(parole en marchant – 24 sept. 2019 à 18h39)
—> 2. « petit chemin » : on l’interroge sur ce qu’il fait ou dit
—> durée : 18’09
Comme à l’accoutumée, on l’interroge sur ce qu’il fait ou dit…
Vous semblez pressé d’en finir avec cette étape que vous faites dans la vie ?
Oui, bientôt j’aurais vu ce qu’il y a à voir, j’aurais compris ce que j’ai pu et vous redonnez mon compte rendu illusoire, à cette entrevue que je fis de vous, auprès des formes qui me ressemblent… Ah ! Un caillou intéressant, excusez-moi… eh bien non, j’ai cru y reconnaître une forme, là aussi, mais pas des nôtres, une plus caillouteuse… Oui, je suis pressé d’en finir (avec ce temps), c’est pour ça que je marche vite ; allons, allons, finissons-en de ce temps ! Bougrement…
Bougrement quoi ?
Chiant !
Le moment où vous marchez ?
Non ! Le moment où je vous ai côtoyé !
Oh ! Monsieur, vous médisez encore !
Oui, j’aime bien médire…
(le vent se lève)
Ce n’est pas bien ! j’eusse préféré que vous disassiez (dissiez, que vous eussiez dit) « cela n’est pas bien » pour user d’un pédantisme dont j’aime bien user ; les expressions surannées et dépassées que l’on n’emploie plus guère d’ailleurs, d’un autre temps où il fallait que l’on comprenne dans un entre-soi très particulier, la bourgeoise entrevue, ou la plus aristocratique qui soit, à côté des patois des pauvres gens que l’on ne comprenait guère non plus. (version : les expressions surannées et dépassées d’un autre temps que l’on n’emploie plus guère d’ailleurs, où il fallait que l’on se comprenne dans un entre-soi très particulier, de la bourgeoise entrevue à d’autres plus aristocratique encore, à côté des patois des pauvres gens, qu’on ne comprenait guère non plus.) C’est ce qu’apporta à ces époques de lumière, dit-on, le langage autorisé à l’opposé du langage local (dans ce pays d’Occident). On ne cessa de coloniser depuis des territoires toujours plus loin, l’idée était venue de faire cela. Ah oui ! Chose curieuse, recoloniser la zone à eux (areu), pays, le continent d’où l’on venait, les gens euh, qui habitaient depuis longtemps aux mêmes endroits, les lignées découlant même de nos propres ancêtres très lointains, ne comprenaient (comprirent) pas pourquoi on désirait tant les accaparer et conquérir des territoires qu’ils avaient déjà eux-mêmes accaparés ? Oh, sans s’en rendre compte, ils y habitaient depuis tellement de temps, qu’ils ne savaient plus trop s’il fallait qu’un territoire appartienne ou non. On leur fit bien comprendre que si l’on y arrivait avec des canons, c’était le plus fort qui ratissait la mise, imposait sa loi, son diktat, « eh ! toi, si tu n’aboies ne revendique pas par la force, là où tu habites, on va s’occuper de toi ! » C’est ce qu’ils leur arrivèrent, ils furent colonisés, donc ! Depuis, l’on ne cesse de décoloniser à travers cette honte d’avoir tenté de reconquérir des territoires qui n’étaient que les berceaux des zones où nous apparûmes (ils apparurent, les ancêtres), le pays originel, il y a déjà longtemps, quelques millions d’ans ! Notre propre lignée s’est séparée, oh, il y a moins d’un million d’années d’après ce que l’on arrive à déchiffrer, quelques centaines de milliers d’années seulement (trois cent mille ans aux dernières nouvelles). Cela ne fait pas tant de générations (un peu plus de dix mille), et au fur et à mesure des déplacements, les groupes se sont attachés à certains territoires, (ils) s’y sont arrêtés. Eh, de siècle en siècle, on détermina que cette zone appartenait à tel ou tel par on ne sait quelle décision autoritaire, il fallait que l’on ait des territoires. Si vous regardez bien, beaucoup d’animaux mammifèrant (mammaliens) entre autres, mais même les oiseaux, même les insectes (encore plus les plantes avec les forêts), se déterminent (s’établissent dans) des territoires temporaires qu’ils occupent, toujours momentanément ! Pour nous-mêmes, c’est du même acabit, sauf que l’on croit y être né éternellement dans ces territoires que l’on s’est octroyés sans demander une quelconque permission à ceux qui habitaient (déjà là), une quelconque… qui y habitait déjà, quémander une quelconque collaboration, bonne entente. C’est ainsi que les animaux de la forêt (de maintenant), quelques ruminants, Antilopes locales, des Biches, des Cerfs, des Chevreuils (des Daims, des Rennes, Élans ou autres) qui étaient habitués à vaquer dans les plaines, furent obligés de se regrouper dans le peu de forêts qu’il restait pour se protéger… de nous ! Parce qu’ils ne pouvaient guère faire autrement.
