(parole en marchant – 4 nov. 2019 à 16h19)
—> 2. « petit chemin » : paroles pour médire dans le vent
(Il parle fort à cause du vent)
Je fais tout pour vous en empêcher, vous dissuader de lire ceci, de lire ceci… Ce récit est sans intérêt, il médit tout le temps de vous, euh, cela va vous lasser, méfiez-vous, méfiez-vous ! Paroles de mécréant aussi au-dedans ; méfiez-vous, méfiez-vous ! Il faut garder son quant-à-soi, oh, vieux ! Vieille expression du temps jadis, on ne sait plus trop ce que ça veut dire, mais en quelque sorte, il faut raison garder. Moi j’ai lu avant vous, c’est évident ! Puisque je fus le scribe de ce qui me vint au-dedans du crâne, eh, j’ai fait la plupart du temps l’opération fort simple de transcrire ce qui me venait ; et puis c’est tout. Et dire que tout cela vienne de moi serait exagéré, je n’ai ajouté que les virgules, les points, la ponctuation ; les mots qui me semblaient le (les) plus appropriés, toutes sortes de superlatifs innombrables auxquels il faudra vous y accoutumer. Oui, l’on tourne autour du récit, moi je vous dis qu’il faut se méfier ! Après, vous faites ce que vous voulez, vous en subirez les conséquences d’avoir lu jusqu’au bout tout ceci. Oh, certainement, il ne s’agit d’aucune littérature commune agréable. Elle est plutôt détestable, on médira beaucoup de vous, méfiez-vous, méfiez-vous ! Vous trouverez le sujet abject, oui, détestable ! C’est le mot. Eh, dans cette journée venteuse où me vient, dans cette balade impromptue, l’idée de mettre tout ceci dans la machine enregistreuse, je ne peux m’empêcher de tourner autour de l’ouvrage qui se termine (le vent enfle, il monte la voix)… J’y peux rien, c’est le vent qui me dit de mettre, il est tourmenté aujourd’hui, vous l’entendez, n’est-ce pas ? J’entends à peine ce que je dis, ce que je dis… Le feuillage des arbres s’en va tombant en cet automne, mais il en reste encore beaucoup, ce qui fait que les feuilles résonnent… à l’éventement qu’elles subissent, eh, cette vibration sonore, cette protubérance venteuse, agrémente la parole, l’inspire ! Et je respire ce vent rafraîchissant, j’adore le vent, ouais !
En ce moment, je ris ! Doucement, sourdement, mais certainement. J’ai le soleil en plein dans la figure, son rayonnement, de la soirée s’en venant cet après-midi, qui peu à peu… s’en va, finissante… disais-je, le soleil en plein dans la figure où je vois à peine mon chemin, si, quelques branchages ! Quelques branchages, disais-je, j’observe un peu partout, des bêtes que je ne pourrais voir ? Que dis-je, les bêtes, c’est moi la bête. « Les habitants de la forêt » (devrais-je dire), j’évite d’utiliser ce mot, il est bête, plus bête que les bêtes qui l’utilisent, c’est-à-dire nous, ouais ! (version : « Les habitants de la forêt » devrais-je dire, je devrais éviter d’utiliser ce mot, il est bête ce mot, plus bête que les bêtes qui l’utilisent, c’est-à-dire nous, ouais !) Non, disais-je, les animaux, les êtres vivants merveilleux qui vivent au-dedans de la forêt et que l’on abat goulûment en cette époque de chasse. Je ne sais si les chasseurs sont là, je risque d’en croiser, toutefois. Le vent me masque leurs ébruitements, de tuerie, leurs « pan pan ! » systématiques, avec leur grande tige ferrailleuse où ils envoient à partir du tube de l’engin qu’ils utilisent pour tuer, quelques plombs, mitrailles pour abattre quelques-uns de ces êtres qui vivent au-dedans de la forêt (le vent souffle intensément). Au-devant de moi, le chemin fait deux traînées, deux réverbérations de l’eau (accumulée) dans ces traînées, me fait croire à un véhicule, on s’y laisse prendre, ces deux lignes droites éclairées par le soleil finissant… Entendez-vous ce que je dis ? (le vent persiste intensément)
Je ne sais ? Oh, vilain vent ! (il arrive dans la partie basse du chemin)
Ça y est, je ne vois plus les deux lignes droites, au loin. Comme des phares (snif), elles sont dans le chemin où son ombrage est important, forme une ombre où seules se reflètent ces deux traînées de roue dans le chemin où l’eau se reflète (oui, je me répète) et me renvoie le rayon du soleil, l’astre du jour, vous savez ? (snif)
Je me disais en partant, pourvu que je n’aie aucune inspiration, que je n’allume point la machine enregistreuse. Il faudra que je transcrive cette parole, encore à perdre mon temps ; mais le perdrais-je mon temps à transcrire tout ceci, des propos inutiles certainement ?
