est ce qu’ils disent qui les gangrène ; c’est de cela qu’il me parle et cela le gêne (le corps que j’habite) !
Cela le gêne ? Ce gène indistinct qui lui rend pénible cette vie… de l’instinct ? Eh voilà, tu fais le malin !
Eh voilà, que tu fais le malin !
Oh moi, je me tais, je vous laisse causer, vous avez beaucoup à dire on dirait, je me tais ! Faites et dites ce que vous voulez, moi je me tais !
Ça y est !
Quoi ?
Il boude !
Non ! Il a dit qu’il écoute !
Ah ! Oui, mais il boude en même temps, c’est sa manière, il se vexe, il voudrait être le roi !
Ah bon ? C’est quoi un roi ?
C’est un gars qui se prend pour, euh… on ne sait quoi, il veut user d’une gloire momentanée…
Ah bon ? (la particule est nouvelle, elle ne connaît pas encore le corps qu’elle habite, l’autre particule le connaît ce corps, elle est logée dans une zone solide où la mémoire de lui se décompose et recompose sans cesse, elle sait tout, de lui !)
Oui, il est occupé à travers des écritures…
Aaah !
Oui, et dans ces écritures, il recherche une gloire momentanée, je vous disais…
Ah bon ?
Oui, mais cette écriture est pleine de contradictions, puisqu’il ne veut pas qu’elle soit lue, il prétend ne pas écrire pour les autres, et pourtant ce qu’il laissera sera bien lu un jour, peut-être ? Et il s’enorgueillit de cette gloire, et de cela, il veut en être le roi !
D’être lu un jour ?
Oui !
Vous le concevez ainsi ?
Moi, je dis, « ça me paraît évident ! » C’est la contradiction !
La contradiction ?
Oui, c’est-à-dire, euh, on prétend être innocent, alors que l’on ne l’est pas du tout, on clame une vertu, alors que l’on n’est absolument pas vertueux, on prétend on prétend, à une pureté d’âme à un éveil, rendez-vous compte, l’éveil ! Cela les occupe beaucoup. Eh, ce qui est curieux, c’est que tous leurs éveils, je me suis instruit de ce qu’il se passe sur cette planète, tous leurs éveils aboutissent aux mêmes réflexions, (à) la gloire de certains qui se prétendent « éveillés ! »
Mais qu’est-ce que cela veut dire l’éveil ? Dites-le-moi, enfin ?
Aaah ! Mais si je le savais, je vous le dirais, personne n’en sait rien, même ceux qui prétendent être éveillés n’en savent rien, et ils le clament, ils ne le disent pas ouvertement, mais ils vous le font comprendre, ils disent « comprend mon âme, mon esprit, elle te domine, suit mon précepte, mon concept, idolâtre-moi, idolâtre ma pensée ! »
Mais, ne sont-ils pas capables de penser d’eux-mêmes ?
Oh ! Il y en a peu ; il leur faut des exemples, des guides, alors, euh, certains glorifiés de cette aura, qu’ils ont, se prétendent des guides, prétendent avoir fait une grande découverte, « l’éveil » au creux de leur personne (révélé au grand jour, pour leur apôtre, les idolâtres)…
Ah bon ?
Oui oui oui oui !
Aaah ! C’est donc ça ?
De quoi « c’est donc ça » ?
Aaah ! C’est pour ça que j’en vois qui ameutent les foules…
Oui, et après ?
Après, ils clament (n’importe quoi), et on les applaudit tout le temps, ils clament, ils clament, eh, certains tirent en l’air, avec, euh, ce qu’on appelle des armes, des coups de feu comme ceux que l’on entendit tout à l’heure et que l’on entendra encore, peut-être, si l’on ne tire pas là-dessus, sur lui, la forme qui avance dans cette forêt…
Oh, ne l’ébruitez pas !
Oh, il écoute, il le sait !
Oui, je le sais, je vous ai entendu, mais je me tais, continuez…
Donc euh… c’est… ce son des glorieux ?
Ah, ce sont ceux-là les glorieux ? Oui, ils veulent une gloire, cela les occupe beaucoup, on appelle ça « l’ego ! »
L’ego ?
Oui ! Un mot dans cette langue, de trois lettres, très ancien ; ils s’en sont aperçus que leur ego les submergeait souvent. On arrive à le distinguer, c’est un mal qu’ils n’arrivent pas à se défaire, un gène défectueux probablement, si je parle à travers leurs arguments. (Les oiseaux, autour, semblent guider leurs discours ?)