(version : C’est ainsi que les animaux de la forêt de maintenant, quelques ruminants, Antilopes locales, des Biches, des Cerfs, des Chevreuils, des Daims, des Rennes, Élans, ou autres, étaient habitués à vaquer dans les plaines, ils furent obligés de se regrouper dans le peu de forêts qu’il restait pour se protéger… de nous ! Parce qu’ils ne pouvaient guère faire autrement.)
L’on organisa des chasses, sous forme d’un cérémoniel, pour les abattre goulûment, tenter d’obtenir tel et tel trophée pour sa propre gloire d’avoir vaincu l’animal… Ça, c’était au temps où les animaux (rivaux) ne nous bouffaient plus, ils n’en avaient plus la carrure, nous avions découvert quelques objets, qui, au fil du temps, amélioration après amélioration, devinrent des armes pour nous protéger (nous devenions des prédateurs) (version : Ça, c’était au temps où les animaux prédateurs ne nous bouffaient plus, ils n’en avaient plus la carrure, nous avions découvert quelques objets au fil du temps, devenant des armes de plus en plus perfectionnées pour nous protéger, nous devenions à notre tour, des prédateurs) ; alors qu’au début, nous étions quelque peu peureux, le grand fauve aux dents de sabre sévissait dans la plaine et nous ne faisions pas le poids contre lui. Il fallut bien, il fallut bien que nous trouvions quelques moyens de défense ; cela a trop bien marché, de défenses, nous en avons à profusion. Tant et si bien que n’ayant plus d’animaux à combattre, dans l’ennui que cela représentait, d’accumuler de tels armements, nous décidâmes entre nous de nous conquérir mutuellement…
Un bruit j’entends ; une machine roulante…
Et les guerres apparurent, ces rituels (devenus) coutumiers que nous avons, de nous combattre pour occuper l’ennui…
Où est-elle la machine ? La machine… Ah, nous approchons…
(le bruit devient intense)
14’41
Ah, ça y est, je l’ai trouvé, c’est un tracteur qui grattouille son champ !
Est-il gros, le tracteur ?
Assez ! Assez ! Nous allons nous en éloigner, excuser de la gêne occasionnée. Ils n’ont pas d’heure, ces gens, pour travailler, la nuit, le jour, c’est selon les humeurs du temps, avant les récoltes, avant la pluie, avant l’ouragan, récolter les fruits de la terre, après y avoir déposé quelques saloperies (trop souvent) pour que cela pousse plus vite, plus rentable, non pas pour celui qui plante et cultive, mais pour celui qui lui vendit la semence, le pesticide, l’engrais, tous plus délétères les uns que les autres, ils nous tuent à petit feu, avec leurs produits de (déversés dans) la terre ; n’ont-ils pas compris ? Aujourd’hui, on s’alarme, on leur dit, « vous tuez la guêpe et le bourdon », le moustique ne virevolte plus sur nos (le) pare-brise de nos machines roulantes…
16’53 (un oiseau lance des cris d’alertes, « crii crii crii ! » plusieurs fois jusqu’à 17’10, entre 1,5 kHz et 9 kHz ; probablement un Pic-vert ? Ressemble aussi au cri de l’Épervier ou d’un Faucon ?)