Non ! Je vois, oh, tout près, la cabane des chasseurs, elle n’est pas occupée, on va être tranquille ici, j’avance à son opposé et je m’en vais vers ce chemin où au bout, il y a un Frêne magnifique qui m’attend (snif). Il est sûrement très exposé au vent, lui aussi, et son enfeuillement est sûrement déjà parti, envolé par le vent, ses feuilles de l’été précédent. Que tombent sur moi… ah, les feuilles d’un Sorbier*, arbre rare dans la forêt ; le Chêne, le Hêtre (snif)…
Oui, quelques Sorbiers ici… Ah ! J’en vois beaucoup (de ses feuilles à terre), arbre rare dans la forêt, de la famille des Roses, le savez-vous (snif), sauf erreur de ma part, je ne pense pas me tromper…
10’27 (le vent souffle continûment)
La petite réserve à énergie, sur la machine enregistreuse, m’indique qu’elle est à moitié vide, devrais-je la changer en cours de route ? Je n’ai pas amené avec moi, les petits containers… containers à énergie suffisants pour remplacer ce… dont l’écoulement énergétique est épuisé et qu’il faudra recharger tantôt. Faudrait-il mieux que je m’arrête de parler pour qu’elle ne s’épuise encore (davantage) ; je ne sais, je ne sais ?
J’attends que cela vienne (la parole), car quand cela arrive, savez-vous, on ne peut s’empêcher de déblatérer beaucoup de bêtises, beaucoup de choses, mais à travers ces quelques bêtises souvent émises, il y a parfois de bons mots, de bonnes inspirations, qui vous apportent quelques délectations pour un travail futur, une inspiration joyeuse, technique, où des éléments d’une brique ajoutée aux autres briques déjà du récit, qui peu à peu se monte et qui s’emboîtent aux boîtes déjà existantes (version : J’attends que cela vienne, « la parole », car quand elle arrive, savez-vous, on ne peut s’empêcher de déblatérer beaucoup de bêtises, beaucoup de choses ; mais à travers ces quelques bêtises souvent émises, il y a parfois de bons mots, de bonnes inspirations, elles vous apportent quelques délectations pour un travail futur, une inspiration joyeuse, technique, où des éléments d’une brique ajoutée aux autres briques déjà du récit qui peu à peu se montent et s’emboîtent aux boîtes déjà existantes.). Le terme « boîte » convient bien pour l’instant (snif), car chaque écriture est une boîte interconnectée à d’autres boîtes qui s’englobent dans de précédentes boîtes, ou deviennent elles-mêmes, des grandes boîtes qui engloberont les récits d’avant, c’est selon ce qui vous vient. Le vent se calme un peu, j’entends un peu aussi des gazouillis d’oiseaux, qui eux doivent bien s’accrocher aux branchages pour ne pas s’envoler. Mais de cela, ils le savent le faire, parce que moi, si j’étais à leur place, euh, je m’en trouverais quelque peu désorienter, ne sachant voler en effet, à cause de ma lourdeur et de mon manque d’ailes ; vous savez, ces bras emplumés, qui font que vous puissiez voler… Le vent revient en effet, et certainement, je devrais traverser une pluie passagère. Les ondées sont très brusques, passagères justement, c’est le mot ! Je me retourne, même tout autour, le ciel est clair, je ne vois aucune bête, elles attendent, patientes, c’est jour de chasse, en effet. Il faut avoir une bonne vue, l’ouïe ne sert plus à rien, le vent est trop fort. J’ai (un habillement de) la couleur du Chevreuil, du Cerf ; va-t-il me confondre, le chasseur (celui) qui me tuera par mégarde ou par envie de se faire un deux-pattes comme lui (snif) dans sa sauvagerie habituelle, sa tradition ancestrale qu’il veut maintenir, geste superflu d’une époque révolue (version : Je porte un habillement de la couleur du Chevreuil, du Cerf ; va-t-il me confondre le chasseur, celui qui me tuera par mégarde ? ou par envie de se faire un deux-pattes comme lui [snif], dans sa sauvagerie habituelle, celle de sa tradition ancestrale qu’il veut maintenir, geste superflu d’une époque révolue).
Ah ! L’on voit encore quelques bidons dans le chemin, délaissés. Ils ne veulent pas les ramasser, ces bidons de plastique contenant (ayant contenu) des liquides toxiques, pour leurs machineries, dans la forêt où ils la coupent assidûment… Non ! Je ne vais pas vous renvoyer encore une fois mes emportements envers cette classe laborieuse qui sévit dans la forêt, non, j’en ai déjà assez dit. Ce ne sont que des ouvriers, ils ne suivent que les ordres qu’on leur donne (ordonne)… (s’amène au loin un véhicule blanc)
Ah ! Je vais être dérangé par une machine roulante, on dirait ; va-t-elle venir vers moi ? Je me retourne, arrive-t-elle par-derrière moi ? Apparemment pas, tant mieux.