Peut-on s’en défaire de l’ego ?
Ah ! C’est pour cela que certains prétendent avoir trouvé l’éveil et perdre leur ego, mais pfft ! à tout vous dire, c’est plutôt l’inverse qui se produit ; l’honnêteté dans ce bas monde est rare, et d’éveil mmm, on y voit plutôt un aveuglement ; moi je vais vous dire, là où il y a leur éveil, c’est ça qui les perturbe, il n’y a rien, rien à comprendre, il n’y a pas d’éveil ultime qui convient à tous…
Ah bon ! C’est une affirmation bien péremptoire ?
Ce n’est pas une affirmation, c’est un constat, mais ne le dites pas très fort, on risque de nous entendre… Je le vois ainsi, mais je peux me tromper, et l’on pourrait utiliser d’autres de leurs mots, mais ils ne suffisent pas à décrire cette vacuité, leur rien du tout (le leurre du rien du tout), vous rendez-vous compte, l’absence de penser, l’absence d’être !
C’est la mort ?
Même pas !
Ah bon ?
Ouais, c’est mystérieux… c’est que, voyez-vous, quand ils s’approchent un peu trop du mystère de la vie, de la chose qui les anime, ce qui fait la vie au creux d’eux-mêmes, de leur forme, de leur structure, ce qui les assemble, la formule quand elle se dévoile un peu trop, elle leur montre un vide « immense ! »
Ah bon ?
Oui oui oui oui ! (il parle tout bas) eh, c’est ce vide immense qu’ils n’arrivent pas à lire… au-dedans, il y a le principe essentiel de ce qui les anime… Oh, il y a bien des structures, des entités sur cette planète qui ont une perception différente d’eux ; ils ont beau avoir des spécialistes qui ont planché toute leur vie sur cette problématique, (à) essayez d’en donner une définition à quelque chose qui n’en a pas besoin, finalement…
Ah bon ! (dit-il, en marmonnant)
Oui… Comment voulez-vous donner une définition à quelque chose qui se déplace tout le temps ?
Ah ? Voilà, donc le vide, cette vacuité, serait… ne serait qu’un déplacement ?
Voilà ! Il y a un peu de ça ! Prenez l’instant où vous percevez comme un éveil, vous ne voyez rien, y’a rien à voir, il n’y a rien à percevoir, c’est une absence de tout !
47’04 (un oiseau a crié ! ; il s’arrête de marcher quelques secondes et repart)
L’oiseau, dans la forêt, est au courant ?
Ah, cela dépend de la particule qui l’habite (une parmi des milliards et des milliards), si elle est de notre engeance où l’on discute, il est probable qu’il en soit averti, mais ce sont comme la plupart des êtres, ces oiseaux-là n’en sont pas forcément avertis. Je dis, l’oiseau, quel qu’en soit l’être, même la plus simple des bactéries ne le sait pas forcément…
47’52 (il se mouche)
Eh ! Vous savez ce stratagème que nous utilisons, en utilisant (en pratiquant) le langage de ces êtres (je doute qu’il) puisse apporter une quelconque compréhension, lui qui ne fait que mémoriser ce que nous disons, à travers sa propre voix, d’ailleurs, au risque d’être pris pour un fou…
Oh ! Ne vous inquiétez pas, fou ? Il l’est déjà ! Un peu plus fou que les autres, peut-être ? Fou comme la plupart, avec sa petite différence qui le personnifie, mais ne vous inquiétez pas, ils sont tous différents, chacun à sa propre folie, lui, la sienne, les autres, la leur ! Nous-mêmes, particules élémentaires, nous transportons la folie d’un univers qui se constitua il y a fort longtemps ; nous-mêmes avons nous une folie, qui nous (cette) gangrène ? Ou si elle ne nous gangrène pas, elle nous transforme ; les forces qui s’insinuent au-dedans de nous et les informations que nous transportons de notre histoire, il faut bien qu’elles se déversent quelque part ; le monde est plus subtil qu’on pourrait le croire, plus vous regarder de près, plus vous y voyez une diversité. Nos propres structures sont infiniment plus complexes qu’on pourrait le croire, c’est comme un, comme ils disent, un serpent qui se mord la queue, lové sur lui-même, il croit mordre quelqu’un d’autre, et ce n’est que lui qu’il mord, l’image est belle !
