(texte manuscrit – 14 avril 2020 à 23h56)
—> 3. « singes savants », considérations philosophiques : sans cesse varier
Comme nous ne pouvons que varier, sans cesse varier, parce qu’il n’y a pas moyen de faire autrement ; avancer en variant sans cesse, se perpétuer selon un plan de fabrique initiale permettant de reproduire sans cesse, sur un même principe, des êtres, des choses, eh, à chaque fois une petite variation, un changement, une progression vers une destinée inconnue des yeux, si vous en avez l’usage…
Au-dedans de ces variations se trouve le hasard des destinées de chacun ; mais aussi un cheminement indistinct qui nous fait avancer, destinant chaque être à une expérimentation propre ; et derrière tout ça, un déterminisme flou pouvant amener les fruits d’une déraison, d’une folie, d’une extase ou d’une perception nouvelle selon le schéma moteur de votre vie, vous apportant du réconfort ou beaucoup d’ennuis. Peu de choix s’offrent à vous : se fondre dans la masse ou éructer avec les fauves de votre clan ; suivre le troupeau ou tenter la renommée pour un exploit, un art accompli, une invention, une découverte, ou beaucoup de bruit pour satisfaire un égo, et dire qu’il vous construit. Oh, rien n’est simple, vous naviguez à vue et les dérapages sont légion, vous pouvez rompre à tout moment ; le sort obtenu la récompense est toujours la même, au bout, un éternel recommencement, après votre déclin, votre finissement, votre mort certaine, un remplacement de quelques individus de la même graine ou d’un plan similaire, à côté ou très loin, selon l’allure du vent, là où il ira vous porter.
Le sort, au bout du compte, quel est-il ? Y en a-t-il un d’enviable ? Qui peut répondre, la fin de chacun reste toujours la même ? Nous sommes dans un processus qui nous dépasse grandement, un tout petit rouage sans importance, une simple variation, un changement local momentané, une expérience, elle sera récupérée indirectement par tous les organismes nous ayant permis de fonctionner, de vivre simplement. Au moment de notre dislocation multicellulaire, chacun enlève un morceau à ce corps qui nous anima, gardant une trace indistincte, immatérielle, infime certes, mais véritable. Tout cela s’ajoute à une expérience globale, celle que réalise le vivant dans son ensemble ; rien n’est perdu, tout est gardé, il suffit de savoir trier, chercher, comprendre, attendre et progresser peu à peu, un simple sens, issu d’une nécessité : varier sans cesse (parce que l’on ne peut faire autrement).