17’40
L’eau est revenue dans la forêt depuis un certain temps déjà, il pleut toutes les semaines, presque tous les jours depuis plus d’un mois. La forêt avait besoin de cela. Oui, je vous disais du Frêne, on s’en approche, et comme je vous (le) disais, isolé comme il est, en lisière du bois, eh bien, il n’a plus aucune feuille visible, il les perd toutefois avant, le Frêne, avant le Chêne, avant le Hêtre. Plus aucune feuille ! Tous les arbres des haies n’ont que le Gui qui subsiste, aux feuilles persistantes. Des arbustes pour la plupart, Aubépines, Prunelliers, ou quelques Châtaigniers ont encore leurs feuilles jaunissantes… Noisetiers, Aubépines, disais-je, quelques souches… quelques souches de Lierre qui tentent une escapade sur un arbre autour, les Fougères déjà toutes jaunies, les cynorhodons des aubépines Églantiers, est mûre, sont mûres, pardon ! Les mûres que j’ai vues sur les… Ronces, ont-elles été déjà mangées, je n’en vois aucune ?
21’03 (il se mouche)
21’14
Ah, il y a du monde, des chasseurs très certainement ? On risque de faire demi-tour, j’ai pas trop envie de les croiser ces gens-là !
23’03 (après quelques bourrasques)
Allez-vous finir votre discours par (avec) cette manière de dire, de maudire (sur) des gens qui tirent dans la forêt, qui tirent un coup.
Ah oui ! C’est le cas de le dire, ils tirent un coup. Plusieurs coups mêmes, dirais-je !… Je n’entends pas de « pan pan ! », le vent ne me les apporte pas ? Serait-ce que des bûcherons, cela m’étonnerait ? Ah, les mûres auxquels j’ai goûté il y a quelques jours ne sont… ne sont plus mûres, elles n’ont pas eu assez d’ensoleillement, elles vont rester rouges comme avant…
(au loin, ce sont bien des bûcherons. Ils s’en vont à cause du vent, à cause d’un jour finissant ?)
* (Alisier torminal, Alisier des bois ou Sorbier torminal [Sorbus torminalis])
…
(parole en marchant – 4 nov. 2019 à 17h15)
—> 2. « petit chemin » :
—> 3. « singes savants », petit chemin (??) paroles pour médire dans le vent
Le vent vous a pris la vedette, mes chers oiseaux, je me dépêche de rentrer, une averse s’annonce, le ciel est tout noir derrière moi. Aujourd’hui, on entendit que du vent ; à peine vos gazouillis, vos parades, vos dialogues. Le vent avait la suprématie, c’est vrai qu’il est très grand, il recouvre toute la planète, vous respirez son air continuellement, il vous permet d’exister comme pour moi-même, il nous insuffle des airs souvent très bons, parfois délétères. Cela, eh, vient… cela vient, cela dépend d’où vient le vent, c’est selon.
2’00
Pareils, comme à l’accoutumée, ce soir les hommes vont se reposer, ils laissent tranquilles la forêt. J’ai l’impression de me répéter, d’avoir déjà dit ça, il y a peu de temps déjà. C’est vrai que je deviens vieux, et pour rimer un peu, c’est que je sens que je deviens aussi gâteux ; de plus en plus, je radote (snif) en même temps que je m’étiole, comme à l’hiver qui s’en vient, peu à peu comme le Chêne, j’ai mes feuilles qui tombent, jaunies par le temps, rougies parfois même, non pas par le feu, mais par l’usure. Cette nécessité d’un renouvellement que l’on fait de nous (snif), dans cette nature où l’on ne veut pas qu’un être multicellulaire persévère continûment, il faut le renouveler à travers une quelconque sexualité, jamais vraiment les mêmes (snif), dans une diversité que (dont) seule la nature a le secret. (version : Cette nécessité d’un renouvellement que l’on fait de nous [snif], dans cette nature où l’on ne veut pas qu’un être multicellulaire persévère continûment, il faut le renouveler à travers une quelconque sexualité, jamais vraiment identique [snif], dans une diversité dont seule la nature a le secret.) D’abord de se subdiviser (en une myriade d’entités) et puis de trouver (snif) mille et une manières de transmettre l’information de sa pérennisation, en gros, les plans de fabrique de ce qui nous constitue…
4’34 à 4’43 (une bourrasque du vent masque sa parole, comme une censure ; au cas où il énoncerait quelques secrets à préserver)… par leur… nettoyer… Cela traîne, c’est agaçant ! (snif)
À bientôt soleil ! À bientôt, le vent (il lui répond par un souffle élégant) ! À bientôt, la forêt !
(ajouts)
Souffle élégant du vent, peut-être de son nettoiement, son amusement ou sa prévenance, comme pour nous dire que bientôt il devra tout balayer, saurons-nous l’écouter, le Vent ? Avec l’Eau, le Soleil et la Terre, les bâtisseurs de nos vies.