Et de leur monde, ce qu’il disait tout à l’heure de l’absurdité de ces êtres qui se tapent sur la figure en permanence. Est-ce de drôles de façons ici, de le faire incessamment ?
Oui, oh, ils y sont habitués, ils sont manigancés par la petite formule qui les habite et qui leur permet de cohabiter, mais n’ayant aucun sens des réalités, des équilibres précaires, pour les maintenir en vie suffisamment, ils en sont (à se) manipuler (entre) par eux-mêmes ; par quelques individus, plus fous que les autres, ceux qu’il (de ceux dont ils parlaient) parlait tout à l’heure, les enfriqués de tout, les corrompus, les enfriqués de tout…
Vous vous répétez ?
Oui, je cherche… les despotes, les dictateurs, voilà ! Je recherchais dans ma mémoire les mots, enfin, dans ma mémoire, dans « sa mémoire ! », car j’ai ce don particulier à ma formule de visionner la mémoire des êtres que j’habite, je suis la particule élémentaire qui leur permet de faire cela, je fais partie de cette engeance-là…
Aaah !
Et vous ?
Oh, moi j’affecte les passages, je suis absorbé par un être et en ressors, je ne fais que transporter une information qui se trouvait à mes côtés, je l’englobe, j’en fais une copie et je la transporte…
Ah oui…
Et vous, quand vous quittez l’être ?
Il semblerait que, pfft, une formule essentielle veuille que j’oublie (me faire oublier) une partie de ce qui constitua cet être, je n’ai qu’un sens de l’organisation locale, mais je ne la transporte pas, je ne fais que l’organiser (quand je le quitte, je ne suis plus relié à sa mémoire).
Ah, voilà notre différence, tandis que moi… je la transporte…
Mais vous ne la lisez pas forcément ?
Oh, il y a beaucoup parfois, et je ne sais pas forcément ce que (quoi) je transporte, je suis comme un facteur, comme ils disent…
53’45 (un oiseau martèle l’air de son « tuite ! » régulier ; il s’arrête pour l’écouter)

de 54’32 à 54’53 (??)

54’56 (il reprend sa marche)
Merci l’oiseau, il nous apporte sa vision, vous avez compris ?
Une partie, je ne parle pas beaucoup « oiseau » !
Donc, vous êtes un transporteur… Et vous savez où vous allez aller.
Ah non ? Cela dépend de la manière dont je serais évacué…
Ah !
À travers une sueur, un bout de peau, une digestion honteuse, une pisse du matin (une collision avec un neutrino cosmique), c’est très varié !
Et combien de fois cela s’est produit avec vous ?
Oh ! Je ne compte plus ! Moi-même, avec ces forces qui me constituent (me constituant), furent perturbées selon les endroits, j’ai traversé les feux des plus divers, des températures très élevées qui m’ont modifié… Je fus colporté sur la terre par une comète lointaine qui n’existe probablement plus. Il y a plusieurs mouvements d’étoiles et de leurs explosions pour délimiter la chose où je fus conçue. Eh, peut-être que mon équilibre atomique (particulaire), sans être un atome, fut constitué au moment où l’univers actuel se constitua…

de 57’12 à 57’18, un Faucon, non, un Pic-vert, crie sur les derniers mots de la phrase précédente…

57’14 (on ne sait pourquoi, cela fait beaucoup rire l’oiseau, un Faucon crécerelle, je crois ; il arrête sa marche à la demande instantanée des particules, seraient-elles vexées ? ; à 57’28, il reprend sa marche, une Tourterelle des bois regarde la scène avec circonspection ; non non, aucune invention de notre part ; c’était dans l’air, voilà tout.)
57’52
Et vous ?
Oh, moi, je ne me pose pas cette question, je suis très ancien aussi, mais la notion du « je », c’est très difficile pour moi, comme pour vous, je suppose ?
Oui…
Nous discutons entre nous, alors que les autres particules qui sont autour de nous, et fortes (fortement) affairées, sont très actives, elles aussi. On a bien droit à une pause !
Nous discutons entre nous, pendant que les autres particules autour de nous, fortes (fortement) affairées, sont très actives elles aussi. On a bien droit à une pause !