Regardez-moi ces petits chevreuils, comme c’est joli… « Excusez-moi de vous déranger ! » ils étaient trois aujourd’hui, l’oiseau les a prévenus, vous avez entendu, « crii crii crii ! Attention, attention !… Deux-pattes s’en vient ! »
Il y a une collaboration donc ? (le bruit du tracteur pas loin, est transporté par le vent, rendant pénible l’écoute dans la forêt)
Eh oui ! Il ne faut pas croire que nous ne soyons les seuls à communiquer ? Je vous ai dérangé, excusez-moi, je vais vous apeurer, vous pourrez revenir dans quelques instants, après que je soye passé… que je sois passé, pardon ! dans l’endroit où vous grignotiez je ne sais quoi…
(plus d’énergie, la machine enregistreuse lui coupe le sifflet)
(parole en marchant – 24 sept. 2019 à 19h27)
—> 2. « petit chemin » :
—> durée : 6’12
(Une grande partie de son discours précédent n’a pu être mémorisée, il ne s’est pas aperçu tout de suite qu’il devait remplacer les containers à énergie de la machine enregistreuse. Il arrive à la rallumer plusieurs minutes après qu’elle se soit éteinte, l’énergie résiduelle des containers, s’étant régénérée suffisamment pour qu’il puisse la faire fonctionner pendant quelques instants encore.)
Oui, je disais à propos des choses, décidément j’ai la tête en l’air. À propos des propos, sur… aaah, quoi déjà ? (snif) Oui, des performances artistiques, notre ego, etc., a bien été mémorisé ; le retranscrire à nouveau ce soir (snif), si cela n’a pas été fait, pour ne pas oublier, en dire l’essentiel du moins ? Pourquoi avais-je la tête en l’air ?
(il se reproche de n’avoir pas appuyé opportunément sur le petit bouton des recordings de la machine enregistreuse, il n’a pas encore compris qu’elle n’avait plus assez d’énergie précédemment, pour fonctionner)
Je laisse ouverte la mémorisation des vibrations sonores de ma voix et du reste, au cas où j’oublierais… tête en l’air, tête en l’air, je suis ! Recommencer à se remémorer ce qui me traversa, je ne suis pas très expert dans l’exercice, ça sort et j’oublie très vite, si la mémoire n’est pas là, pour tout me le rappeler, c’est dramatique ! J’en ai perdu des récits comme cela, et voilà que les acouphènes me réprimandent, ils me disent « c’est pas bien, tu te fatigues, tu perds la boule ! » On va tenter de la garder, la boule, jusqu’à mon arrivée. Nous disions quoi ? Oui, pendant que tu y penses encore, répète donc…
3’14 (il se mouche)
3’28
Oui, cette idée que j’eus plus ou moins approximativement, il y a quelque temps déjà, de réunir tous les travaux antérieurs que j’ai gardés, dans une sorte de dépouillement final, et provoquer un semblant de performance ; de performance, pour m’en défaire en me moquant de nous, de ce mécanisme artistique qui, à mon sens, ne veut pas dire grand-chose ; me moquer de l’entre-soi, et du soi absolu (snif), de laisser un nom (à la postérité, quelle bouffonnerie !).
Le problème c’est que si tu ameutes les foules, on voudra te nommer (te reconnaître comme étant des leurs) !
C’est cela le souci ?
Il faudra argumenter suffisamment adroitement pour que le nommage de toi soit circonscrit dans les limites que tu définiras et tenter de te faire comprendre (snif, snif)… faire une vente aux enchères (snif)… ah, il faudra quelques alliés, te dévoiler un peu… ne réaliser cela que quand l’ouvrage sera terminé, pour que l’on comprenne un peu (snif).
C’est probable…
(Il n’y a plus d’énergie, la machine enregistreuse s’éteint, la suite de son récit est perdue, évaporée au creux de la forêt… Ce n’est pas bien grave, la forêt gardera pourtant quelques traces de cette entrevue, dans des souvenirs épars, qu’à un moment, elle lâchera, sur le premier venu, elle attendra patiemment, comme toujours, qu’il passe !)
…
Sonagrammes audiométriques :