Bien entendu ! C’est une bonne idée de créer des pauses, des moments où l’on ne fait plus rien…
Si, nous causons ! Enfin, nous formulons des transformations d’informations entre nos deux formes élémentaires. Et lui, informer de cela, les convertit dans un langage compréhensible pour les formes qui lui ressemblent ; tout n’est que transformations, des transcriptions, c’est ça qui ne… que l’on devrait dire !
Vous avez totalement raison, j’avais oublié ce processus ? Il en a du courage, s’il fallait qu’il transcrive tout ce que les particules qui l’habitent sont en train de raconter…
Oh ! Je crois que sa vie n’y suffirait pas, il y aurait longtemps qu’il sera disloqué, s’il arriva un jour à cette fin, c’est impossible ! Il faudrait qu’il exprime une chose qui correspond à tout l’univers environnant, l’univers très grand qui constitue ce monde, sans parler du reste, qu’ils ignorent, nous n’en parlerons pas !
Oui, je suppose qu’il lui sera difficile de transcrire ces descriptions sans âge aussi… Le monde est ainsi fait, mais on ne sait pas de quoi il est fait, c’est ça qui est amusant ! On ne sait absolument pas la subtilité ultime…
Oui, ce qui m’étonnera toujours, ici, c’est cette manière qu’ils ont à vivre dans ces chamailleries, alors qu’ils pourraient vaquer à des occupations plus heureuses, cohabiter d’une manière harmonieuse (jusque dans leurs jeux, qui pourraient paraîtres anodins, il y a toujours cette rivalité, ce combat, cette lutte, une volonté de gagner à tout prix ? Un défaut de leur vie ? J’en doute ! C’est ainsi, ici !). Tout est prévu pour que cela se produise et ils ne trouvent aucune façon de (le) faire, (sauf) se chamailler, se contester, accaparer tout ; c’est curieux quand le vivant sur cette planète laisse un développement plus grand à une espèce, et (cette dernière) qu’elle tente toujours d’accaparer plus que les autres, dans le contentement d’elle-même, c’est que la formule est foireuse quelque part ?
Oui, c’est ce que nous tentons de décortiquer. Lui-même qui transcrit notre parole, en est à ce point d’essayer de décortiquer ce processus foireux qui les habite, les formes qui le constituent et qui l’habitent !
Les formes qui le constituent et qui l’habitent ?
Oui ! Chacun est constitué de formes diverses, (elles) qui s’assemblent, toutes plus petites les unes que les autres, jusqu’à atteindre l’élément fondamental qui le constitue, la particule ! Nous ne parlons pas du plus fin, car c’est comme je vous le disais tout à l’heure, dans leur ignorance encore. La couche qui les occupe est celle qui les anime ; et ce qui les anime bute sur une faille, une fêlure, un dérèglement du moins, un besoin de mutations élémentaires qui n’arrivent pas à se produire, pour permettre un quelconque avenir à l’entité en question, la forme qui les constitue, qui n’est qu’une forme constituée d’autres formes plus petites…
Ah ! Ils appellent ça, attendez voire que je recherche dans la mémoire… des eucaryotes !
Oui, ce sont des eucaryotes, des êtres multicellulaires, voilà, voilà, voilà !
Ah oui, j’ai entendu parler de ça !… Et alors ?
Eh bien, lui-même tente de décortiquer le stratagème, il voudrait savoir, comprendre, ce qui déconne ! Oh ! J’utilise des termes que l’on dit vulgaires, mais ce sont ses propres termes…

1h05’40 (le chant monotone d’un oiseau ponctue le discours, « tu tu tu tu tu ! »)
… euh, pour moi, c’est la définition, le sens, qui l’emporte, peu importe le niveau de vulgarité, nous ne sommes d’aucun monde de leur forme, nous pouvons utiliser tous les termes appropriés, ce sont les sens, l’expression, ce qu’elle représente, qui nous intéresse, peu importe la manière de dire, n’est-ce pas ?
Oh oui, tout à fait, ce ne seront qu’eux qui se plaindront de la manière de dire…
Oui, ils se plaignent souvent…

1h06’28 (il se mouche ; les particules s’en amusent et ironisent, lui annote sans se poser de plus amples questions…)
Tiens ? Tiens, il se mouche ?
Oui, il a des déficiences de l’âge, (celle) de se moucher tout le temps quand il avance… quand il marche…
Une déficience de l’âge ?
Oui, son corps vieillit, comme l’on dit ici, il va bientôt disparaître, nous allons nous disloquer et transparaître en d’autres formes, nous aussi !
Ah oui, j’ai été enchanté de vous connaître !
Moi de même ! C’est curieux, nous n’avons aucune animosité à exprimer de leur manière, « comment se fait-ce ! » Si je puis dire, cette expression qui m’amuse beaucoup ! Je l’ai lu dans un de ses écrits…
Ah, vous lisez ses écrits ?
Ben ! On (le sort m’a) m’a donné cette capacité, vous savez, je prends les choses, il faut bien que j’aie un… une capacité de sélection, je ne lis pas tout ! Je prends en vrac, la plupart du temps je lis les premières lignes, les débuts d’un ouvrage, les débuts d’une information. J’en lis parfois un peu plus, comme ce le fut avec lui ; car il y a des choses étonnantes dans ce qu’il dit, ah, oh, ce n’est pas pour le flatter, mais il balaie large le type !
Oui ! C’est son aptitude, mais ne lui dites pas trop, il est fou ; il se méfie de sa propre gloriole. Il a un problème avec son ego !
Lui aussi ?
Oui, mais lui, il n’en veut pas !
Ah ! C’est nouveau ?
Oui, il est fâché avec lui, il lui dit toujours, je répète son expression, « ferme ta gueule ! »
Aaah, voilà ! C’est ça, ils ne sont pas bénins, ils ne font pas bon ménage ensemble ?
Non !
Il devrait quitter son ego ?
Oui, mais vous savez, c’est ça, leur problème à tous, ils n’arrivent pas à s’en défaire puisque quelques formulations dans cet ego leur sont nécessaires pour subsister. Sauf que cette perception, ce mécanisme insidieux a des effets délétères, il devrait être utilisé à une mesure plus… plus sobre ; plus… comment dire, je ne trouve pas les mots, voyons voir… de l’utiliser avec parcimonie, mais pour utiliser les choses avec parcimonie, il faut qu’il y ait un discernement à comprendre ce qui est bon et mauvais pour lui, c’est ça qu’il n’arrive pas à distinguer. Eh, qu’avoir une discipline vis-à-vis de cela, trop franche, vous provoque un enfermement, dont vous ne pouvez vous défaire ; à la fois, il faut permettre (autoriser) l’inventivité que permet cet ego, l’ouverture d’esprit que cela apporte dans la recherche solitaire que l’on a ; et à la fois, il faut le refréner quand on veut en tirer une gloire, une reconnaissance trop prononcée, c’est ça qui l’agite !
Aaah voilà voilà, vous avez étudié la question, on dirait ?
Oh ! C’est que je suis au courant de tout, même des choses les plus intimes…
Ah ah !
Ce serait trop long à débattre et il n’aimerait pas transcrire tout ce que je dirais, et il usera d’une capacité qu’il a, de pouvoir censurer notre parole, je ne suis pas sûr que tout ce que j’égrène en ce moment soit retranscrit exactement de la manière dont je les ai dites ? Mais vous savez, dans une transcription d’un langage à un autre, il y aura toujours une interprétation qui ne sera pas la nôtre, mais la sienne !
C’est un scribe, quoi !
Voilà ! Vous avez trouvé le mot (le terme) très ancien qu’ils utilisaient, dans leurs premières civilisations ; il est un scribe qui inscrit la mémoire des autres (les lois, les règlements, les actes) des nantis, des despotes locaux, des rois du moment…
Ils aiment bien leurs chefs ?
Oh, ils ne savent pas faire autrement. Ils ne savent pas être leur propre chef, donc ils ont besoin de chefs, c’est comme leur forme, elle est une association mise au point depuis des milliards d’ans de la planète, mais sa formulation est foireuse comme je vous le disais, elle n’arrive pas à sauter une étape, c’est ce qu’ils recherchent (lui, comme beaucoup d’autres) !
Eh vous, vous avez la solution ?
Ah, certes non ! C’est un processus qui n’est pas de ma compétence ; il fait partie de ce qu’ils appellent cette vacuité dont nous parlions tout à l’heure, la sorte d’éveil qu’ils recherchent tant !
Eh, y arriveront-ils à s’éveiller ? Vous croyez ?
Ah, certes non ! Je ne crois à rien…
Ah ?
Je ne fais qu’exprimer ce que je perçois, mon interprétation n’est que transcription plus ou moins transgressée d’une information plus ou moins déflorée, mais le constat est là, on voit quelque chose ; l’interprétation que l’on donne va varier d’un être à l’autre. Si nous occupions un autre être que lui, la transcription se ferait différemment, vous voyez le processus ?
Oui, je… je pense avoir compris ce dont vous parlez, cela me semble assez clair ? Alors comme ça, ils sont à un stade de leur existence cruciale, si je comprends bien ?
Voilà ! Je pense qu’il leur reste quelques siècles de subsistance, s’ils n’arrivent pas à changer leur processus existentiel, ou du moins si le vivant en eux ne trouve pas la formule adéquate, ils seront remplacés peu à peu, leur espèce va s’effondrer sur elle-même à travers des principes archiconnus de déclin…
1h16’00 (il se mouche)
Cela s’est déjà produit à maintes reprises, ils n’en ont pas la mémoire ni la souvenance, ils n’existaient pas quand cela s’est produit, ils en ont quelques traces, des espèces antérieures qui occupèrent les lieux où ils habitent. Ils comprennent enfin que le temps n’est pas immuable, il vous change tout le temps… (le scribe les prévient d’un croisement imminent de deux individus)
Voilà des deux-pattes, il faut nous taire…
1h17’23 (le croisement se produit sans heurts)
Bonjour !
1h17’36 (une des particules, le facteur d’information, s’interroge…)
Ça veut dire quoi « bonjour », j’ai oublié ?
Oh, c’est une façon de se saluer, de dire je te reconnais, je n’ai pas d’agression, et ils émettent un sourire si cela se passe bien, sinon le bonjour est sec et froid !
Eh là, ce fut comment ? Je n’ai pas vos yeux !
Hein ! Dis, toi, la forme qui transcrit ce que l’on dit, ce fut comment ?
Ce fut… normal ! Souriant, amusé, de mon accoutrement…
Ah bon ?

(le scribe, en interprétant le sourire des deux-pattes croisés, un échange d’informations inconscientes, mais ressenties, émises par les particules bavardes)
Oui, ils se doutèrent qu’il se trame quelque chose, que je ne suis pas seul ; mais ils le savent insidieusement, sans en prendre véritablement conscience, c’est que quelques particules élémentaires, des constituants vont capter l’information de vous, vous émettez un peu trop de votre rayonnement ! Et une partie de l’information qui rayonne de votre élément s’est basculée vers eux !
Vous affabulez, là ?
Moi je vous dis l’information que je vous reçois… que j’ai reçu ! Je ne suis qu’un transcripteur, ne l’oubliez pas, j’affabule peut-être, mais je transmets, après vous en faites ce que vous voulez ! Ah, on dit que j’affabule, et ben, ce n’est qu’interprétation des choses…

(les particules discutent entre elles, le scribe transcrit, l’oiseau dit « ti trui ! »)
Qu’est-ce que vous en pensez de ce qu’il nous dit ?
Il n’a peut-être pas tort ! C’est vrai que je ne cohabite pas très souvent avec des particules qui rayonnent autant, ou du moins qui captent des rayonnements dont il nous parle, je n’étais pas conscient que je puisse rayonner (à ce point) ? Mais est-ce moi qui rayonne ?
Oh non, pas forcément vous ; mais, ce qui émane de ma personne rayonne !
Mais euh, c’est un fait courant, je pense que cela se produit pour tout être, il rayonne !
Aaah voilà ! Donc c’est normal, y’a pas à s’inquiéter, c’est pas un particularisme ?
Ah non ! C’est un particularisme par contre, ce qui est rayonné est unique ! Chacun rayonne une information qui lui est propre et le principe de rayonner est un principe extrêmement courant dans l’univers, d’après ce que j’en comprends ?
Ah oui oui oui ! Oui alors dans ce cas, ne nous posons pas trop de questions, c’est un fait normal ! Cela ne transgresse pas notre perception, nous sommes dans un processus donc courants ?
Oui, mais à chaque fois unique ! Et c’est dans cette variation-là moi, que je cherche ; le fait unique à mémoriser, transcrire pour apporter (tenter d’atteindre) l’information qui me semble nécessaire d’apporter…
Ah voilà, voilà…
Ben oui ! C’est bien !
On peut arrêter, là ?
Ouiii ! Arrêtons, là !

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